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Citation de TerrainsVagues


Me pardonneras tu un jour cette passion? Je n’ai pas préféré cet homme à mon fils, j’étais amoureuse, Léo, profondément, désespérément, et je le suis encore aujourd’hui. Ton père m’a épousée parce que j’étais enceinte de toi et que, dans son monde, on assume ses responsabilités, ce que je n’ai pas eu la force de faire plus tard, quand cet homme est entré dans ma vie. J’ai accueilli l’amour. Léo, je ne t’ai pas laissé, ton père t’a repris et sa famille t’a élevé dans le désamour de la mère. Cet homme que tu as détesté a tout tenté pour que tu puisses nous aimer. Pardonne à mon amour. Il s’est brisé si vite. Lui était déjà malade quand nous nous sommes rencontrés, mais on n’abandonne pas ce qui vous est donné de plus précieux au monde, et qui , je le sais aujourd’hui, est si rare. On n’abandonne pas un homme qui vous apporte le bonheur, aussi bref s’annonce-t-il, pour revenir vers celui et ceux qui ne vous supportent que parce que vous êtes la femme officielle et la mère biologique. La vie est ailleurs, Léo, et j’aurais tellement aimé qu’il y ait près de toi celle que tu n’as jamais rencontrée et qui t’a laissé si dur, imperméable, intolérant avec le bonheur des autres. J’ai peur que tu ne saches pas, comme ton père, ce que c’est que des bras ouverts dans lesquels on se réfugie, ce désir d’être à l’autre, ces instants à vivre sur l’instant sans penser à le seconde qui va suivre. Etre enfin regardé. Etre soi, tout entier vers l’aimé. Etre, tout simplement. J’ai eu la joie des heures saintes avec lui, jusqu’à l’insupportable parfois. Cet amour m’a appris bien autre chose et j’étais si loin de toutes les lois du paraître, des faux-semblants, j’étais heureuse avec lui. J’ai voyagé, j’ai vu le monde des autres et j’ai aimé. Ce furent de si courtes années. Quand il est parti, j’ai refusé les obsèques de l’amour.
Tu ne veux pas lire mes lettres, elles me reviennent comme si tu n’existais plus. Pour moi tu es là, toujours. Bien avant que je le rencontre, tu avais clos en toi, depuis l’enfance, cet amour qui est le sens même de la vie. Tu avais banni tout chagrin. Je n’ai souvenir d’aucun sanglot. Tu n’auras jamais su ce qu’est le désarmement devant le bouleversement amoureux, le don de soi, l’acceptation délicieuse d’être lié à l’autre, l’abandon soudain. Tu n’auras jamais aimé ou avoué aimer, ce qui est probablement pire. Le véritable amour est libre, c’est aujourd’hui, sans lui, que je suis prisonnière, mais ta souffrance est plus grande que la mienne. Je ne fais que recopier mes lettres, elles contiennent toutes le même amour pour toi, et pour lui, que j’aimerai au-delà de la mort quoi que tu en penses et combien tu puisses en souffrir. J’aurais aimé que tu sois son fils. Je voulais un enfant de lui, divorcer, me remarier, mais c’était trop tard, alors on s’est accrochés à ce trésor fragile qui nous était offert. Peut être liras tu tout cela quand je serai partie. Je continue à t’embrasser chaque jour comme je le faisais quand tu étais petit et que tu t’échappais de mes bras et de mes caresses. Peut être que je n’ai pas su. Je n’ai rien fait d’autre qu’aimer, Léo, que de t’aimer depuis le premier jour même si la présence de ton père n’était qu’indifférence. Je ne lui en veut pas, il n’a jamais su reconnaître l’amour et il est parti sans jamais savoir ce qu’aimer voulait dire. Je l’ai plaint sincèrement. Puisses-tu connaître un jour l’embrasement qui mène à la paix. J’ai eu cette chance inouïe, Léo, mais il faut ouvrir le cœur, déverrouiller l’armure. On ne nous apprend pas, mais toi, je t’en supplie, apprends au moins à pleurer.
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