Emmanuel Parmentier

(...) car je vois qu'au coeur de la mort persiste la vie,
au coeur du mensonge persiste la vérité,
au coeur des ténèbres persiste la lumière.

Mohandas Gandhi

(page 137)

LA MAMAN. Bon, alors allons-y... Il était une fois...
(Un temps.) Il était une fois un petit garçon, qui n'était
plus si petit, et qui voulait que sa maman lui raconte
encore des histoires pour s'endormir...

JULES. T'es pas drôle...

LA MAMAN, (continuant.) Il avait déjà huit ans, mais
non, tous les soirs, il fallait qu'il embête sa maman
avec ses histoires... (Elle regarde Toudou.) D'ailleurs, à
huit ans, il ne pouvait pas non plus se passer de son
ours en peluche. Vraiment, il était temps que ce petit
garçon grandisse...

JULES, (la moue boudeuse.) Elle est nulle ton histoire,
maman. (Il se tourne vers Toudou.) Et puis d'abord, mon
ours en peluche, je te rappelle qu'il a un nom...
Toudou. Parce qu'il est vraiment tout doux...

[les passages entre parenthèses dans ma citation sont en italiques dans le texte]

Dix ans déjà. Dix ans que Léo est parti pour un voyage sans retour. Il ne se passe pas un jour sans que je pense à lui. Pas un. Car si le temps recouvre les souvenirs, il ne les efface pas. Et c'est très bien comme ça.

Bonjour maman. Tu vas bien?
Aujourd'hui, je suis avec tous mes enfants, alors comment ça pourrait ne pas aller...
A cet instant, on aurait dit que le soleil brillait encore plus fort.

Madame,
Je suis une maman sans ressources, une maman sans toit, travail ni argent. Une maman qui se sent égarée et qui ne saurait rendre heureux son enfant.
La petite fille que vous avez entre les mains s'appelle Garance. Vous ne me connaissez pas, mais moi, j'ai pris le temps de vous observer. Et je sais qu'en vous, il y a tout l'amour dont a besoin une petite fille qui ne demande qu'à croquer la vie. Je sais que vous saurez la rendre heureuse. Devant l'impasse où je me trouve actuellement, et même si cette décision me déchire le cœur, je préfère vous la confier. Cela me semble l'issue la plus raisonnable pour son bonheur. Je vous la confie avec regrets, mais aussi avec confiance et espoir.
Je vous en prie, ne refusez pas. Si un jour la vie le permet, je reviendrai vous voir, vous et Garance.
D'avance, merci. Merci du fond du cœur.

Bref, si le vieil arbre avait régulièrement de la visite, ce n'était pas vraiment pour lui que l'on se déplaçait. Les gens venaient uniquement pour lui exposer leurs désirs, pas pour prendre de ses nouvelles... Et, pour ne rien arranger, les autres arbres étaient un peu jaloux de lui. Pensez donc : eux, personne ne venait jamais les voir, on se fichait pas mal de leur sort. Pour se venger, ils avaient décidé de ne plus lui adresser la parole.
Alors voilà, malgré toutes ses visites, l'arbre se sentait bien seul dans sa forêt. Profondément seul.

Comme ça lui arrivait parfois, Garance se mit à penser très fort à sa maman.
Ce n'est pas qu'elle ne se plaisait pas avec Grand-Ma.
[.......]
Grand-Ma était douce, généreuse, pleine d'attentions; elle avait un cœur plus grand que l'univers. Mais Grand-Ma ne remplaçait pas pour autant sa maman. Rien ni personne ne saurait remplacer une maman...

Garance et Grand-Ma habitaient une petite ferme dans un village un peu perdu qui s'appelait Trouvières-aux Bois. Ne cherchez pas sur la carte de la France pour voir où ça se trouve, c'est un endroit tellement petit qu'il n'y figure même pas...

A première vue, c'était un arbre comme les autres. Peut-être un peu plus grand, peut-être un peu plus gros, parce que c'était un très vieil arbre, mais comme ça, à première vue, c'était un arbre comme tous les autres arbres. Un arbre comme il y en a dans toutes les forêts, un arbre comme il en existait des millions sur notre si belle planète.

Il circulait une légende sur cet arbre. On disait qu'il avait le pouvoir d’exaucer tous vos souhaits, de réaliser tous vos désirs. On prétendait même qu'il était capable de deviner vos vœux les plus secrets, les plus enfouis, et de leur donner vie. Mais comme beaucoup de légende, eh bien, ça ne restait qu'une légende. Personne ne l'avait jamais vérifiée de ses propres yeux, personne n'avait jamais vu un seul de ses désirs s'accomplir.