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Citation de Charybde2


Chulainn ne possédait pas qu’un seul chien de garde, mais l’un d’entre eux était son favori. C’était une grosse bête noire comme les cheveux de son maître, avec deux minuscules yeux rouge et jaune. Il passait toutes ses nuits devant les portes des forges. Ce n’était pas un méchant animal. Seulement, des années de garde, d’aboiements et de grognements l’avaient rendu agressif envers les inconnus. Les chiens sont comme les hommes – ou bien est-ce l’inverse ? – : ils sont ce qu’ils font.
Alors les voilà, les deux personnages du drame. D’un côté, le garçon qui sent monter une furie qu’il ne peut contrôler et qui cherche un adversaire, peu importe qui, peu importe quoi. De l’autre, un chien à qui l’on a appris à aboyer et à montrer les crocs, dont seuls les yeux et les crocs sont visibles dans la nuit. La tente, le festin, les rois et les druides : rien de tout cela n’existe plus. Le garçon voit le molosse. En un instant, il a pris sa décision. Voilà un adversaire suffisant pour occuper la ríastrad. Le garçon se dévêt. Dans le noir, personne ne ferait la différence. Le chien de garde se met à grogner, il tire sur sa corde. Si celle-ci tient, il n’arrivera rien mais, bien sûr, la corde va rompre. Chaque histoire a besoin de tous les événements qui la rendent possible, et même des plus hasardeux. Alors, la corde rompt au moment où les yeux de Setanta se révulsent, à l’instant précis où le garçon laisse échapper un râle terrible. Le chien bondit, se jette sur le garçon et voilà, ils se battent, ils sont liés l’un à l’autre. Ces deux corps, le chien et le garçon, n’en font plus qu’un seul. Au premier coup d’œil, il est impossible de les différencier. Le garçon se mêle au chien et le chien prend part au garçon. Setanta, ses deux bras tendus, serre le cou du chien. Le chien claque des mâchoires à quelques centimètres de son visage. Leurs haleines se mélangent et leurs sueurs aussi. C’est à celui qui cédera le premier. Un instant, la bête semble avoir le dessus. Ses griffes marquent la peau du garçon, dont les bras faiblissent. Mais l’animal ne peut pas vaincre. Sinon, pas d’histoire, pas de Chien. Alors Setanta parvient à renverser la bête et il se retrouve au-dessus, dominant le ventre noir offert. Il raffermit sa prise et serre comme le chien se débat. La ríastrad l’a entièrement balayé. C’est elle qui serre, qui écrase la gorge. De la gueule surgit une langue fébrile. Setanta serre, serre, et il vainc, et il perd connaissance. Tout cela n’a rien de bien glorieux : ce n’est qu’un gamin nu étendu, bave aux lèvres, à côté d’un chien mort. Le reste de corde qui pend encore du collier paraît les lier tous deux ensemble.
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