Je suis une vieille coco mélange la petite histoire et la grande, l’avant et l’après de la période du bien-aimé-fils-du-peuple connu aussi sous son petit surnom de Génie des Carpates.
Emilia Apostoae est troublée par la dernière conversation téléphonique qu’elle a eue avec Alice, sa fille ingénieur expatriée au Canada et membre actif de la communauté roumaine là-bas: des élections libres arrivent en Roumanie et d’anciens membres du parti communiste se présentent, idée qui lui pose un problème. A Emilia aussi car depuis la révolution, son train de vie n’a cessé de chuter. Il lui faut aujourd’hui deux mois de salaire pour s’acheter un ticket de bus alors qu’avant… avant, c’était le bon temps. Sur le thème du G.O.D (the Good Old Days), Dan Lungu, maître de conférences de sociologie, nous guide à travers l’histoire rocambolesque de la Roumanie profonde et celle de son héroïne haute en couleurs.
Emilia ne partage pas les vues de sa fille, le communisme ayant été pour elle une bénédiction. D’accord, il y avait les files d’attente devant des magasins vides, tout se négociait avec des pots-de-vin, le flicage faisait partie du quotidien comme les discours interminables du grand leader, mais pour cette fille de paysan dont l’unique ambition était de devenir citadine, la vie lui a souri. Elle a renoncé à certains rêves mais les souvenirs qu’elle garde de sa jeunesse communiste sont joyeux. Pistonnée par la famille, elle obtient rapidement une place à l’atelier de confection métallique, s’amuse avec ses copines du foyer ouvrier, ses collègues de l’usine, vit de trocs, gâte sa famille restée à la campagne l’argent coulant à flots depuis. L’évocation joyeuse de ses souvenirs s’appuie sur un présent fait de dénuement. Depuis la révolte populaire, les usines ont fermé, l’économie du pays est à genoux, de jeunes retraités sont repartis à la campagne, tout va à vau l’eau! alors pourquoi voterait-elle pour un régime démocratique qui n’a fait que grignoter son faible pouvoir d’achat? Fantasque, nostalgique d’un paradis à jamais perdu, égocentrique, fabulatrice, Emilia part interroger ses anciens collègues s’attendant à partager les mêmes regrets.
Le livre, plutôt cette farce est racontée par un seul personnage totalement coupé des réalités dont on suit le cours erratique de ses souvenirs le sourire aux lèvres. Un récit aussi cocasse que son titre, unique raison pour laquelle je l’ai acheté. C’est une comédie qui épingle l’incohérence des sentiments d’un peuple ayant subi un régime totalitaire et qui le regrette. Un style fluide, un roman simple qui rappelle » Le communisme est-il soluble dans l’alcool », de Antoine et Philippe Meyer, un recueil d’anecdotes collectées auprès de dissidents soviétiques. Ne pas rechercher autre chose qu’une bonne détente.
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