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3.38/5 (sur 8 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1968
Biographie :

Frédéric Neyrat (né en 1968), est un philosophe français, ancien directeur de programme au Collège international de philosophie et Docteur en philosophie (1998).

Membre du comité de rédaction de la revue Multitudes, il collabore régulièrement aux revues Rue Descartes et Ctheory. Auteur d'un essai sur Martin Heidegger, il s'intéresse aux questions de biopolitique, d'immunopolitique et d'écologie politique.

Source : Wikipédia
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Citations et extraits (9) Ajouter une citation
Frédéric Neyrat
... des dangers dont la liste était régulièrement actualisée par le Ministère du Danger, dont le slogan était : « Là où croît le Danger, croît le Ministère ».
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Politique du laisser-être

Pour saisir cette orientation politique, passons un instant par le double chinois du laisser-être : le non-agir (wu-wei). « L'empereur Shun a donné à Kun, père de Yu le Grand, la mission de protéger l'empire des inondations. Les barrages et digues que Kun fit construire retinrent un moment les eaux, puis rompirent ou débordèrent et causèrent plus de dégâts qu'une inondation normale. Constatant cet échec, Shun bannit Kun et confia à Yu le Grand la tache de faire cesser les inondations. Là où le père échoua, le fils réussit : Yu le Grand aida les eaux à suivre leur nature, c'est-à-dire à s'écouler vers la mer. Il fit creuser des canaux et les inondations cessèrent ». Jean-Jacques Lafitte a bien raison de faire de Yu le Grand, « héros des taoïstes », un « modèle des écologistes ». [J.-J. Lafitte, Introduction à Tchouang-Tseu, Le rêve du papillon, Paris, Albin Michel, 2002, p. 12] Et il nous faudrait commenter l'ensemble de ce texte. La nature ne désigne pas ici une donnée fixe, mais un mouvement (aller vers la mer). Et la solution taoïste ne consiste pas à s'abstenir d'agir, plutôt à s'abstenir de contrer le mouvement de l'aller-vers-la-mer par une pure décision de la volonté, pure décision volontariste induisant une technique non seulement inefficace, mais plus encore aggravante. Le non-agir n'a rien de technophobe, il suppose simplement au préalable une certaine réceptivité au devenir de l'être, à sa transition – ici, le mouvement des eaux. Une transition à laisser-être. Là où le laisser-faire mène au faire-sans, le laisser-être est faire-avec, ou co-opération.

Mais ce modèle souffre un défaut par rapport à notre propos, et notre époque : ce n'est pas seulement d'un désastre naturel dont il faut se protéger, mais de désastres stimulés, provoqués par une production techno-industrielle – ainsi la question du changement climatique. Nous avons parlé de forçage pour décrire une forme singulière de production désastreuse. Le forçage ne laisse pas être, il empêche l'être d'être. C'est donc d'un laisser-être au carré dont nous avons besoin, qui empêche d'empêcher. Qui empêche d'empêcher les sociétés de s'auto-organiser, les êtres humains de vivre de leur co-opération et de créer leurs propres défenses à partir du rapport de co-opération avec les non-humains. Qui empêche d'empêcher les paysans d'utiliser les semences venant de leurs propres récoltes. Qui empêche d'empêcher ces semences d'être auto-reproductibles, c'est-à-dire vivantes. Etc. C'est toujours l'auto-organisation qu'il s'agira de laisser-être. Et l'injustice est toujours une destruction de la possibilité de s'auto-organiser.

(p. 205)
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Objectif : libérer la Terre et révéler ainsi un univers alien, radicalement non-anthropocentrique afin de reformuler l'humanité. C'est donc vers un retournement ontologique majeur que ce livre se dirige : poser l'alien - le zéro, le Noir - à l'origine est renverser la hiérarchie de l'Anthropocène, rendre le monde définitivement étranger, poser un préalable négatif avant toute réalisation technologique, l'impossible avant le possible, le mythique et le magique avant le technologique.
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Une terre habitable

Mais cette terre ne devient habitable qu'en tant que seconde. Comme l'a parfaitement montré Michel Haar, la terre est, pour Heidegger, de l'ordre d'un « soubassement non fondatif » [M. Haar, Le chant de la Terre, Paris, L'Herne, 1985, p. 134]. C'est ce que signifie pour Heidegger la formule de Hölderlin : « … L'homme habite en poète... ». La poésie, écrit Heidegger, (donc) la poésie de Hölderlin ne « survole pas la terre, elle ne la dépasse pas pour la quitter et planer au-dessus d'elle. C'est la poésie qui tout d'abord conduit l'homme sur terre, à la terre, et qui le conduit ainsi à l'habitation ». Pour employer le lexique deleuzo-guattarien, la terre seconde, c'est la Grande Déterritorialisée. Car la terre première doit être poétisée pour devenir support, pour devenir sur-la-terre : « ce que veulent dire les mots « sur la terre » ne subsiste que pour autant que l'homme habite la terre et, en habitant, laisse la terre être comme terre ». Cet énoncé est fondamental : il n'est aucun accès direct à la terre-nature, qu'on ne peut laisser-être qu'en s'en étant détaché, qu'en étant « sur » elle et non « dans ». Réponse par anticipation à ceux qui voudraient faire de la biosphère un méga-dedans-matriciel.

(p. 161)
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La solution ne serait donc pas de « refaire » la Terre, mais de « défaire » les liens par lesquels nous considérons que nous en sommes propriétaires.
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Les "contre-futurs" des Afrofuturistes cherchent à réécrire le passé en y diffusant leur art, leur technique cosmique à la fois marquée par le jeu radical et le désastre racial. En percevant le cosmos comme promesse d'un monde qui ne les rejetterait pas, les Afrofuturistes cherchent à réinventer la Terre, pour qu'elle ne soit plus cette planète qui fut pour eux inhabitable.
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J'ai appris des manières de s'ouvrir à l'autre qui finissent par étouffer l'autre : il existe aujourd'hui une sorte d'Afrofuturisme blanc (pour reprendre l'expression du géographe Keith Woodward), un Afrofuturisme récupéré par l'industrie blanchie du spectacle, qui cherche à exploiter la mine Noire.
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Désormais, demander l'impossible est la moindre des choses, la seule issue possible- voilà ce que nous disent les Anges Noirs de l'histoire, ces intercesseurs entre futur et passé, espace extra-terrestre et terrestre, désespoir et révolte.
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L'Afrofuturisme exprime avec mille voix le message suivant : les révolutions antérieures n'ont pas suffi.
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