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Citation de CorinneCo


Corinne Dufosset
Décalcomanies

Je suis un homme poursuivi par le courant habituel de la vie, il m'assaille et rythme mon présent, alors je me cache pour expirer, en quelque sorte, pour expulser cette angoisse qui est mienne. Je me sers, je prends, et quand soudain tout est trop grand et infini pour moi, j'essaie de devenir quelqu'un qui ne me reconnaîtrait pas.

Je fais des tours et des tours dans ma tête mais cela ne change pas ; elle reste collée à mon cerveau cette pluie qui tombe sur le pavé, sur mon pavé loin de mon cœur, comme un ciel renversé dans la terre. Je suis enfui quelque part entre mon travail et ma vie, ma vie et mon travail, dans la futilité de mon existence, qui ressemble à une carte postale, à un avis de recherche, à une épingle dans une poupée vaudou.

Je n'ai vu aucun pays, je ne sais rien des aéroports, des gares et des salles d'attente ; je sers dans ma tête des machines à sous qui me communiquent des sensations et je regarde parfois les billets dans les agences de voyage comme des cartes indéchiffrables. Je suis comme un voyageur assis à une place réservée qui n'est pas la sienne, je resquille dans mon rêve, mon rêve de vie, mon rêve...

Je vois tous ces gens dans la rue, quand je les croise et que je ne les vois pas... Je reste devant mon miroir pour retrouver leurs visages et j'en suis incapable. Je suis comme eux, dans une foule. Et cette foule, le soir, me regarde-t-elle dans un miroir ? Je suis un homme poursuivi par la sollicitude...

J'ai peut-être rencontré, un jour, quelqu'un qui pouvait rester près de moi, loin des autres et près de moi. Quelqu'un qui me reconnaissait dans mon miroir, qui savait la poursuite qui animait mon cœur. C'était comme une couleur, quelque chose qui tenait éveillé. Alors, pour pouvoir fermer les yeux, pour dormir sans rêve, j'ai tourné les talons. Parfois, j'y repense à cette vie qui fut comme une décalcomanie et qui s'effaça lentement....

Parles-moi, toi que je ne connais pas, parles-moi même si il te semble que je n'écoute pas. Tu as sûrement comme moi des envies de rire, de raconter n'importe quoi à n'importe qui, sans attendre, sans comprendre, parles-moi de ta vie ; cette vie moderne qui coule dans nos veines, cette vie moderne qui s'affiche perpétuellement sur notre quotidien.

Je vis sur l'ordinaire, moi qui aime l'extra ; je vis sur le sursis de quelques uns qui me connaissent entre parenthèse, je vis sur mon nom que j'écris mécaniquement, je vis sur moi, sur ma tête, sur tout et rien. Je vis sur l'échappée que je ferais un jour, moi le sprinter de mes désirs....

Il m'arrivera un jour, quelque chose de doux, quelque chose en recommandé. Alors ma vie s'ouvrira, un jour, sur la douceur, sur un bout de terre, un bout d'océan, un rêve en bouteille, échoué près de ma tête. Il m'arrivera ce coup de soleil, un jour où je ne serai pas pressé, un jour sans y penser...

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