coup de grisou
sur la mémoire de la terre
les centrales nucléaires
la météo
les finances
la politique
les corps
déréglés
ensevelis sous la poussière
avant que trop de blancheur
n'endorme le souvenir
en prolonger l'image
éclaboussée de lait
il a neigé ce matin
les pas s'enfoncent
dans le vide
on rêvait
d’un avenir idéal
mais
les corolles arrachées ne
se recollent pas
pas plus que
la conscience
dissoute
(extraits)
en rang dans
la salle de garde
des soldats de plomb
mènent
une guerre silencieuse contre
ce qui ne se nomme pas
nous laissent en partage
des mémoires dépenaillées
chiffons bradés
au marché
de l’inconstance
*
le voile de la mariée
tombé
en poussière nos
objectifs perdus
les fourmis ont déserté la terre
l’écorce du néant est
blessée
*
quelque chose de vague
nous ramène à hier
à peine une lueur quand
on parlait sous la braise quand
on se tenait chaud quand
parfois
on engrangeait
des tristesses d’enfant allant
à sa perte
QUAND TU AS DÉCIDÉ D’EN FINIR…
Quand tu as décidé d’en finir
que ça s’est décidé en toi
notre centre de gravité
a perdu son axe
avec toutefois
l’incertitude
de la note juste
jusqu’au souffle final
il y avait ce matin-là
un flou dans l’air
qu’on percevait
par la fenêtre
le jour promettait
d’être compliqué
dehors dans les cafés
dans les rues
les gens se comportaient
comme des loups
sans éducation
une ville immaîtrisable
un afflux de coïncidences
une loi tacite du signe
épuisait les plus sensibles
les renvoyait à
d’obscurs savoirs ancestraux
plus tard on dirait : c’était la pleine lune ce n’est pas étonnant.
AU PLUS GRIS DU CORPS
à l’intérieur de soi
gît la menace de
l’arbre
ses racines qui
creusent
sa terre
comme une langue
creuse
la gorge
… sa parole de
feuille à peine éclose
déjà éteinte
jour et nuit
maintient
la terreur
souterrain
en devenir de
sous-langue
au-dessus
l’espace froissé
de rides jaunes
la tentation de déterrer
ce qui se pense
au plus gris du corps
j’ai rêvé
j’ai rêvé cette nuit
d’un monde aussi doux que laine
d’hommes-oiseaux volant à travers ciel
ignorants du bruit des armes
des frontière d’où l’on meurt
de la folie des Basse-Terre
de l’arrogance des grands
de la terreur des petits
j’ai rêvé d’horizons lumineux
loin très loin des mers ensanglantées
des enfants abandonnés à leur sort
convertis en soldats de la mort
des villes dévastées
de l’histoire bafouée
j’ai rêvé de paix et de beauté
loin très loin de cette débauche de corps torturés
d’esprits anéantis
Extrait
tant d’eau et si peu de mirages…
sur les espaces désertés
d’intimes séismes hissent
à la surface
l’indifféré de la matière
ce soir on désosse le réel
le ciel a des accents
de cire cachetée
l’eau est sale dans le verre
des lèvres inconnues
s’acharnent en ce lieu
où repose l’épave de la parole
on bute sur l’absence
le désir est plus limpide
que le sommeil qui coule
vers son terme
la confusion des strates abrège l’au-delà
à l’instant de se noyer
de rejoindre
les fragments épars du monde…
Une frontière se tisse de non-dits…
Une frontière
se tisse de non-dits
qui ne
nous appartiennent pas
comme un sourire
qui durcit les matins
un appel quotidien
dont
la durée se mesure
en années d'enfance
ne pas répondre
jeter le minuscule téléphone
qui nous reliait au monde
mourir au dire
en marge de dires anciens
le silence se replie
on manque d'air
plus de conteurs
pour
taire le chagrin
refuser
le mur qui sépare
plus de dépanneurs…
pour un monde
virtuel
de vraies guerres
pourtant
des drames
une énorme blessure en forme de
‘trou du côté gauche’
PLEINEMENT ÉCLOSES ENFIN…
Pleinement écloses enfin
mes mains s’épuisent à détourner
l’instant de son terme accompli,
Attentives à révéler ton image floue
Demain, disent-elles,
demain nous logerons bleues
au blanc de la cassure
Le livre s’effrite
Le livre s’effrite
la parole est bradée
au marché de l’avide
l’éventualité du bonheur
bientôt
s’effondrera
…