Prier constamment libère des hormones de plaisir, continue Brewer. C’est l’une des raisons pour lesquelles les victimes restent si longtemps dans les sectes. Ça devient une addiction. Un peu comme pour les drogués.
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Malgré l’impression d’espace que j’ai d’ici, les chemins larges et dégagés et la taille généreuse des bâtiments, je sais que tout est trompeur. Les pièces pourtant immenses étaient noires de monde et ça grouillait, notamment de nouveau-nés et de mères essorées par l’épuisement. Et par la faim aussi, les derniers temps, parce que la communauté ne subsistait que sur ce qu’il restait une fois que le Prophète et ses évêques s’étaient servis.
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Je suis sûre que même l’air est différent ici. Dans l’Utah, il est placide comme un bovin qui broute. Ici, dans le Nevada, il est plus électrique.
L’une des premières choses que j’ai faites à mon arrivée au ranch, ç’a été d’aller toucher une de ces petites touffes d’herbe. Je pensais qu’elle serait douce, comme un coussin, mais pas du tout. C’était plutôt comme des lames qui m’ont piqué la main.
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Un mot d’ailleurs sur les patates de funérailles. C’est un plat légendaire en Utah, et absolument nulle part ailleurs. Ces patates doivent être cuites dans de la soupe en boîte, puis on y ajoute de la crème, du fromage, et enfin on parsème le tout d’une sorte de chapelure de pétales de maïs. Tout ce qui croustille peut faire l’affaire. C’est une recette qui nous vient tout droit de l’époque où les hommes faisaient du travail manuel et où les femmes restaient à la maison avec leurs vingt gosses accrochés à leurs basques… et à leur Valium. Bienvenue en Utah. Retour cinquante ans en arrière.
La normalité me fait flipper. Le truc, quand on a grandi en gardant toujours un œil sur le danger, c’est que lorsqu’il disparaît il ne reste rien. Sauf une nervosité épuisante.
Les mormons de naissance comme lui détestent qu’on laisse des gens comme moi rentrer dans leur club très privé et découvrir leurs petits secrets.
Moi je leur dis la vérité aux flics. Que Rachel n’a pas de défauts. À part le sucre, bien sûr, suffit de voir son gros cul de mormone. Tous ces horribles cookies qui ont un goût de rassis alors qu’ils sortent à peine du four… Qu’Emily est à moitié cinglée, mais à sa manière. Toute timide, toujours les yeux baissés. Elle est trop jeune pour avoir déjà pris de mauvaises habitudes, j’imagine.
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Il est grand et il a des épaules larges, même si ses cheveux blonds clair se confondent avec son teint jaunâtre d’une pâleur malsaine. Son surpoids pèse sur sa carcasse comme le gras d’un beignet mal cuit, et la pellicule de sueur sur son front pourrait faire croire qu’il a couru pour venir.
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Son front hâlé se plisse, un fois de plus. Apparemment personne ne lui a expliqué que pour éviter les rides, il faut chasser les mauvaises pensées de sa tête.
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