J'avais face à moi une sorte de génie totalement détaché des contingences matérielles. Cette fois, cependant, il sembla comprendre mes remarques. La vie n'était facile pour personne à cette époque et nous avions besoin de rentrées d'argent.
Je vaquais à mes occupations dans la salle de boxe dont la fréquentation avait fortement baissé, lorsqu’on frappa à la porte de nos bureaux. J’allai ouvrir la porte pour découvrir notre ami le commissaire Ardent, accompagné de deux hommes très élégants mais surtout en tous points identiques.
- Commissaire, quelle bonne surprise ! Entrez Messieurs, je vous en prie.
- Merci Monsieur Luciole. J’espère que nous ne vous dérangeons pas de si bonne heure ? Permettez-moi en ce cas de vous présenter Messieurs Henri et Charles Boulin-Chevalier.
Nous échangeâmes une poignée de mains avec le commissaire, mais les banquiers se contentèrent d’un simple hochement de tête. Je leur proposai de prendre place dans des fauteuils Chesterfield que j’avais récemment acquis pour créer un cadre adapté à nos activités. Je leur demandai de m’attendre quelques instants afin de leur apporter une tasse de café et de prévenir Sherlock.
Une fois installés tous les cinq, le commissaire prit la parole.
- Messieurs Boulin-Chevalier sont d’éminents banquiers de la place ainsi que des proches de Monsieur le Préfet. Ce dernier m’a convoqué à la première heure afin que je prenne connaissance d’un problème disons… étonnant, mais qui ne semble pas justifier l’intervention de mes services à l’heure actuelle. J’ai par contre pensé que vous pourriez leur apporter une assistance efficace et je les ai convaincus de venir vous rencontrer aussitôt.
- Avant d’aller plus loin, sachez que nous ne souhaitions pas impliquer qui que ce soit…
- … mais le commissaire Ardent nous a assurés de votre parfaite discrétion.
- Et je réitère mes propos. Je me porte garant de la discrétion ainsi que de la compétence de Messieurs Luciole et Holmes.
Monsieur Labaume nous accueillit avec chaleur, heureux de rencontrer Sherlock dont je lui avais tant vanté les mérites. il voulut savoir comment il s'acclimatait à Lyon et quels étaient ses projets.
Ce fut l'occasion de lui présenter notre très récente association en tant que détectives privés, tout en lui demandant de garder le secret. Cela l'amusa beaucoup. Ce n'était pas une profession courante même si notre très illustre Vidocq l'avait rendu populaire.
Si j'avais officiellement épousé la carrière de détective, force était de constater que c'était également le cas de toute la maisonnée ! Maryvonne se délectait de nos aventures, quand elle ne craignait pas que nous prenions trop de risques. Quant à Anselme, mon adorable voisin dont j'avais racheté la maison et qui continuait à occuper sa chambre, il nous aidait fréquemment grâce à son talent de dessinateur.