Baenga Bolya, , dépeint une Afrique ensanglantée où 32 pays sur 45 sont en guerre ou livrés aux bandes armées.
Baenga Bolya dénonce notamment les divers trafics (faux médicaments, drogues, armes), la prostitution enfantine, le tourisme sexuel, les enfants-soldats, les fouilles archéologiques sauvages.
Une écriture au "couteau" assassine, d'un écrivain tourmenté, doté d’une sensibilité exacerbée.
Un roman "témoignage" déstabilisant, une lecture indispensable.
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Polar africain : des tyrans et des cocus
(MFI) Les cocus posthumes, le deuxième polar de l'écrivain zaïrois Bolya, fait suite à La polyandre, dont l'humour macabre avait fait le succès. On retrouve dans le nouvel ouvrage les mêmes personnages, l'inspecteur Robert Nègre, Oulematou, la princesse africaine aux maris alternatifs, son amie Rosemonde et l'infâme Makwa, l'ami d'enfance africain du policier.
Le décor et le milieu sont les mêmes, le Paris des immigrés africains, en particulier la place d'Aligre et sa foule bigarrée, où se côtoient Blancs, Noirs et Maghrébins. Le récit commence par la découverte d'un double crime atroce : un beau matin, après le marché, on dégage des immondices les cadavres de deux fillettes noires – des jumelles – qui ont été violées. A côté de leurs corps, des poils de léopard et une fine mèche de cheveux blonds. On appelle l'inspecteur Nègre…
Sa patiente enquête va lui faire découvrir d'étranges cérémonies initiatiques pratiquées par une mystérieuse secte africaine qui se réunit la nuit dans le bois de Vincennes. Un grand maître au visage masqué par une peau de léopard, officiant devant deux poupées Barbie blondes, ordonne à ses adeptes terrorisés de s'adonner à un culte obscène qui s'inspire de la crainte révérentielle que suscitent les jumeaux dans les sociétés africaines. Pour le grand maître, qui œuvre pour le compte d'un « successeur de Dieu » au pouvoir dans un pays africain, le sang des jumelles est une eau de jouvence.
En réalité, comme le découvrira l'inspecteur Nègre, la secte est au service d'un réseau de trafiquants d'organes, de mines anti-personnel, et, subsidiairement d'animaux protégés par les conventions internationales. L'ordonnateur financier de ces trafics en tous genres est un blanc, au nom prédestiné, Jean-Baptiste Sangsexe, prototype de l'expatrié à la fortune douteuse. Il est le mari de la belle Rosemonde, laquelle poursuit sa recherche en vue d'une thèse de doctorat, sur les performances sexuelles des mâles africains. Pour finir, l'inspecteur Nègre (décidément en passe de devenir un autre Mégret ou un second San Antonio) démasquera tous les coupables, dont Makwa, son ami d'enfance, qui essayait de le faire chanter.
Au-delà d'un récit vivement mené à coups de scènes sinistres ou cocasses, le polar de Bolya est un réquisitoire contre les potentats superstitieux et sans scrupules qui se sont parfois emparés du pouvoir en Afrique. Un des personnages du roman réclame d'ailleurs la création d'un Tribunal Pénal International pour l'Afrique habilité à les juger. Mais d'ores et déjà une autre punition les attend : ils seront des « cocus posthumes » qui contempleront de leurs tombes les ébats de leurs veuves infidèles.
Ainsi l'auteur – lauréat du Grand Prix Littéraire de l'Afrique noire voici quelques années pour son premier roman, Cannibales – rejoint-il la cohorte des écrivains africains qui dénoncent les dérives en tout genre du pouvoir sur le continent noir. Mais Bolya prévient le lecteur que son ouvrage est de pure fiction. Pour récuser à l'avance les supputations de ceux qui seraient tentés de mettre des noms sur quelques-uns des personnages de son roman.
Claude Wauthier
http://ww1.rfi.fr
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La profanation des vagins est un cri d'alarme de l'écrivain congolais feu Désiré Bolya Baéga.
Les violences sexuelles, écrit-il, sont devenues un invariant universel de toutes les guerres contemporaines. Le sexe est désormais une arme de destruction massive ; le vagin devient un enjeu militaire stratégique (au regard de l'actualité au Niger, on peut penser qu'il a toujours tristement raison) ; le SIDA fait fonction d'arme biologique du pauvre.
Bolya construit son essai à partir d'un tableau de Gustave Courbet afin de mettre en perspective une catastrophe : la destruction de "l'origine du monde", l'endroit d'où vient toute l'humanité, et ses conséquences traumatiques. Peu à peu, l'intention de l'auteur se précise. L'état des lieux terrible passe par Nankin, la Serbie, le Rwanda, la Tchétchénie, la Birmanie et la prison irakienne d'Abou Ghraib pour former un tout dont l'intérêt et la cohérence grandissent au fil des pages.
Persuadé que "Le règne de la terreur va toujours de pair avec le règne de l'impunité", l'auteur rappelle qu'un être humain est partout un être humain et demande l'application sans exemption juridique des lois internationales en matière de crimes contre l'humanité, unique solution pour enrayer le fléau.
En annexe à cet essai réussi et homogène, la reproduction de minutes du Tribunal Pénal International pour le Rwanda précise sa définition du viol et s'intéresse plus particulièrement au cas de Jean-Paul Akayesu, un génocidaire ordinaire.
Un livre intéressant et bien écrit, sur un sujet difficile, à rapprocher de la Tentation de l'Innocence de Pascal Bruckner ou des livres de Michaël Prazan. On a connu des références moins flatteuses.
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