Bien isolé apparaît alors Georges Clemenceau qui s'exclame à la Chambre des députés, le 30 juillet 1885: "N'essayons pas de revêtir la violence du nom, hypocrite, de civilisation; ne parlons pas de droit, de devoir. La conquête que vous préconisez, c'est l'abus pur et simple de la force que donne la civilisation scientifique sur les civilisations rudimentaires pour s'approprier l'homme, le torturer, en extraire toute la force qui est en lui au profit du prétendu civilisateur. Ce n'est pas le droit, c'en est la négation. Parler à ce propos de civilisation, c'est joindre, à la violence, l'hypocrisie"
Il pleut sur l'exposition coloniale
Les Pénitents Les Rois Fainéants Les Sénégalais
L'automobile du Roi du Caoutchouc
L'Exposition coloniale
L'anneau dans le nez de la religion catholique
Les hosties de la Défense nationale
Fétiches fétiches on te brûle si tu fais
la nique à des hommes couverts de sabres et dorures
et l'outrage aux magistrats dans l'exercice de leurs fonctions
L'anneau dans le nez de la troisième république
l'enfantement obligatoire
il faut des soldats à la Patrie
L'Exposition coloniale
Palmes pâles matins sur les îles Heureuses
palmes pâles paumes des femmes de couleur
palmes huiles qui calmiez les mers sur les pas d'une corvette
charmes des spoliations lointaines dans un décors édénique
De nouvelles Indes pour les insatiabilités d'Indre-et-Loire
De nouvelles Indes pour les perversités du Percepteur
et le missionnaire cultive une Sion de cannes à sucre
tandis que le nègre Diagne élevé pour la perspective
à la dignité ministérielle
administre admirablement massacrés et massacreurs
sous l'égide du coq tricolore ô Venise
Othello la nuit n'est plus noire
aujourd'hui malgré les illuminations modernes
Les bourreaux chamarrés parlent du ciel inaugural
de la grandeur de la France et des troupeaux d'éléphants
des navires des pénitentiaires des pousse-pousse
du riz où chante l'eau des travailleurs au teint d'or
des avantages réservés aux engagés volontaires
de l'infanterie de marine
du paysage idéal de la baie d'Along
de la loyauté de l'indigénat chandernagorique
Soleil soleil d'au-delà des mers tu angélises
la barbe excrémentielle des gouverneurs
Soleil de corail et d'ébène
Soleil des esclaves numérotés
Soleil de nudité soleil d'opium de flagellation
Soleil du feu d'artifice en l'honneur de la prise de la Bastille
au dessus de Cayenne un quatorze juillet
Il pleut il pleut à verse sur l'Exposition colonial
Aragon
Persécuté persécuteur,1931
Pour quelques décennies se constitue une culture coloniale mettant en exergue les cinq "M" : le Militaire, le Missionnaire, le Médecin, le Mécanicien et le Maître d' école. Ils vont former le leitmotiv de l'Exposition coloniale, figures sans cesse reprises, répétées, modulées, utilisées.
d'Ernest Renan (1871) :
L'homme du peuple est presque toujours chez nous un noble déclassé ; sa lourde main est bien mieux faite pour manier l'épée que l'outil servile. Versez cette dévorante activité sur des pays qui, comme la Chine, appellent la conquête étrangère ... chacun sera dans son rôle. La nature a fait une race d'ouvriers : c'est la race chinoise, d'une dextérité de main merveilleuse sans presque aucun sentiment d'honneur...gouvernez-la avec justice...elle sera satisfaite;- une race de travailleurs de la terre, c'est le nègre, soyez bon pour lui et humain, et tout sera dans l'ordre; une race de maîtres et de soldats, c'est la race européenne..
Paul Gauguin est également présent comme artiste et voyageur tenté par l’univers d’outre-mer. On met en exergue ce qu’il écrivait en février 1890 avant son départ pour l’Océanie: « puisse venir le jour où j’irais m’enfuir dans les bois de l’île de l’Océanie, vivre là d’extase, de clams, et d’art. Entouré d’une nouvelle famille, loin de cette lutte européenne après l’argent. Là, à Tahiti, je pourrai, au silence des belles nuits tropicales, écouter la douce musique murmurante des mouvements de mon cœur, en harmonie amoureuse avec les êtres mystérieux de mon entourage. Libre enfin, sans souci d’argent, et je pourrai aimer, chanter, et mourir ».