Comme beaucoup de personnes âgées, elle avait besoin d’une oreille attentive à qui se confier pour parler de son passé. Florence aimait beaucoup madame Bastien pour sa discrétion et sa simplicité. Contrairement à ses voisines, elle ne se livrait pas aux commérages du quartier. Elle vivait sa vie tranquillement et laissait les autres vivre la leur comme bon leur semblait. D’ailleurs, les ragots la rebutaient. Elle disait toujours : « Ces femmes ont la mémoire courte ! Elles ne se souviennent pas de leur jeunesse et des rapaces qui s’amusaient à les observer et à jacasser sur leur façon de vivre. »
Le temps a eu raison de notre amour. Je ne ressemblais plus à celle qu’il avait connu, fraîche et pimpante comme au premier jour. Il a commencé à me tromper avec des prostituées. Puis après, c’était avec des jeunes femmes, certainement beaucoup plus attirantes que moi. Mon petit vous auriez pu faire partie de ces demoiselles… Je ne disais rien car je me culpabilisais. Je pensais que je le rendais malheureux et que tout cela n’était que la conséquence de mes actes. Et maintenant, je suis devenue un fantôme pour lui.
Nous ne savons pas encore s’il va reprendre ses fonctions. Nous doutons fort qu’il le puisse. Dans cette hypothèse, nous devrons prendre les mesures pour trouver un nouvel avocat pour le remplacer. Cela prendra sans doute plusieurs mois. Il n’était pas d’une grande amabilité, mais il exerçait admirablement bien sa profession. Nous allons donc travailler ensemble. Je sais que vous êtes efficace et méticuleuse ; ne changez pas votre façon de travailler pour moi.
Ce passé, elle n’en parlait jamais, pas même à Pierre. Elle l’avait gardé enfoui dans son cœur depuis des années. Seule Florence le connaissait. C’était comme si Clara avait cadenassé toute cette douleur dans une boîte qui lui pressait continuellement les entrailles et s’ouvrait dès qu’elle était confrontée à l’isolement. Son hypersensibilité la rendait vulnérable, et sans la présence rassurante de son mari, elle se sentait perdue.
Un fou cherche simplement une proie à harceler et c’est sur toi qu’il met ses plans à exécution. Je crois que tu devrais d’abord appeler la police et tout leur expliquer. Ensuite, tu prendras quelques jours de vacances et tu videras ta tête de tout ça. Crois-moi, je te comprends. La vie a été souvent dure avec toi mais il ne faut pas baisser les bras. Je sais qu’au fond de toi, tu es une femme forte.
Ce manque d’amour de la part de ses parents l’avait rendue méfiante vis-à-vis des hommes, c’est pourquoi elle était si volage. Elle rêvait de fonder un foyer mais sa vision du mariage et de la famille la ramenait au gâchis que ses parents avaient fait du leur. Peut-être ce Chris lui apportera-t-il le bonheur ?
Elle avait beau écarquiller les yeux, aucun numéro n’y figurait. Elle prit peur. Cette voiture avait des vitres teintées et par conséquent, elle ne pouvait pas voir qui était au volant. Priant pour arriver à temps chez elle, des pensées noires assaillirent son esprit. Elle savait qu’il s’agissait de son agresseur.
La peur la paralysait car elle savait désormais qu’elle ne pouvait compter que sur elle-même. Ce maniaque est tellement intelligent que même la présence de la police ne lui fera pas peur. Elle retourna vers l’agent qu’on lui avait désigné afin de donner le document et déposer plainte.
Elle a tout de suite tenté d’aguicher mon mari et il est évidemment tombé dans le piège. Marco aime les femmes et ne sait pas rester fidèle. Au début, il m’aimait et ne voyait que moi. Vous savez mon petit comment c’est… le coup de foudre, les émois des premières années…
Cette femme devait vraiment aimer son mari pour supporter toutes ces trahisons. Elle pouvait lire un profond désarroi dans ses yeux. Ses ongles rongés, dont le vernis orange craquelait, traduisaient un état de nervosité intense. Florence lui prit gentiment la main.