Clarisse Bauwens

Prologue

De nuit, le pont Dupompon est l’un des plus beaux endroits de la région. Peut-être même est-ce le plus beau coin de toute la Belvessie ! Éclairé par de vieux lampadaires modernisés (les bougies d’époque ont finalement été remplacées par des ampoules), ce monument est l’emblème de la ville de Lausève. Le week-end, des couples venus de toutes parts s’y rendent pour immortaliser leur amour. Certains scellent un cadenas sur les vieilles balustrades, d’autres prennent des selfies.
Mais cette nuit, il fait froid et personne ne s’y promène. Seul un tricycle équipé d’une cabine arrière roule sur le trottoir. En plein milieu du pont, le tuk-tuk vélo noir aux élégantes lignes turquoise s’arrête et ses phares se coupent. Au même moment, panne de courant. Tous les lampadaires s’éteignent et le pont est plongé dans l’obscurité la plus totale. Une fine silhouette sort de la cabine de pilotage du tuk-tuk. On dirait un petit lutin vêtu de noir de la tête aux pieds. Son visage est caché derrière une esthétique cagoule qui épouse parfaitement la forme de sa tête. Ses yeux verts, brillants de malice, sont, quant à eux, mis en évidence par un joli masque turquoise. Au sommet de la cagoule, une ouverture laisse passer une longue chevelure brune. Sur le front se trouve une discrète mais puissante lampe. Le lutin n’est autre que cette jeune enquêtrice qui fait parler d’elle dans la région depuis quelque temps. Mystéria ! L’audacieuse chasseuse de brigands, la superwoman sans superpouvoir. Calmement, l’aventurière se rapproche de la balustrade et regarde la rivière couler en dessous. Le faisceau lumineux de sa lampe frontale éclaire quelques canards dormant sur le rivage. Mystéria fait demi-tour et retourne vers son tuk-tuk. En sifflotant joyeusement la mélodie du pont d’Avignon, elle s’empare d’une commande posée près du guidon et pousse sur un bouton. Un bras télescopique sort du toit du véhicule. Au bout est fixée une poulie dans laquelle passe un câble avec un crochet. La jeune fille ouvre ensuite la portière de la cabine arrière :
— Ladies and Gentlemen! Ou plutôt, Gentlemen and gentlemen. Terminus ! Nous espérons que le trajet avec Tuk-tuk Bikeline vous aura plu et que vous choisirez notre compagnie pour votre prochain vol !
Elle rigole avant de rajouter sur un ton sérieux :
— Si toutefois l’envie de voler devait à nouveau vous effleurer l’esprit !
[suite]

Prologue

Le vent lui siffle dans les oreilles et les branches fouettent son visage. Derrière elle, les feuilles mortes tourbillonnent dans les airs avant de retomber sur le sentier. La forêt dans laquelle elle s’engouffre à pleine vitesse devient de plus en plus dense et menaçante. Sa puissante lampe frontale éclaire le chemin, tout comme la pleine lune. C’est alors qu’elle l’entend. Juste au-dessus d’elle. Un drone descend à travers les arbres et lui fonce dessus.
¬— Eh mince !¬
Plus rapide que l’éclair, le petit lutin vêtu de noir de la tête aux pieds dégaine une flèche de son carquois et arme son arc. Son visage est caché par une jolie cagoule noire. Au sommet de celle-ci, une ouverture laisse passer une longue chevelure brune qui virevolte au vent. Un masque turquoise met en évidence des yeux verts brillant de malice. Mystéria ! La nouvelle chasseuse de brigands, l’enquêtrice énigmatique dont personne ne connaît l’identité, celle qui fait de plus en plus parler d’elle à Lausève, une des plus grandes villes de Belvessie, et surtout, celle qui livre toujours les méchants de façon originale au lieutenant Bredouille. Tout en gardant l’équilibre sur son onewheel , la jeune fille s’apprête à tirer lorsqu’un nouvel ennemi apparaît. À ses trousses, un immense chien aboie toutes dents dehors. L’ayant vu pointer l’arc vers le drone, la bête donne un bon coup sur ses pattes arrière et saute sur l’aventurière. De justesse et avec style, Mystéria évite la bête qui part en roulé-boulé dans le talus.
— Un de moins ! dit-elle en alignant le drone avec son arc.
Malgré les secousses du onewheel, l’intrépide maintient l’engin volant en ligne de mire, sort la langue pour se concentrer et fait feu. Le projectile touche la cible et rebondit contre la carcasse.
— Zut, mes flèches ne sont pas assez puissantes !
— Wouf !
— C’est pas vrai ! s’impatiente Mystéria en regardant par-dessus son épaule.
Le chien est à nouveau là, plus décidé qu’avant.
— Je veux bien abattre un drone. Un chien, par contre, hors de question !
[Suite]