On trouve le reflet de ces aspirations essentielles dans le livre qui est ici offert pour la première fois au lecteur français. Il s'y est proposé de décrire, dans un effort global de classement (ô souvenir d'Aristote !) les diverses déviations de l'esprit, pris entre le général et l'individuel. Ces « maladies » souvent créatrices de grandes œuvres, forment une sorte d'anthropologie philosophique ; mais par-delà cette description, elles constituent comme des oscillations autour de l'Être : entre le trop et le trop peu, elles le cernent et visent à l'atteindre.
(Jacqueline de Romilly, Préface)
Beau Vaillant avait compris, sa mémoire s'étant réveillée et fourrageant dans la réserve aux souvenirs, qu'une mesure lui était donnée, qu'il devait en avoir, comme toute chose en ce monde. [...]
Nos arbres ne poussent pas jusqu'au ciel et les existences humaines ont leurs limites intérieures, même lorsqu'elles accèdent à l'indétermination éternelle et tentent d'y demeurer. Il existe un accomplissement sans éternité. L'archétype de l’être subsiste, mais ses incarnations prennent fin, passagères. « Qui point n’y croit est plus menteur que moi ». Quand au conteur, il remonte en selle et s'en va, sans cheval magique, retrouver le monde des Réminiscences où le penseur antique puisait ses mythes, et ce conteur folklorique, ses contes.
(p. 142-143, traduction d’Annie Bentoiu)
Într-o aşa serioasă măsură mi se pare de negîndită viaţa, încît dacă m-aş gîndi efectiv ce să răspund la o întrebare uzuală ca: "ce mai faci?" aş constata că întrebarea aceasta e printre cele mai grele cu putinţă. Căci „fac“ o mie de lucruri: aş putea să spun că gîndesc, că sînt bine, că gîndesc ceva, că gîndesc altceva, că am fost pe stradă, că nu fac nimic. Ce să spun? Care e lucrul pe care trebuie să-l spun celui care mă întreabă? Şi nu numai atît. Care e lucrul pe care trebuie să i-l spun lui, acum?
Şi mai mult: ce trebuie să-i spun lui,acum, despre mine?Aşadar ar trebui să respect mai multe serii de adevăruri:
a) adevărul lucrului, să aleg, adică, un lucru dintre cele o mie pe care le-am făcut realmente;
b) să aleg adevărat pentru cel care mă întreabă, adică să aleg unul dintre lucrurile acelea care privesc raporturile mele cu el;
c) să aleg un lucru adevărat pentru clipa de faţă, pentru ceea ce se întîmplă acum între el şi mine;
d) să fie totuşi un lucru al meu.Şi credeţi că astea sînt singurele adevăruri de respectat? Atunci ce să-i răspund? Mă cuprinde o panică, panica mea formală.
Nu numai vorbitori obișnuiți de limbă română, dar și gînditori în orizontul ei au înțeles greșit, cîteodată, pe acest « n-a fost să fie » ca un fel de resemnare a gîndului și a inimii.
De aceea nu sîntem, în lume, decît ceea ce se întîmplă să fim. Un prieten, o dragoste,cărţile, luna de ieri-noapte, astea toate ne construiesc. Noi ne facem din propria noastră risipire. Fiecare om este dezordinea sa.
À analyser le problème du ”comment quelque chose de nouveau est-il possible”, c'est Descartes et Leibniz qui viennent à l'esprit, dès le début, avec cette logique de l'invention qu'ils développent.
[Când cercetezi problema lui „cum e cu putința ceva nou”, Descartes și Leibniz îți vin de la început în minte, cu acea logică de invenție ce desfășoară.]
Ce qui est extraordinaire dans "Hypérion", ce n'est pas que l'immortel descend; c'est que le mortel (qui brûle, séduit par un simple Cătălin) résiste...
[Ce e extraordinar în "Luceafărul", nu este că nemuritorul coboară; e că muritorul (care arde, cucerit de un simplu Cătălin) rezistă…]
J'ai rencontré Constantin Noica un certain nombre de fois dans les dernières années de sa vie. Au premier abord (je m'en souviens si bien !) on voyait apparaître un petit monsieur en bottines, parlant un français élégant et montrant une rare courtoisie. On ne remarquait, du dehors, ni la force intérieure de l'homme, ni son immense érudition. Mais, derrière le sourire bienveillant et derrière la douceur, l'on ne tardait pas à sentir en lui, comme une armature, un fond de fermeté irréductible–celle d'un homme que rien, jamais, ne saurait faire dévier du chemin de la vérité.
(Jacqueline de Romilly, Préface)
Comment une helléniste n'aurait-elle pas été sensible aux traits qui le rapprochent de Socrate ? Socrate avait dû boire la ciguë : Constantin Noica avait passé dix ans de sa vie en résidence surveillée et six ans en prison ; il vivait dans la montagne, occupant une chambre étroite et glacée, se nourrissant mal, indifférent aux misères matérielles. Comme Socrate, il ne s'était jamais lassé d'enseigner aux autres à penser : cet homme isolé avait des disciples un peu partout, à qui il donnait des programmes de lecture, qu'il formait, dont il déliait l'esprit.
(Jacqueline de Romilly, Préface)
Dans ses premières tentatives de créer, proches encore de l'état de nature, l'homme se contente de donner de nouvelles déterminations à une réalité individuelle rencontrée par hasard.
Un tronc d'arbre, un bloc de pierre se change ainsi en table et en chaises, dans une « Table du silence » de Brancusi, une pierre polie par les vagues peut devenir, sous la main habile de l'homme, un corps humain, tandis que, dans la création littéraire, une destinée individuelle peut se trouver dans toutes sortes d'aventures et de situations de vie, semblables à celles d'Ulysse.
(p. 59)