Il était une fois, dans des temps très anciens, un pays où les gens vivaient très heureux. Rien d’étonnant à cela : chacun de ses habitants se voyait offrir, à sa naissance, un sac contenant un nombre inépuisable de chaudoudoux. Ils avaient le pouvoir de donner à ceux qui les possédaient la sensation d’être comme eux : chaud et doux de partout. Dès qu’on en sortait un du sac, dès qu’on en recevait un en cadeau, il se mettait à sourire et à s’épanouir de façon câline et contagieuse. Les chaudoudoux étaient très appréciés et s’offraient sans retenue, répandant le bonheur dans tout le pays. Malheureusement, la sorcière Belzépha, se mit en colère : les gens étaient trop heureux, ses philtres et ses potions ne se vendaient plus. Elle monta alors un plan machiavélique et réussit à faire croire à un des habitants que son épouse, à force de donner ses chaudoudoux à ses enfants, amis et voisins, n’en aurait bientôt plus pour lui. Inquiet, il se mit à surveiller sa femme, à se plaindre ou à tempêter quand elle se montrait trop dispendieuse à son goût. Témoin de tout cela, leurs enfants se mirent aussi à limiter leurs offrandes et en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, le malaise se propagea comme traînée de poudre dans tout le pays. Chaque jour, chacun devint plus égoïste, voir même avare, mais aussi, en parallèle, moins heureux parce qu’en manque de la chaleur et de la douceur des chaudoudoux. Les gens s’arrêtèrent de sourire, de se montrer gentils, certains commencèrent à se ratatiner, parfois même ils mourraient. Le commerce de Belzépha redevenait prospère… mais elle ne voulait pas que les gens meurent pour augmenter encore ses profits. Alors, elle créa les froids-piquants, qui ressemblaient un peu aux chaudoudoux, mais qui prodiguait le froid et la mauvaise humeur… Qu’est-il donc advenu de ce charmant pays tombé aux mains de la perfide sorcière ???
Mon avis : Cet album est l’adaptation française de « A Warm Fuzzy Tale », un célèbre conte écrit en 1969 par Claude Steiner, psychologue et disciple d’Éric Berne, le fondateur de l'Analyse transactionnelle. Celle-ci est utilisée pour comprendre, gérer, changer et surtout tenter d’améliorer les relations entre des individus, ou au cœur de certaines organisations ou entreprise. « 1969 – 2012, 53 ans !!! » ce conte doit être complètement dépassé, me direz-vous sans doute. Et bien croyez-moi, ce n’est pas du tout le cas, je trouve même qu’il n’a jamais eu autant d’écho qu’aux jours d’aujourd’hui et qu'il reprend plus que jamais toute sa signification. Mais que sont les chaudoudoux ? A mes yeux, ce sont des bonjours, des sourires, des petites attentions, des soutiens et des caresses, toutes ces petites choses qui rendent le quotidien plus aérien, plus léger, qui nous arment un peu plus contre les difficultés de la vie et l’adversité. Toutes ces petites choses qui nous donnent la sensation d’être reconnu par l’autre. A ne pas en recevoir, on se sent solitaire, transparent. A ne pas en offrir, on devient égoïste, centré sur sa seule petite personne. Dans la deuxième phase de son plan démoniaque, la sorcière Belzépha crée les froids-piquants que je comparerais au mépris. Une fois recouverts de plumes un peu douces pour les faire passer pour des chaudoudoux, je les ressens comme étant l'hypocrisie, le mensonge, voire la trahison. Bien sûr, l’histoire contient plusieurs niveaux de lecture, mais cela veut dire aussi qu’elle peut donner lieu à de beaux échanges entre deux personnalités ou sensibilités différentes. Elle me permet en tous cas de remercier tous ceux qui luttent encore contre l’indifférence et l’individualisme par de petits signes ou de petits gestes qui leur coûtent moins que ce qu’ils apportent à ceux à qui ils sont destinés. Je suis sûre qu'ils se reconnaitront. Elle me permet aussi de rappeler aux autres à quel point il serait facile de ramener un peu de douceur et d’humanité dans notre communication avec autrui. Illustré par Pef, bien connu et apprécié par mes jeunes lecteurs, je sors régulièrement cet ouvrage pour le mettre en avant sur le rayonnage des contes. Je sais que son coup de crayon, qui ici sait parfaitement amplifier l’atmosphère des différents tableaux du texte, va les attirer irrémédiablement. Et c’est le cœur empli d’espoir que je le prête aux plus jeunes… un double sourire sur les lèvres…
Public : à partir de sept – huit ans et sans autres limite d’âge. Mais peut faire l’objet d’une lecture accompagnée dès l’âge de cinq – six ans.
Si vous voulez vous rendre sur le site en anglais de l’auteur, Claude Steiner, vous pouvez suivre cette adresse :
http://www.emotional-literacy.com/
Lien :
http://noslivresnosemotions...