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Citation de coco4649


              La mort du poète (*)
Extrait 1

                    Vengeance, souverain,
                             vengeance !
         Que ma supplique monte jusqu’à
                                     toi :
                 Soutiens le droit et punis
                              l’assassin,
         Fais que son châtiment de siècle
                               en siècle
             Proclame ta justice à l’avenir

          Et fasse la frayeur des criminels.

Le poète est tombé ! – prisonnier de l’honneur,
     Tué par des ragots infâmes ;
Le plomb au cœur, la soif de vengeance dans l’âme,
     Il a baissé son front vainqueur.
    L’indignation fut trop profonde.
     Devant les lâches, les retors, ‒
  Il s’est dressé contre les lois du monde.
  Seul comme à chaque fois... et il est mort !
    Mort !... à quoi bon les larmes vaines,
Des louangeurs tardifs le cœur inopportun
    Le babil des excuses, de la gêne ?
    L’heure a sonné de son destin !
    N’avez-vous pas dès l’origine
    Persécuté son libre don,
    Soufflant sur des flammes mutines,
    Pour vous distraire, sans raison ?
    Réjouissez-vous... l’offense ultime
    L’aura jeté dans le tombeau :
    C’en est fini du cœur sublime,
    De l’âme fière, du flambeau.
    Le meurtrier reste impavide,
    Il vise et tire... affreux combat :
    Son souffle est froid, son cœur est vide,
    Son pistolet ne tremble pas.
    Pareil à des centaines d’autres,
    Chassé chez nous de son pays,
    Quêtant la chance et les profits,
    Il méprisait ce qui est nôtre,
    Et notre langue, et nos chemins ;
    Que savait-il de notre gloire ?
    Inscrit au sang dans nos mémoires,
    A-t-il compris pour notre histoire
    Sur quoi il a levé la main ?

  La mort l’a pris, la terre va le prendre,
  Comme l’autre poète obscur et tendre,
    Proie d’une aveugle jalousie –
Lui que si puissamment il avait fait entendre –
Abattu comme lui par un coup sans merci (**).
                        Janvier-février 1837


(*) Il s’agit de Pouchkine.
(**) Allusion au sort de Vladimir Lenski, dans Eugène Onéguine


//Mikhaïl Iourievitch Lermontov (1814 – 1841)
/ Traduit du russe par André Markowicz,
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