Berlioz est poète, et surtout poète lyrique. Aucun musicien, on peut le dire avec certitude, n'a su mieux que lui manier l'orchestre, donner une extraordinaire intensité de couleur aux moindres accompagnements, choisir les timbres, graduer les sonorités, et régler l'économie des instruments de manière à produire les effets les plus opposés. Entendez ce bruissement féerique : une légère brise courbe les brins d'herbe où susurrent les grillons et que frôle l'aile veloutée des papillons de nuit...
Et ce rôle conscient du poète n'est pas moins essentiel dans le drame musical que dans le drame parlé. La Musique est l'âme féminine du drame, toute de sentiment, toute d'amour, suivant l'expression même de Wagner; le Poème est l'intelligence et la volonté lucide de ce drame.
Au point de vue de la méthode, nous nous sommes appliqué à présenter tout d'abord les faits poétiques et dramatiques, tels qu'ils s'affirment dans l'oeuvre. Les écrits théoriques du maître, sa correspondance, les inductions de ses commentateurs et les nôtres ne viennent qu'ensuite, à titre d'explication et de vérification.
A mesure que Ton réfléchit, l'originalité de l'auteur se dégage ; ce ne sont point des réminiscences que l'on entend, ce n'est point la musique de Beethoven ou de Gluck, c'est celle d'un artiste qui est bien lui-même, d'un compositeur doué d'une personnalité indiscutable.
Les ouvrages de Richard Wagner ont été vivement attaqués, et le sont encore, au point de vue dramatique. Il s'est même produit une évolution importante de la Critique hostile au maître : on ne conteste plus sérieusement, en Wagner, le musicien.