En Inde, il y a toutes sortes de prénoms qui veulent dire toutes sortes de choses. On les emploie souvent à tort et à travers. On m'appelle Safia, la Vertu. Mais je suis Shamim, le Feu. On voudrait que je sois Satya, la Vérité, Sadhana, la Vénération, Sarala, l'Honnêteté. Mais je suis Sandhya, le Crépuscule, Sanvali, le Clair-obscur, Sharvati, la Nuit.
Je suis Shampa, l’Éclair. Shamali, celle qui vit sur l'arbre à soie. Shakuntala, celle qui fut élevée par les oiseaux. Et quand je parle de moi, je suis Raka, la pleine lune. C'est ce que j'étais dans le désert. Quand tu t'adresses à moi, appelle-moi Raka.
Le vent de l'Inde dans les hauteurs
Porte, indolent, dans son sein
Du curry doré les senteurs
Et de l'encens les lourds parfums.
Le vent de l'Inde au-dessus du pays,
Jadis fécondé, aujourd'hui pesant,
Emporte du feu de charbon la suie
Et de l'orbe du soleil le safran.
Le vent de l'Inde dans les ruelles indiennes
Colporte de vieux récits
De vie et de mort, d'amours et de haines.
Si le vent indien tu poursuis,
Et l'oreille lui prêtes,
Alors, sans détour, je t'avertis :
Les contes du vent indien sont traîtres.
L'aurore aux doigts roses progressait lentement dans le bandeau de ciel au-dessus de la ruelle. Les premiers pèlerins n'allaient pas tarder à réciter leurs prières du matin dans les eaux peu profondes du Gange.