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Citation de TerrainsVagues


Je ne vous raconte rien de ces jours d’hôpital, rien de cette longue convalescence. Je ne vous raconte rien de cette nouvelle vie qui n’aura de sens que le jour où je vous apercevrai. C’est un long travail que de renaître, d’échapper peu à peu à la cécité et à la surdité, de poser un autre regard qui me permettra de vous reconnaitre. Il y a tout ce temps où je me remets en ordre, où je recentre ce qui m’a semblé s’être dispersé. De nouvelles pages s’écrivent. Le destin avait d’autres projets, il s’est amusé à me berner avec les apparences et, maintenant parfaitement insaisissable, il demande l’acceptation sans résignation.
(…)
Je sais que vos mains, fines, élégantes, déliées, sont une harmonie, une musique. Elles dessinent dans l’espace l’orbe insaisissable, c’est une chorégraphie du geste. Elles se posent avec la délicatesse d’un souffle sur vos genoux, s’envolent avec grâce pour saisir ma lettre, l’ouvrir et la tenir comme la plus précieuse découverte de notre vie. Cette main qui repousse une mèche de cheveux, reste suspendue pendant que vous lisez, attentive, les mots sacrés d’un parfait inconnu. Votre regard dit que vous le reconnaissez, ce voyageur infatigable qui a fini par s’arrêter dans votre jardin. Ce léger pli n’est pas encore un sourire, mais un étonnement, et ce sont vos mains qui trahissent votre plaisir. Elles jouent l’une et l’autre une mélodie très romanesque que vous seule entendez. Elles sont une projection fébrile de votre cœur. Celle qui tient la feuille ne cesse de caresser de l’index les mots pressés qui vous sont adressés. L’autre finit par se poser comme un oiseau sur votre ventre pour bien mesurer que vous êtes consentante. Et si je plaidais pour affirmer que tenir une main est plus chaleureux, plus bouleversant, que de feuilleter un ouvrage sur l’irrémédiable solitude de l’homme? J’ai une mâchoire accrochée au ventre, une douleur puissante, froide. Je suis seul devant le gâchis et l’orgueil responsable, la vie arrêtée nette au bord de l’abîme, la chair au-dedans déchirée. Mais le cœur cogne. Il me semble, mon amour, que la vie se révolte.
Je commence juste à apprendre, laissez moi un peu de temps.
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