« Nous vivons comme contemporains certains événements survenus il y a plusieurs années, voire plusieurs dizaines d'années, tandis que nous paraissent très éloignés, voire définitivement effacés des faits et des sentiments datant d'un mois. Le temps s'amenuise, s'allonge, se contracte, se regroupe en grumeaux qu'on a l'impression de toucher du doigt, ou se dissout comme des nappes de brouillard qui s'éclaircissent et s'évanouissent dans le néant ; c'est comme si on se trouvait en présence de plusieurs voies ferrées qui s'entrecroisent, bifurquent, et sur lesquelles le temps file dans des directions différentes, voire opposées.
[…]
Il n'y a pas un train unique du temps, roulant à vitesse constante dans une direction unique ; parfois on croise un autre train, qui vient d'en face, du passé, et pendant un moment nous avons ce passé près de nous, à côté de nous, dans notre présent. »