Si vous avez dévoré les œuvres de Ann Radcliffe, de Jane Austen, des soeurs Brontë, d’Elizabeth Gaskell ou de William Wilkie Collins, vous apprécierez très certainement ce roman de Amelia Opie, qui se veut une satire des mœurs de l’Angleterre du XIXème siècle.
L’enfance de Adeline Mowbray, la jeune héroïne, est bercée par les idées fantasques et libérales de sa mère, Édith Mowbray, que les dangereux penchants littéraires pour la philosophie et la politique placent comme une femme d’intelligence supérieure aux yeux de ses vieux parents et de son voisinage. Cette savante arrogante étant cependant peu disposée à remplir les fonctions domestiques de première nécessité, et n’ayant tout simplement ni le temps ni la patience de s’adonner à des tâches astreignantes, c’est sur la débrouillardise d’Adeline que reposera très vite la gestion du domaine. Mais dans l’ombre du génie maternel, la petite mènera sa propre instruction dans la bibliothèque d’Édith afin de s’élever au même niveau intellectuel. C’est ainsi qu’elle s’éprend des écrits de Frédéric Glenmurray qui rejettent violemment l’institution du mariage.
Lorsque mère et fille se rendent à Bath (LE lieu à la mode de nombreux romans victoriens) en quête d’une admiration plus importante que celle qui leur est vouée dans leur comté, elles y font la connaissance de celui qui bouleversera leurs vies respectives : Monsieur Glenmurray lui-même ! Confortée dans les opinions que ses lectures ont forgé en elle, Adeline réfute corps et âme le mariage et se lance aux côtés de Glenmurray dans la folie d’un amour libre se passant de toute bénédiction…
Initialement paru en 1804, le livre d’Amelia Opie fait presque figure de pamphlet dans une société anglaise qui s’enorgueillit d’un certain conformisme (du moins en apparence). Celui qui ne respecte pas les convenances de son rang et de son temps est aussitôt condamné par la pensée collective (et les bruits courent vite), aussi le choix de vie de Adeline Mowbray apparaît-il comme un scandale. Nombreux sont ceux qui lui tournent le dos, sa mère la première (malgré son ouverture d’esprit feinte et ses théories extravagantes). Toutefois, Amelia Opie n’oublie pas de garder la morale sauve à la fin de son livre, ne pouvant décemment condamner l’institution du mariage.
La fiction rejoint la réalité puisque le récit s’inspire de l’existence tumultueuse de Mary Wollstonecraft, l’une des pionnières du féminisme, dont la fille est une femme de lettres tout aussi célèbre : Mary Shelley, à qui l’on doit le redoutable "Frankenstein".
Un roman historique, d’amour et de mœurs, brillamment écrit (attendez-vous à trouver, au cours de votre lecture, des formules telles que « Plût au ciel… ! ») et qui, s’il ne surpasse pas l’ironie acerbe de Jane Austen, réserve tout de même son lot de flèches moqueuses envers l’hypocrisie de son époque.
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