Denis Guénoun

Un livre pour s’encourager à vivre, de par le manque de sens de la vie, qu’on la considère dans son essence ou dans la mauvaise qualité du moment.
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Ce livre rassemble des textes écrits entre 2009 et 2023. Les objets en sont divers, les « commandes » aussi. Le patchwork pour un habit d’Arlequin sérieux comme un pape, brillant parfois, grave le plus souvent. L’écriture au « je », fréquente, donne un ton de confidence et d’honnêteté, surtout quand Denis Guénoun mêle des éléments de sa vie aux considérations générales de ses recherches.

Les articles sur Oran sont des modèles du genre. L'auteur se situe dans son enfance, qu’il a passé dans cette ville, où sa famille et lui étaient "assimilés" aux Européens, car ni arabes, ni musulmans. Il dresse ainsi un portrait sociologique, empreint d’histoire collective et personnelle. Oran, la ville de « la peste » de Camus était moitié « indigène » moitié européenne, avec une ségrégation spatiale forte. D’où peut-être l’absence d’arabes dans les écrits populaires de Camus, qui nous semble problématique maintenant. « J’ai vécu le récit de Camus comme un souvenir personnel, familial ». p25 Mais l’hypothèse de Denis Guénoun est que l’absence des arabes constitue le « sujet du roman ». Ces réflexions mêlant l’intime et l’extime, ou pourrait dire amènent Denis Guénoun à affirmer cette suggestion, si vous me pardonnez l’oxymore. Il lui faut être, il nous faut être « passionnément européens ». « Dans les sciences, les théories ou les arts, la culture européenne n'a cessé d'explorer les voies de l'universalité terrienne, humaine et au-delà. » p37



Tout ce livre est dans cette volonté, ce désir plutôt, de voir l'humanité, qui est constituée d'êtres politiques s'instituer comme sujet politique en-soi, (ce n’est pas la terminologie de l’auteur) dans la diversité hétérogène de l'humain. La philosophie, trop discréditée, doit reprendre une place active, renouer avec l’idée de bien, la critique ayant perdue de sa positivité. La théologie, non pas par la défense et l’illustration de l’idée de Dieu, mais par une sorte de nécessité de sortir de soi pour trouver du sens. Le théâtre est lié de façon énigmatique aux formes humaines de l’existence (p165), fondé sur « l’adresse » : « l’adresse au public est une déclaration amoureuse » p190

Il s’agirait de changer les mentalités par une révolution spirituelle, « vouloir l’époque », peut-être éprouver les pensées dans l’obstination du théâtre pour rejoindre ciel et terre ? Du cousu main, disparate et uni par la confection, la façon. La somme des couleurs brassées donne le blanc qui les contient toutes.

Un livre pour s’encourager à vivre, de par le manque de sens de la vie, qu’on la considère dans son essence ou dans la mauvaise qualité du moment.