Tous tes hurlements, tous tes appels seront inutiles, murmure le vagabond. Toi aussi, tu va devenir une de mes choses, mon instrument le plus perfide, parce que le plus séduisant. Tu exécuteras tous mes ordres sans discuter. Tu seras la soeur de celui que tu connais si bien, vous irez tous deux la main dans la main porter ma vengeance aux quatre coins du monde... Mais auparavant...Auparavant tu seras à moi telle que tu es en ce moment, avec toute ta jeunesse, avec toute la conscience, car je veux t'avilir avant de te soumettre.
Une main lui apparut, difforme, aux doigts carrés, aux ongles d'une surprenante blancheur, un peu phosphorescente. Légèrement hébétée, Pristia tenait cette main entre les siennes, sans comprendre, sans poursuivre. Elle remarqua pourtant, en retournant cette main colossale qui semblait recouverte de la même peau que le visage, et qui était froide comme une plaque de marbre, que des cicatrices profondes en labouraient la paume; des cicatrices blanches elles aussi, semblables à des traînées de craie.
On dit que l'assassin revient toujours sur les lieux de son crime. Ce n'est peut être pas par simple curiosité. Un certain gout du macabre l'attire sans doute, et aussi le plaisir de revoir une fois un endroit où, ne fût-ce qu'un instant, il s'est un jour senti le plus fort.
Il y a cent cinquante ans à peu près. Cet être colossal avait été créé en vue de faire le bien. Mais il était d'une laideur repoussante, et les hommes refusèrent de lui donner leur amitié. Alors il devint un génie du mal. Frénétiquement, il s'employa à tuer ou à détruire tout ce qu'il rencontrait sur son passage. Puis il disparut, pour longtemps. On le vit réapparaître un beau jour en Irlande, où il ensanglanta tout un village sans qu'on pût l'anéantir, ou même le blesser. De là, il passa en Ecosse, puis en Europe centrale, en Allemagne. Partout, il apporte la mort et le sang avec lui. Aujourd'hui il est parmi nous
À bout de souffle, Luntzen, dont les lèvres se couvraient d'une sorte d'écume blanchâtre, parvint enfin à quelques pas de son ennemi, qui l'attendait, dans une impassibilité totale. Il leva ses pistolets, tira.
On dit que l'assassin revient toujours sur les lieux de son crime. Ce n'est peut être pas par simple curiosité. Un certain gout du macabre l'attire sans doute, et aussi le plaisir de revoir une fois un endroit où, ne fût-ce qu'un instant, il s'est un jour senti le plus fort.
Puis il s'était ressaisi. La rencontre extraordinaire qu'il venait de faire lui communiquait un espoir immense autant qu'insensé.
Il avait enfin trouvé le moyen de surpasser l'homme.