On imagine mal, en France, la richesse extraordinaire de cette avant-garde hongroise qui s'épanouit à l'époque de la Commune de Béla Kun. Toute une génération de poètes, de peintres, d'écrivains - la plupart ayant une trentaine d'années - vont essayer de développer un art révolutionnaire autour de Lajos Kassak. (...) Mécontents de l'orientation de Nyugat, la revue qui avait été le symbole du renouveau hongrois, ils veulent dépasser le symbolisme et l'impressionnisme en créant des revues activistes comme A Tett (L'Action, 1915-1916), puis Ma (Aujourd'hui, 1916-1926). Ils se veulent révolutionnaires dans l'art comme dans la politique. (préface de Jean-Michel Palmier)
La fuite devant la réalité qui fut dès le début la tendance dominante du cinéma bourgeois, a pris de cette façon une nouvelle direction. Autrefois, on s'évadait dans les contes romantiques des aventures exotiques. A présent, conformément au nouveau style naturaliste, l'évasion se fait dans les petits détails. Par angoisse devant la vérité de la totalité, on s'est caché la tête dans le sable d'une réalité "en miettes".
La relation dialectique entre le contenu et la forme est analogue à celle qui existe entre l'eau d'un fleuve et son lit. L'eau est le contenu et le lit la forme.
Sans doute à un moment donné, l'eau s'est-elle creusée un lit, dont le contenu a créé la forme. Cependant, depuis que le lit du fleuve existe, il rassemble les eaux des environs et leur donne forme. Donc la forme façonne le contenu.
De grandes inondations sont nécessaires pour que les fleuves conquièrent de nouvelles formes, au delà de leur ancien lit.
Mais les tentatives d'établir des contacts entre artistes allemands et soviétiques furent difficiles. Presque tous les projets de Piscator échouèrent et Brecht, dès cette époque, émit des réserves très sévères sur le régime et fut sans doute l'un des plus pertinents et l'un des premiers critiques du stalinisme. Il estimait qu'il s'agissait non d'une dictature du prolétariat, mais d'une dictature sur le prolétariat et ne cessait de railler tous ces poèmes qui n'étaient acceptables qu'avec un hommage à Staline.
Il y a sept ans, j'avais été obligé de m'excuser en ces termes : "La théorie n'est pas grise. Elle sert de carte au voyageur de l'art en lui montrant toutes les routes et toutes les possibilités. Elle lui donne le courage d'entreprendre les voyages de Christophe Colomb."
Or Colomb n'est pas parvenu aux Indes. Lui aussi, il est resté planté en Amérique. Mais la Terre n'en est pas moins ronde ! Et quoi qu'il en soit, le cinéma est allé beaucoup plus loin qu'Hollywood.
Pourquoi cette méfiance envers la théorie ? Elle n'a même pas besoin d'être juste pour inspirer de grandes œuvres. Presque toutes les grandes découvertes de l'humanité sont issues d'une hypothèse fausse. Il est en outre facile de l'éliminer quand elle ne fonctionne plus.
Je ne veux pas dire par là que l'artiste doive absolument être "savant", et je connais bien l'opinion répandue ( trop répandue ! ) sur la valeur du " travail inconscient ". Encore s'agit-il de savoir à quel niveau de conscience un créateur travaille " inconsciemment ".
Ce que je peux vous dire d'entrée de jeu, c'est assez peu de chose. Mais une fois que vous aurez prêté l'oreille à ce sujet, vous aurez compris qu'il y avait là matière à comprendre; alors, d'autres choses suivront et vous en apprendront davantage.
Par essence, la parole quand elle n'est plus rationnelle, devient incompréhensible. Ce qui est vu, au contraire, peut être saisi comme une évidence même si c'est inconcevable. Et c'est alors que nos cheveux se dressent sur notre tête.
Mais parmi les sourds, on devient muet.