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EAN : 9782757807323
256 pages
Points (15/05/2008)
3.31/5   167 notes
Résumé :
Il y a eu Amélie, le premier amour, le premier corps, le premier continent.
Le souvenir dérive et s'embourbe, le goût de l'inconnu demeure : les visages croisés de port en port, entre Afrique et Chili, couleurs, parfums des corps frôlés. Quand il rentre à Paris, le marin amoureux des femmes repart aussitôt, assoiffé d'aventures, vers le monde tel qu'il le rêve.

"Mon amour est ce vent insoumis, cette profondeur marine, une algue au plus fort du ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (34) Voir plus Ajouter une critique
3,31

sur 167 notes
Bernard,

J'ai tenu comme j'ai pu depuis un peu plus d'un an et demi mais j'ai craqué. Tu sais à quel point j'ai repoussé le moment de t'écrire à nouveau, juste pour savoir que j'avais un dernier rendez-vous, un jour, avec ta plume. Comme pour me rassurer, comme pour avoir un peu d'air en réserve, en cas d'urgence. Chaque livre terminé, depuis la lecture du fabuleux « Cher Amour », a été une invitation à ouvrir « Les Dames de Nage », invitation de plus en plus difficile à refuser. Après quelques lectures estivales plus ou moins difficiles car sans grand intérêt pour moi, j'ai eu besoin. Un besoin errant dans les faubourgs du vital. Besoin de ressenti, besoin de mots qui vivent l'émotion. Forcément je me suis tourné vers toi, c'était le moment.
En tournant la dernière page j'ai eu un sentiment étrange, un bref instant, le regard fixé sur l'horizon que les vagues faisaient trembler. Un sentiment oscillant entre tristesse et bien être. L'océan a vite effacé le blues d'en avoir terminé avec tes mots en me rappelant que je resterai imprégné de ceux là comme de ceux de « Cher amour ». Tiens, moi qui n'ai rien mis sur babel, ils vont être mon île déserte parce que, je sais que je me répète, rares sont les écritures qui me touchent comme la tienne. C'est bizarre d'être si différent de toi et de me sentir si proche coté « sensibilité ».
Je suis un peu comme ton ami Roland du « Marin à l'Ancre », je profite de tes voyages, je les vis sans bouger en me disant que j'aurais eu tes mots si j'avais été à ta place, que je j'aurais vécu l'émotion de la même façon, que j'aurais témoigné de la poésie d'une rencontre, d'un instant, d'un lieu, j'aurais caressé de ma plume les doutes, les espoirs, la joie, la douleur, la peur, enfin j'aurais aimé faire ça à ta manière.
Encore une fois je me suis rempli de cette poésie qui transpire de chacun de tes mots déposés sur la page. Une poésie crue qui fera fuir quelques grenouilles de bénitier, alternant avec une poésie d'une douceur extrême où l'instant semble se figer, où l'espace d'une seconde les coeurs s'effleurent tout en retenue. Les peaux se frôlent, se donnent, se fuient. Quant aux âmes elles ne peuvent que se perdre dans la violence des sentiments. Fuir le bonheur avant qu'il ne se sauve, comme le faisait magnifiquement dire Gainsbourg à sa Jeanne, ou courir après lui à travers le monde comme on court après des chimères, quelle différence au final ?
A travers tes voyages, tes rencontres, tu as filmé la vie, tu as couché tes émotions sur la pellicule. le support était trop étroit, trop impersonnel peut être, alors tu les as ancrées à tout jamais dans les plis du papier, ceux qui laissent la possibilité au lecteur de ressentir selon ce qu'ils sont. L'image impose alors que le livre propose. Quoi qu'il en soit Bernard, les portraits tracés dans ces dames de nage sont juste terriblement touchants dans des genres différents. Des femmes, des amis, des lieux, des rencontres. Je ne peux m'empêcher d'en ressortir deux.
Marguerite, tu sais qu'elle m'a nouée la gorge la mamie. Derrière les murs… ou les fenêtres. Tu as été un rayon de soleil pour elle. Tu as su… après
Et puis forcément Marco… Marcia… juste désarmant. Là je t'avoue que ce n'est pas que la gorge qui était nouée. J'ai vu le sillon laissé sur sa joue, sur son coeur, par une perle de rosée de l'âme. Une perle tombée lourdement d'un cil. Un sillon creusé depuis l'enfance, depuis la marine jusqu'au coup fatal porté par une mère qui… bref. L'espoir fusillé au petit matin, à l'aube d'une nouvelle vie. Il y a des rosées plus vivifiantes…
Il me semble bien que l'espace de quelques pages j'ai du résister pour ne pas suivre le sillage d'une de ces perles. Je ne sais plus si j'ai réussi…
Bernard, dans ces portraits que tu traces, il y a de la sanguine, du fusain, du noir et blanc, du vrai, du beau jusque dans l'intolérable (Juan), jusque dans la détresse. de l'humain tout simplement, ce qui malheureusement tendrait à se perdre proportionnellement à la misère du monde qui augmente, mais c'est un autre sujet…
Et puis bien sur tes « t'aime » favoris que sont les femmes et les amis, Amélie, Jo Camille, Ysé, Michel, Diego. Que dire si ce n'est que j'aime leurs authenticités, leurs failles, leurs forces, vos moments partagés. Des gens pas ordinaires dans tous les cas. C'est peut être pour ça que tu ne plais pas à tout le monde, juste parce que comme disait l'autre, les braves gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu'eux. de toutes façons, les braves gens on les « emmerde ».

J'aurais trop de choses à te dire ou plutôt à t'écrire, c'est tellement plus facile, mais ça va faire long. J'essaierai de ruser pour te faire parvenir un nouveau courrier ici parce que c'est la seule adresse que je connaisse pour te trouver. Celle que m'ont donné les vrp du bien et du mal, de la morale et de la peur, je n'ai pas l'impression que je t'y trouverai, question de ressenti, rien de plus, comme pour un bouquin.
Merci pour ces lectures et à bientôt ici… parce qu'ailleurs ou pas, il n'y a aucune urgence de mon coté.
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Je me suis précipité trop impatiente de m'imprégner de sa poésie.
Quel est cette âme errante qui a posé ses mots sur ces feuillets de papier que je parcoure avec frénésie ?
Je veux me remplir de ce sublime sentiment d'éternité avec ce magicien des mots,
Qui m'ensorcelle,
M'hypnotise,
Me défait du superflu et me dévoile l'essence de la vie…

Pourquoi avoir attendu tant de temps pour découvrir ce trésor de sensibilité brut qui m'emporte dans cet univers où les mots scintillent tels des éclats de lumière d'un diamant si finement ciselé ?
Bernard Giraudeau un orfèvre des mots qui tisse sa toile d'émotions autour de mon coeur avec son livre : « Les dames de nage ».
Des mosaïques de sensations qui n'en finissent pas de colorer ma vie de 10001 nuances d'un bonheur délicat.
Juste des sensations épars, sublimes, surnaturelles, passionnées, invraisemblables, impalpables.
Je suis incapable de raconter l'histoire de ce livre car ce livre ne se lit pas, il se vit…
Et j'ai vécu intensément…
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Mission de décembre 2019, reportée à  2020 pour cause de pandémie : lire un Giraudeau.
Recommandation spécifique: lire de préférence Les Dames de nage ou Cher Amour.

Mandateur: Pascal alias T.V.,  Grand Maître de la Loge Giraudalcienne.
Lobby : Mosaïque,  Aléatoire, Krout, Bison, Sirenna, frères bernardiens assermentés.

Esprit frondeur: Lolokilipasgiraudeausanreserve.
Esprit recalcitrant: Anne, ma soeur Rabanne qui ne veut pas en lire 

Mandataire: votre servante,  michfred. 
Mission accomplie en juillet 2020.


J'ai donc mis les voiles et emmanché mes rames de galérienne volontaire dans ces Dames de nage-là.

Ho hisse, souquons ferme, et cap vers la haute mer!

Début de voyage houleux, lyrisme à contretemps et route marine brouillée: j'ai dû jeter l'ancre. Attendre que ça se calme. Recalfater ma coque. Repartir.

Passer au large de quelques ilots de narcissisme irritants  -ah les yeux bleus, le matelot à la  belle gueule, le beau gars que guignent toutes les filles et qui tombe les plus troublantes, les plus chaudes, les plus fiévreuses, de la vierge à la pute, du trave' aux yeux de biche  à la diva décatie ...- .
 
Saisir le filin, tenir le cap : chercher Amélie -âme lie,  âme lit, à mes lits, ah m'élit... Bref chercher  la Dame de coeur de ces Dames de nage.

Mais le voyage était un drôle de périple, au gré du souvenir, aux vents du désir, ballotté d'un continent l'autre, au confluent des rencontres, hanté de visages amicaux, bercé de milles récits comme autant de petits îlots en atoll.

Il a fallu accepter de dériver, ne plus faire le point que sur des étoiles fantômes, perdre sa route comme le Manureva.

Et faire escale.

Connaître le doux visage couronné de cheveux blancs de Marguerite à la la croisée de sa fenêtre.  Les affres de Marco-Marcia qui voulut être fille et revoir sa Mamma. La haute silhouette de  Diego, le chef de gare qui fuyait la sienne, de mère, et Ana qui ne voulait plus reprendre son train. L'homme aux mains de pierre et la belle Ysé, amants éternellement contraires.

Rencontrer les amis:  Camille la monteuse de films , discrète et efficace,  grignotée , avant Bernard lui-même,   par l'affreux Crabe,  Jo l'"impératrice" peule, Diego le guitariste chilien et l'ami Michel, le "frère " trop tôt disparu.

 Et Amélie, bien sûr: Amélie perdue depuis l'enfance, Amélie retrouvée dans le kaléidoscope des miroirs d'un café , Amélie perdue encore.

Peut-être pour que Marc-Bernard la cherche indéfiniment.

Accepter de perdre pied, de flotter entre deux eaux, de se laisser capter, envoûter, séduire par ce marin aux yeux bleus un peu trop sûr de son charme mais dont on sent toute la déferlante nostalgie, la gourmandise sensuelle, la soif de vie, alors que déjà la Faucheuse, chevauchant les vagues, suivait à la trace son esquif.

PS. Merci à Faby-la-rochelaise qui m'a mis la rame en mains en me prêtant in situ son précieux livre.


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Je peux te poser une question : quel acteur français aurais-tu souhaité être ?
Bernard Giraudeau, il est beau, il est classe.
N'est-il pas aussi cinéaste, voyageur, marin, homme de théâtre, écrivain?
Si, si, il est multicolore dans l'esprit, bleu dans les yeux et à l'âme.
N'a t-il pas été le compagnon d'Annie Duperey, actrice, femme de théâtre, écrivaine ?
Si, si, j'ai eu un énorme coup de coeur adolescent en allant la voir au théâtre de la Ville dans « La guerre de Troie n'aura pas lieu » de Giraudoux, très très belle dame en chasuble transparente. J'étais en âge de mes premiers émois.

Et toi qui va lire ce livre, « and that's an order », tu ne seras pas en reste d'émotions.
C'est du gâteau découpé en tranches de vies parfois cocasses, souvent douloureuses, toujours émouvantes narrées par un chaud latin. C'est le paradis, lapin !
En fait non, c'est l'enfer, la recherche de soi-même au travers de vies perdues au fond de ports glauques dans les yeux rougis de presque-femmes à la barbe mauve naissante au petit matin.

« J'allais dans ma lanterne magique faire défiler en accéléré toutes ces vies amassées comme un trésor et parmi lesquelles je cherchais vainement la mienne. »

Note bien que la sensualité l'emporte sur la pauvreté, que le besoin du voyage, voyage plus loin que la nuit et le jour, dans l'espoir inouï de l'amour l'emporte sur la souffrance.
Le désir laisse place à la quête. La quête de soi, toujours.

« J'avais voyagé trop vite, dévoré le monde avec voracité, avec la peur de n'avoir jamais le temps. le temps de quoi ? »

Il l'a pourtant pris le temps de se poser cet homme impétueux et respectueux de l'amour, des femmes, de la vie, car il l'a magnifiquement écrit cette soif de découvertes, de charmes d'ailleurs au travers de belles rencontres qui donnent la chair de poule et la flamme au ventre.

Bernard, tu as croqué le fruit de la passion dans tous les continents, de toutes les façons.
C'est toi qui as eu raison.
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La Rochelle, ses deux tours et le regard fixé à l'Ouest. Les vagues qui déferlent et à l'autre bout, le Chili, la Patagonie. Mes yeux suivent le courant un peu plus au Sud, cap sur l'Afrique. Les embruns parfument ma mémoire, cris sauvages de beuveries rue de la Soif, cris perçants de mouettes attirées par le retour de pêche. Je pense à ces marins qui ont toujours envie de mettre le cap à l'ouest, je pense à cette Afrique, rieuse et chaleureuse, ces amants d'un soir, d'une nuit dans un port inconnu, cette belle femme noire. J'imagine ces hauts plateaux d'Atacama où le soleil et le sel te brûlent la peau, là-bas au bout du monde, pays de Coloane et de Sepulveda. Je voudrais rencontrer Bernard Giraudeau pour qu'il me conte sa vie, sa jeunesse, son parcours si atypique dans la vie d'un cinéaste. Alors, je le lis. Pour la première fois.

« Les Dames de Nage » démarre à La Rochelle, adolescence d'un jeune cinéaste, une première rencontre avec Amélie. Âme qui me lit. Âme dans mon lit. La première femme compte toujours.

Elle deviendra son souvenir, ce premier amour qui change le monde. de premiers émois, jeune, trop jeune, des rencontres fortuites après, mais toujours ce sentiment de communion entre deux êtres. Puis il y a eu Jo, cet amour inaccessible, cet amitié indicible, son univers harmonieux qui réunit des êtres larguées par une société pas à leur portée. Bernard a besoin de voyager. Paris, c'est bien, c'est beau, les filles sont belles. Mais l'ouest, c'est mieux. La mer, aussi, les vagues, les embruns, d'autres filles, d'autres amours. Je dis Bernard, mais cela pourrait être aussi Marc – Austère comme l'écrivain mais avec un e accent grave-re – le narrateur de cette histoire, de ces déambulations maritimes. Car, je n'émets aucun doute sur le fait qu'il y a de grands moments autobiographiques dans cette passion, dans ces rencontres, dans ces histoires d'amitié.

Un roman donc pour les amoureux de la Mer, les marins même ceux qui restent à Terre, les souvenirs de l'Afrique, les découvertes chiliennes et surtout pour les grands moments d'amitié que l'on y retrouve. Et je me reconnais dans ce portrait, sans oublier les amoureux de Nicole Kidman, la découverte du port de Wellington. Les pages déferlaient dans ma mémoire au gré du vent et de ses rafales, comme une onde sensuelle venue raviver mes premiers émois, venue entretenir la flamme des grands voyageurs littéraires.

Quelle belle rencontre maritime ! Désir Sensuel, onde marine.

« Les Dames de Nage », cap à l'ouest, le regard porté sur les vagues, les mains sur les femmes.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Citations et extraits (130) Voir plus Ajouter une citation
Me pardonneras tu un jour cette passion? Je n’ai pas préféré cet homme à mon fils, j’étais amoureuse, Léo, profondément, désespérément, et je le suis encore aujourd’hui. Ton père m’a épousée parce que j’étais enceinte de toi et que, dans son monde, on assume ses responsabilités, ce que je n’ai pas eu la force de faire plus tard, quand cet homme est entré dans ma vie. J’ai accueilli l’amour. Léo, je ne t’ai pas laissé, ton père t’a repris et sa famille t’a élevé dans le désamour de la mère. Cet homme que tu as détesté a tout tenté pour que tu puisses nous aimer. Pardonne à mon amour. Il s’est brisé si vite. Lui était déjà malade quand nous nous sommes rencontrés, mais on n’abandonne pas ce qui vous est donné de plus précieux au monde, et qui , je le sais aujourd’hui, est si rare. On n’abandonne pas un homme qui vous apporte le bonheur, aussi bref s’annonce-t-il, pour revenir vers celui et ceux qui ne vous supportent que parce que vous êtes la femme officielle et la mère biologique. La vie est ailleurs, Léo, et j’aurais tellement aimé qu’il y ait près de toi celle que tu n’as jamais rencontrée et qui t’a laissé si dur, imperméable, intolérant avec le bonheur des autres. J’ai peur que tu ne saches pas, comme ton père, ce que c’est que des bras ouverts dans lesquels on se réfugie, ce désir d’être à l’autre, ces instants à vivre sur l’instant sans penser à le seconde qui va suivre. Etre enfin regardé. Etre soi, tout entier vers l’aimé. Etre, tout simplement. J’ai eu la joie des heures saintes avec lui, jusqu’à l’insupportable parfois. Cet amour m’a appris bien autre chose et j’étais si loin de toutes les lois du paraître, des faux-semblants, j’étais heureuse avec lui. J’ai voyagé, j’ai vu le monde des autres et j’ai aimé. Ce furent de si courtes années. Quand il est parti, j’ai refusé les obsèques de l’amour.
Tu ne veux pas lire mes lettres, elles me reviennent comme si tu n’existais plus. Pour moi tu es là, toujours. Bien avant que je le rencontre, tu avais clos en toi, depuis l’enfance, cet amour qui est le sens même de la vie. Tu avais banni tout chagrin. Je n’ai souvenir d’aucun sanglot. Tu n’auras jamais su ce qu’est le désarmement devant le bouleversement amoureux, le don de soi, l’acceptation délicieuse d’être lié à l’autre, l’abandon soudain. Tu n’auras jamais aimé ou avoué aimer, ce qui est probablement pire. Le véritable amour est libre, c’est aujourd’hui, sans lui, que je suis prisonnière, mais ta souffrance est plus grande que la mienne. Je ne fais que recopier mes lettres, elles contiennent toutes le même amour pour toi, et pour lui, que j’aimerai au-delà de la mort quoi que tu en penses et combien tu puisses en souffrir. J’aurais aimé que tu sois son fils. Je voulais un enfant de lui, divorcer, me remarier, mais c’était trop tard, alors on s’est accrochés à ce trésor fragile qui nous était offert. Peut être liras tu tout cela quand je serai partie. Je continue à t’embrasser chaque jour comme je le faisais quand tu étais petit et que tu t’échappais de mes bras et de mes caresses. Peut être que je n’ai pas su. Je n’ai rien fait d’autre qu’aimer, Léo, que de t’aimer depuis le premier jour même si la présence de ton père n’était qu’indifférence. Je ne lui en veut pas, il n’a jamais su reconnaître l’amour et il est parti sans jamais savoir ce qu’aimer voulait dire. Je l’ai plaint sincèrement. Puisses-tu connaître un jour l’embrasement qui mène à la paix. J’ai eu cette chance inouïe, Léo, mais il faut ouvrir le cœur, déverrouiller l’armure. On ne nous apprend pas, mais toi, je t’en supplie, apprends au moins à pleurer.
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Je peux voir la canopée comme des vagues immobiles auxquelles seul le vent de la montagne donne une vie de mer sombre. Il traîne des brumes alanguies que le soleil levant finit toujours par enflammer. Au-delà il y a un grand fleuve et bien au-delà la mer, la vraie, l'infinie, qui se dessine parfois comme un trait de lumière pour souligner l'indéfini du ciel.
J'aime cet endroit comme une escale de paix. Je suis un égaré ayant décidé de se poser, de rester là dans chaque instant des souffles. J'écoute l'oiseau, un chant sur la page de silence. A la fin du jour il y a celui des voix de la vallée, isolées comme des notes échappées.
J'apprends l'attente, celle de l'instant, celle de la pluie, des jours à venir, de la nuit, de la première étoile, celle du feu pour les repas et pour réchauffer les soirs.
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Qui m'a appris l'obéissance en vieillissant pour satisfaire le regard des autres ?
Je VEUX être désobéissant et braver la raison.

N'essuyez pas mon front où perle la sueur et laissez mes vêtements coller à la peau dans la nuit tropicale.
N'éteignez pas les feux de racines séchées, j'aime la fumée acre.
Laissez-moi déchirer mes semelles sur la lave noire des volcans, peiner avec bonheur dans les poussières de lune d'Atacama et les éclats de mica des terres brûlées….
Je retournerai pour une caresse amoureuse poser ma main sur le rocher jusqu'à l'aspérité salvatrice pour me hisser au sommet et regarder le monde.

Je n'ai pas changé,
je suis passé de l'univers de l'enfance à celui des hommes
avec les mêmes règles, la même curiosité.
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J'ai filmé les matins bleus de la frontière bolivienne, là haut à quatre mille mètres, des matins absolument purs, sans faille, sans une trace, pas même un voile de céruse oublié par le peintre. J'imaginais Che Guevara, sa moto à l'arrêt, assis sur le cuir à se frotter les mains dans la froidure en regardant ce que je voyais. C'est ce ciel qui a dû fasciner Pedro de Valdivia, en 1540, pour se brûler les yeux au passage des neiges, dans la tourmente du soroche. Quelle fièvre nourrissait sa folie et quelle conquête allait-il faire dans le désert d'Atacama avec une poignée d'hommes et de chevaux épuisés, une écume de sel sur l'encolure? Tout brûle ici, l'eau des rivières bouillonne et il n'y a, dans la nuit australe, que ce grand filet d'étoiles dans lequel le conquistador s'est laissé prendre. J'aurais bien aimé voir le Che sur sa pétoire rencontrant Valdivia sur sa carne. Qu'est ce que tu vas chercher, Pedro? Et toi amigo? Fin du dialogue, et ils seraient repartis, l'un vers le sud avec l'épée sur la croix et l'autre vers le nord avec son carnet de bord et ses rêves. Moi aussi, je voulais soulever la poussière du désert, comme ça, pour voir, et ça m'a plu. C'est en ces moments de grâce que me revenait ce désir d'enfance d'écrire au monde.
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L'œil travaille au défrichage des visages, à la découverte des horizons sableux, des cérémonies occultes, alors l'Afrique se réveille et danse avec la poussière. Elle n'est pas seulement un bavardage matinal, une présence soudaine, c'est un cri, un témoignage des origines.
Le rire cache la violence, la vie séduit la mort.
Le désert oblige à l'essentiel, le regard se perd, il n'y a plus aucune frontière à l'imaginaire.
Que l'on ne me dise pas que devant ce spectacle ceux du désert, les ascètes, les ermites hallucinés, les prophètes, n'ont pas été ébranlés par le mirage féminin, par l'ombre brune entre deux dunes, les fesses de sable à l'infini, les seins de silice sous la voûte céleste, et que leurs rêves n'étaient que lumière divine.
Dis-moi qu'ils furent eux aussi frappés par la jouissance
et qu'au matin, mêlé à la rosée, leur sperme en témoignait.
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Vidéo de Bernard Giraudeau
HOMMAGE BERNARD GIRAUDEAU FRANCE3 BLOGPARFAIT 17.07.2010
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