— Il est temps pour toi de t’envoler.
La jeune femme espérait que son père n’allait pas faire un de ses grands discours habituels : elle avait une sainte horreur de cela. Si ses parents étaient lents, majestueux et élégants, Lucy n’avait d’yeux que pour la rapidité, l’efficacité et la simplicité. Elle ne portait d’ailleurs aucun bijou ni artifice de la sorte. Pas de bague comme son père ni de maquillage comme sa mère. Comme s’ils avaient lu dans ses pensées, ils sourirent et son père lança :
— Ce ne sera pas long, ne t’en fais pas.
— Bien. Je vous écoute, alors, riposta Lucy.
Ses parents ne lui dirent rien qu’elle ne savait déjà. Ils la mirent en garde contre son cœur, la sachant sensible malgré son dur caractère. Ils la mirent en garde contre la vie : elle apportait parfois son lot de complications, mais il fallait qu’elle reste dans le chemin tracé et qu’elle fasse abstraction de son instinct, trop présent chez elle.
— Je suis la voie qui m’est indiquée, oui, je le sais, répéta-t-elle pour leur faire plaisir, se forçant à ne pas lever les yeux au ciel
𝑰𝒍 𝒚 𝒂𝒗𝒂𝒊𝒕 𝒆𝒖 𝒖𝒏𝒆 𝒆𝒓𝒓𝒆𝒖𝒓 𝒅𝒂𝒏𝒔 𝒍𝒂 𝒑𝒓𝒐𝒈𝒓𝒂𝒎𝒎𝒂𝒕𝒊𝒐𝒏 𝒅𝒆 𝒔𝒐𝒏 𝒅𝒆𝒔𝒕𝒊𝒏, 𝒄𝒂𝒓 𝒓𝒊𝒆𝒏 𝒅𝒆 𝒄𝒆 𝒒𝒖’𝒆𝒍𝒍𝒆 𝒗𝒊𝒗𝒂𝒊𝒕 𝒂𝒖𝒋𝒐𝒖𝒓𝒅’𝒉𝒖𝒊 𝒏𝒆 𝒓𝒆𝒔𝒔𝒆𝒎𝒃𝒍𝒂𝒊𝒕 𝒂 𝒄𝒆 𝒒𝒖𝒆 𝒔𝒆𝒔 𝒑𝒂𝒓𝒆𝒏𝒕𝒔 𝒍𝒖𝒊 𝒂𝒗𝒂𝒊𝒆𝒏𝒕 𝒑𝒓𝒐𝒎𝒊𝒔
Elle n'accordait que rarement sa confiance. Même à ses amis, pour qui elle portait pourtant une immense affection ; car elle savait que toute personne pouvait un jour ou l'autre retourner sa veste. C'était si facile de trahir, plus simple encore que d'être loyal.
- Nous sommes dans la salle Baptême.
- Toutes vos salles ont un nom ? Je vais m'y perdre à force.
- Parce que vous croyez que c'est plus simple chez vous, avec vos rues, quartiers, villes, régions, et j'en passe ?
- Ok, je te l'accorde.
- Très aimable.
- Non, je comprends ce que tu penses, nuance. J'entends seulement tes sentiments, pas tes pensées. J'entends ta peur, ton angoisse, ton excitation, tes envies de fuir, ta fascination pour mes yeux, aussi.
- Ok, c'est très gênant.
Il n'y a rien à envier aux vies humaines, lâcha Lucy. La majorité suit une norme ennuyeuse à mourir. La plupart aiment se tuer au travail, pour ne pas gagner grand-chose, avoir des crédits sur le dos et peiner toute sa vie. Avant d'être malade et de ne pas s'en sortir. Ils ne savent pas profiter de quoi que ce soit. Ils voient l'argent, la gloire mais pas la Vie. Oh non, vraiment, vous n'avez rie à envier à ces idiots.
Pas tellement. En fait, nous vivons tous dans un monde dont nous ignorons la vraie origine. Nous sommes là, mais nous ne savons ni pourquoi, ni comment, quand on y réfléchit bien. Et surtout, nous sommes assez bêtes, nous, humains, pour vivre dans un monde que nous ne connaissons pas, mais que nous croyons nôtre.
N'importe quelle mère aurait accepté de vendre son âme au diable pour sauver la chair de sa chair.
Jem réprima un frisson quand elle lui saisit la main. Cette fille était spéciale, il le sentait, elle dégageait une énergie incroyable et se tenir près d’elle était comme se tenir au bord d’une falaise : l’adrénaline du vertige mélangée à la peur du danger.
Les Terriens deviennent de plus en plus... stupides. Ils n'ont plus les mêmes valeurs, ils ne voient que par leur technologie et mettent en danger leur Terre, leur précieuse Terre sans aucun remords. Aucun état d'âme.