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Citation de Danieljean


À travers l'opposition cardinale du " ciel " et de l'homme, Zhuangzi distingue ainsi deux niveaux ou régimes de vitalité : l'un en est le régime foncier (" céleste "), celui qui est à nourrir et que je retrouve en moi dès lors que n'intervient plus ma visée ni ne s'ingère plus mon savoir régisseur de causalité (" éliminer le savoir et la cause ", est-il dit conjointement, cf. Guo, p. 539) ; l'autre est le régime réductivement "humain", où ma vitalité est "forcée" par tous les partis pris qui l'étreignent, qu'ils procèdent du désir ou de la connaissance, et sous leur excitation se réduit d'autant. Car il y a à distinguer l'excitation, extérieure et même épidermique, sporadique et momentanée, telle qu'elle surgit inlassablement au niveau de mon être affectif et qu'elle me précipite et me consume; et, d'autre part, l'incitation qui, elle, est foncière et, décapée du pullulement de mes conceptions comme de mes options, me relie pleinement à l'émoi qui ne cesse de mettre en mouvement le monde: la nourriture "céleste", on l'a compris, sera la nourriture de cette incitation. Ou encore on pourra se représenter ainsi les deux régimes de réactivité : quand, d'une part, le " ressort" qui me suscite (notion de ji) est peu ancré, peu enté, dans la processivité naturelle telle qu'elle engage le fonds du monde, mais se limite pelliculairement à la réaction de mon point de vue ou de mon désir - et, dans ce cas, comme elle reste faiblement motivée, la dépense est grande, en moi, en termes de vitalité ; ou bien, au contraire, quand le " ressort" qui m'incite et me fait lever est celui-là même qui ne cesse d'animer le monde en son entier et me branche sur son énergie - et, dans ce cas, la réaction qui me meut, loin de me coûter, me porte et me vitalise. " Quand le désir est profond, le ressort du ciel est superficiel", dit laconiquement mais suffisamment Zhuangzi (Guo, p. 228) ; autrement dit, quand l'excitation (du désir) est forte, l'incitation me reliant à la source même de la vitalité ne transparaît plus qu'amortie par ce recouvrement excitatif, elle s'y dilue et s'étiole. Il n'y a pas là, on le voit, de la part de Zhuangzi, condamnation morale du désir et retour aux vertus de l'ascétisme mais, simplement, constat de ce que, si j'en reste au niveau superficiel de l'excitation, entraînant le vouloir, la motivation est alors à mes dépens : c'est à moi (à ma vitalité) de fournir à l'aliment de mon désir; tandis que, quand le ressort est celui du " ciel " en moi, c'est-à-dire quand, libéré de ma perspective individuelle, je reprends pied au niveau de la processivité naturelle, je n'ai plus à vouloir (je ne suis plus tendu vers), et c'est le monde entier qui, en m'émouvant, réagit à travers moi et de lui-même va me déployant. (Qi Gong de l'arbre ndlr).
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