- Tout au long de l'histoire, les autorités ecclésiales se sont attachées à nous convaincre que le diable était un être surnaturel. Une entité distincte et séparée de nous. Quoi qu'il en soit, je suis partisan d'une conception plus moderne selon laquelle le diable représente en réalité le mal qui couve en chacun. Nous façonnons notre propre démon.
Qu'arriverait-il si Neal était aussi passionnément attiré par elle qu'elle l'était par lui? La cohorte des parents lui réserverait le goudron et les plumes! Tous étaient venus avec l'espoir que Lyon choisirait leur fille, et Thea avait plutôt intérêt à tenir parole!
S'il rejetait ces demoiselles pour épouser la marieuse, cela ferait très mauvais genre.
Se faire passer pour une sorcière ne fut pas un tour de passe-passe aisé.
Portia ne pouvait évidemment pas s’habiller comme à l’ordinaire. Il ne fallait pas que cet Anglais hargneux devine à qui il avait affaire. Elle devait également le convaincre qu’elle était sorcière. Mais à quoi était censée ressembler une sorcière ?
Elle aurait pu s’habiller de haillons comme le faisait Lizzy la Zinzin, mais elle choisit de ne pas se faire passer pour ce genre de créature. Par ailleurs, elle savait qu’il lui faudrait dissimuler son visage.
Une voix qui s’était tue jusque-là s’éleva. Elle était aussi douce qu’un meuglement de vache et appartenait à une petite bonne femme d’allure malpropre. Elle n’avait que deux dents et son nez était remarquablement gros. Mais ce furent ses tout petits yeux rusés qui mirent Margaret sur ses gardes.
Il avait oublié ce que c’était qu’être jeune. Désormais, les responsabilités, les soucis et la charge de l’avenir, non seulement de son pays, mais également de sa famille, pesaient sur ses épaules. Il avait oublié le sentiment de liberté qu’il avait connu auprès de Thea.
Mais le passé était le passé ! Quant au présent… La blondeur des cheveux de la jeune fille avait laissé place à un châtain doré. La maturité avait affiné les traits de son visage, lui conférant un surcroît de personnalité. Ses yeux avaient gardé le même bleu, mais non leur innocence. La connaissance du monde et de soi avait voilé de ses ombres l’intensité de son regard.
- Qu'importe le passé puisqu'il nous a conduits jusqu'ici?
Elle lutta pour s’extraire de l’obscurité, mais ses yeux refusaient de s’ouvrir.
Ce fut l’odeur du pain que l’on cuit qui, finalement, remit ses sens en éveil.
Elle avait dormi profondément, d’un sommeil reposant. Le lit se révélait confortable, les draps étaient propres. Mais le moment était venu de quitter cet endroit.
Le moment était venu de se réveiller.
Elle fit un gros effort pour reprendre connaissance…
- Moi, je veux bien vous épouser! se proposa lady Lila.
Neal rejeta l'offre d'un geste vif de la main comme on chasse une mouche qui vous ennuie.
Les femmes venaient spontanément à lui en masse. Il en avait toujours été ainsi.
Ce n’était pas de l’orgueil chez lui que de reconnaître qu’elles le trouvaient beau, mais du réalisme. Dieu lui avait fait grâce d’un visage et d’un corps qui plaisaient à ces dames. Et il avait su en tirer profit, jusqu’à ce qu’il se lance dans sa présente quête.
Une mère connaît ces choses. C’est le drame de l’enfantement.
Pour elle, la vie vient au monde avec la violence d’un coup de couteau, violence qu’elle supporte volontiers en raison de l’issue dont celle-ci est le signe avant-coureur. D’instinct, elle encourage et protège son petit, et prie comme elle respire afin d’assurer sa sauvegarde.