Il s’agit pourtant simplement d'une bergerie, mais c'est comme si ses vibrations m'enveloppaient, comme si ses murs me parlaient, comme si je revenais chez moi après un long voyage. Je laisse cette impression nouvelle et si agréable de plénitude m'envahir.
- Oh mes bébés ! Ne dites pas pardon. Vous avez raison de crier, pleurer. Vous venez de perdre votre papa, c'est naturel d'être triste, d'être en colère. Mais nous devons nous faire une promesse. Tous les trois. Parlons-nous. Racontez-moi vos sentiments. Dites-moi quand ça ne va pas et quand ça va. Et surtout, ne vous sentez pas coupable d'avoir envie de rire, de vivre, de recommencer à être heureux. De là-haut, j'en suis sûre, votre père ne veut que votre bonheur.
Les Cloclo, Claude, et Chloé, Chloé et Claude. Les amoureux de l'an deux mille, les inséparables, le couple parfait. Tu es l'amour de ma vie, mon roc, mon meilleur ami, tu es ma bouillotte le soir, mon oreiller de tendresse le matin. Tu es l'amant attentionné et le père idéal. Tu es mon Clo, mon double, mon âme sœur. Tu es ma lumière. Tu étais. Tu es parti. Je n'ai pas eu le temps de te dire au revoir.
Je me répète en boucle que cela n’est pas « seulement » de ma faute, que nous étions deux à faire s’échouer notre paquebot, que c’est aussi à deux que nous pourrons le remettre à l’eau. Si Antoine le veut. Si je le veux. Et est-ce que je le veux ? Je ne sais pas. Je sais qu’il va falloir que je m’attarde sur le sujet. Mais pas tout de suite. Écoper l’eau en fond de cale avant de partir en guerre.
Nous n’avons pas besoin de nous parler. Je reste quelques instants à tenir cette main qui t’as bercée, choyée et aimée avec tant de force que tu as su me transmettre à moi « l’orpheline » cette croyance qu’être à deux c’est être UN.
Je les sers fort comme si c’était la dernière fois. Parce qu’on a appris qu’il y a toujours une dernière fois et qu’on ne sait jamais quand elle viendra.
Vient alors le cri. Celui qu'on voudrait ne jamais entendre, ne jamais exprimer. Le cri de celle qui a enfanté et qui doit renoncer à son rôle de mère. Le cri d'une femme qui a aimé un autre plus fort qu'elle ne pourrait aimer qui que ce soit et à qui elle dit au revoir malgré elle.
Le pire n'est pas de t'avoir perdu, mais de devoir vivre sans toi.