Charles Ridel

Un siècle après, le regard porté sur la grande guerre est parfois décalé. Certains livres et expositions sortent aujourd'hui des tranchées. On découvre ainsi l'activité des femmes à l'arrière, la contribution des animaux... "L'ivresse du soldat" est une contribution originale qui situe la place et le rôle de l'alcool qui a aidé "à tenir" nos braves poilus. Au musée de la bière de Stenay (55), une exposition temporaire donne d'ailleurs à voir le même thème.



Véritable thèse d'histoire avec force graphiques, illustrations, citations; sources, bibliographie et index, elle se situe à une époque où l'alcoolisation des Français était un fléau. Les arguments des hygiénistes s'opposaient alors à ceux des tenants de "l'alcool pour tenir, l'alcool pour agir, l'alcool pour viser et tirer, l'alcool pour oublier". Au final, les législateurs ont voté, d'une part, l'interdiction de la production de la "fée verte", le contrôle des débits de boissons et la fin du privilège des bouilleurs de crus et, d'autre part, de 1914 à 1918, l'augmentation de la quotité de vin "tonique et national"(0.25 cl, 0.50 cl, 100 cl), alternative à l'eau porteuse de maladies mais surtout exhausteur de victoires.



Viné, mouillé, coupé, dénaturé, coloré, bromuré, chauffé, manipulé, le vin est dans tous ses états. Le "père pinard" garda sa noblesse et ses vertus à moins que ce ne soit le lobbying des élus des régions viticoles où le vin, boisson française par excellence, avait une large place.



Cet ouvrage constitue une thèse historique documentée pour comprendre l'importance de l'alcool durant la guerre au front et à l'arrière.

L'exhaustivité du traitement des situations où l'alcool est en jeu rend le propos parfois itératif, d'autant que chaque idée est illustrée par une citation ou un texte, parfois redondants. La qualité du traité historique documenté a aussi le défaut de cette qualité.

Tout est dans le titre: l'ivresse du soldat est un livre sur la place de l'alcool durant la Première Guerre.

Comme l'explique l'auteur dans l'introduction, le sujet à souvent été abordé dans des livres sur l'alcool, mais jamais en détail, ou, en tout cas, jamais de façon aussi exhaustive qu'ici.

Charles Ridel a fait beaucoup de recherches et de travail, en cherchant dans tous les documents qu'il a pu trouvés, des rapports militaires officiels aux journaux intimes de soldats aux articles de journaux. Et on trouve dans le livre divers tableaux et statistiques pour mieux illustrer le propos.



En fait, le seul reproche que je pourrais trouver au livre, c'est que Charles Ridel a un style un peu laborieux à lire, un peu trop chargé, pas assez fluide. Cela donne à l'Ivresse du Soldat un côté très universitaire, qui penche plus du côté de l'article académique illisible que du travail abordable et agréable.



Pour finir, un très bon point aux éditions Vendémiaire: j'ai reçu ce livre pour une Masse Critique (merci Babelio !), et je l'ai reçu avec un marque-page avec un message manuscrit me souhaitant une bonne lecture (ce n'est pas grand-chose, mais ça fait toujours plaisir) et un catalogue des œuvres publiés par les éditions Vendémiaire. C'est très classe et très agréable à recevoir !

Ce livre est remarquable. Il part d’un constat. La consommation de l’alcool en France à la veille de la guerre de 14-18 et pendant celle-ci. Il nous raconte que si l’absinthe a pu être éradiquée, le vin, lui, ne l’a pas pu, malgré toutes les bonnes volontés de certaines associations pour la tempérance. Le vin a été le quotidien du soldat en l’accompagnant sur le front. Le vin lui a donné du courage, lui a évité de boire de l’eau croupie, lui a sans doute sauvé la vie mais l’a sans doute également tué à petit feu, avec des conséquences dans ses vies de soldat, de mari, de père. Armée coupable, armée victime. L’armée un peu débordée, chercha et cherche encore le moyen de faire de son soldat un être prêt à défendre son pays en toute circonstance. Et si l’on interdit l’alcool complètement, que prendra le soldat pour vivre les combats ? L’alcool a été une béquille pendant la Grande Guerre, quelle sera la béquille de l’armée de demain ? Ce livre nous raconte tout cela et plus encore en associant données chiffrées et anecdotes qui lui apportent beaucoup. Un très bon livre.

Très intéressant. À divers niveaux. En particulier pour les jeunes. Les enseignants devraient mettre ce livre entre les mains des grands adolescents. Pour constater l'implication de tous les « acteurs »

gouvernants, , vignerons, députés, médecins, officiers, transporteurs...Certains ayant évidemment plus de responsabilités que d'autres. Que les jeunes soient instruits sur la manière dont peut être (dont est?) organisée l'instrumentalisation des individus en bout de chaîne lors de situation exceptionnelle. Pas seulement d'ailleurs.

Mon grand-père gardait un mutisme complet sur cette guerre. Une fois lui ayant fait part de mon admiration pour le courage, le patriotisme. Il n'a pas démenti. Sa réponse, une seule phrase, m'a pétrifié, et marqué à jamais  :

« A la fin on ne voulait plus sortir, alors on nous donnait de la gniole. On bondissait et on aurait tué père et mère »

Oui, il fallait des drogues pour sortir de la tranchée. C'était là la fin de la chaîne. Ce devrait être le début des livres sur la guerre 1914-18.

Ouvrage qui aurait pu être retenu, mais malheureusement, l'auteur-chercheur (je comprends qu'il s'agit de la publication de son travail de thèse) n'a pas été au bout de sa recherche. Cette critique touche en particulier un "exemple" d'embusqué, qui ... n'en est pas un. Oui, sa mère qui avait perdu son mari, militaire, son jeune fils, engagé volontaire, a tenté, en correspondant avec Barrès, de protéger son seul fils survivant. Oui, ce dernier fut blessé en 1916. Mais NON, il ne fut pas un embusqué. Il retourna au front quelques mois après sa blessure. Et il fut finalement blessé une seconde fois lors des assauts de l'artillerie blindée en septembre 1918. Le dit soldat termina la guerre au grade de lieutenant, et la Croix de Guerre lui fut décernée avec une étoile en argent pour citation à l’Ordre de la Division. Il intégra ensuite Saint Maixent, puis Saint-Cyr. Il poursuivit sa carrière militaire jusqu'au grade de colonel et magistrat de justice militaire. Je reste donc perplexe sur le travail de recherche réellement effectué. Le travail, pertinent à la fois historiquement et socialement, n'a pas été mené à son terme. Il fallait chercher ce que ces "embusqués" étaient finalement devenus. Ce que la lecture de ce livre m'a finalement engagé à faire.

Livre intéressant et agréable à libre sur un thème dont on ne parle presque jamais (ou juste devant une caricature dans une coupure de journal) : les embusqués de la Première Guerre Mondiale.

Ceux qui ne voulaient pas aller au front et ceux qui ne voulaient plus y retourner, "saouls d'horreur".



Nombre d'embusqués, type d'embusquage, mesures pour contrer cela et récupérer des soldats, perception par les civils et les soldats,...

Cet ouvrage permet d'apprécier ce phénomène justement et entièrement.

Il apprend énormément de choses sur les embusqués alors qu'il n'est pas très long à lire.

Je le conseille à tous les passionnés de la Grande guerre en particulier et d'histoire en général!