Fatiguée, elle s'immergea toute dans l'ombre épaisse du pont, sans fermer les yeux. Dans les profondeurs, l'eau était pleine d'un tel silence, d'une fraicheur et d'une luminescence tellement silencieuse que l'idée de remonter à la surface était effrayante. Mais soudain, l'eau se mit à parler, hurler, taper sur des gongs, sur des rails, puis sur des cloches qui tintaient lourdement, comme fêlées. En réponse, un coeur pris d'effroi cognait fort. Maria se débattait, avalait de l'eau. Elle émergea à l'air. L'ait tonitruait par-dessus sa tête d'un fracas de ferraille qui vibrait et gémissait. Maria nagea jusqu'à la berge, regardant avec terreur le ciel.
Voici la lumière de la lune, pour lors encore faible et transparente. Voici une mare qui s'enflamme. Voici que dans la mare, telles les étoiles de la Voie lactée, frémissent, scintillent et voguent des feuilles de bouleaux, de trembles et de tilleuls, et de vieux ormes. Les buissons vacillent et de frottent aux troncs. Les troncs chancellent sous le poids des cieux, sous le poids de l'obscurité du soir qui descend sur leurs cimes. Ce n'est qu'un petit bois clairsemé des environs de Moscou, près d'une gare, mais comme il est plein de la plénitude de la terre!
Le dos calé contre le mur, le petit garçon est assis au-dessus de la falaise, sur une saillie de rocher jonchée de plumes d'oiseaux et d'éclats de briques. C'est au début de l'été, alors que les églantiers moussaient de toutes leurs corolles, qu'il a découvert et fait sien ce minuscule morceau de mont que nul ne connaissait.
- Nous polémiquions
- A quel sujet?
- Dante!
- Tout Dante?