THÈMES ET PERSONNAGES :
* ARGENT : son pouvoir est là, partout. C’est lui qui domine la vie humaine et sans lui, l’homme est bien peu de choses.
* BALZAC et le cousin Pons, une référence positive de Gissing, qui a passé la fin de sa vie à Saint-Jean-de-Luz.
* PAUVRETÉ : loin de tout romantisme, l’auteur nous montre ses affres et ses épreuves ; peu de choses lui résistent.
* MARIAGE : le romancier était assez bien placé pour en faire la critique ; une convention, et, au moins sans argent, un chemin de croix.
* HUMOUR : un humour assez noir, très anglais, perce par moments, souvent pour se moquer des écrivains.
* GRUB STREET : c’est un peu la bohème, la rue des artistes, des fauchés, des sans le sou. Bizarrement cela me rappelle un peu Moll Flanders et ses calculs constants de sa fortune.
* CHEF-D'ŒUVRE : pour décrire sans complaisance vie et amour, ainsi que le pouvoir de l’argent et atteindre une forme de « vérité ».
Attention, certains vont vouloir s’arrêter ici, car je vais faire un RÉSUMÉ :
Jasper Milvain est écrivain de son état, modeste pour l’instant, mais conscient du pouvoir de l’argent et de la nécessité d’en avoir. Il a deux sœurs, Maud et Dora, qui enseignent, et une mère, qui a du mal à les entretenir, à Finden.
Dans la ville la plus proche, Wattleborough, vivent les Yule dont l’oncle, le riche John, son frère Alfred, homme de lettres établi à Londres, la fille d’Edmund, l’autre frère décédé, Amy, mariée à Ray Rearden également homme de lettres.
Alfred a une fille, Marian, qui l’aide dans ses travaux et fait la connaissance de Jasper, dont elle tombe amoureuse.
Mrs Milvain meurt et Jasper fait venir ses sœurs à Londres où elles se lient d’amitié avec Marian.
Les Reardon vivent dans la misère, Ray ne parvenant pas au succès, jusqu’à ce qu’Amy ne le supporte plus et parte. Ray trouve un poste d’employé.
Parmi les autres amis de Jasper, il y a en un, Biffen, qui écrit un roman qu’il qualifie de chef-d’œuvre, mais qui se vend mal. Un autre, Whelpdale, qui ne réussissait pas à être publié, donne des conseils aux jeunes romanciers puis lance son magazine avec un succès relatif. Il épousera Dora.
Maud, très belle, fait un mariage dans la haute société.
Au décès de John, Marian est censée hériter : Jasper se fiance alors avec elle.
Amy hérite effectivement, mais avant de mourir, comme leur fils, Ray aura à peine le temps de se réconcilier. Biffen devenu proche de Ray, aime Amy sans espoir et se suicide.
Alfred Yule, déjà pauvre et sans succès, perd la vue et Marian son héritage.
Jasper, qui a tenté sa chance auprès d’une riche veuve, rompt ses fiançailles et se marie avec Amy.
Marian supporte son père tant bien que mal jusqu’à son décès puis obtient un poste chez un éditeur. Quant à Jasper, grâce à sa fortune, il devient bientôt rédacteur en chef et « riche ».
Tout cela m’a paru bien romanesque.
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Pourquoi, alors que je voulais faire connaissance avec l’œuvre de George Gissing, forte de 23 romans, avoir arrêté mon choix sur cette courte nouvelle ? Pour une raison toute simple et fort triviale. C’est qu’il s’agit là, sauf erreur de ma part, du seul ouvrage de cet auteur qui soit actuellement disponible en français. Même Gallica, du haut de ses huit millions de textes et documents tombés dans le domaine public, s’avoue incapable de satisfaire la demande.
On peut découvrir un début d’explication, me semble-t-il, à cet ostracisme littéraire dont il fait l’objet en France et dont il a longtemps fait l’objet, à des degrés divers, en Grande-Bretagne, dans « Le destin et l’apothicaire ». Il y a en effet là un personnage auquel il est très difficile de s’identifier. Peu sympathique, hargneux, vindicatif, il accumule les échecs. Il les suscite par son comportement et, incapable, de se remettre en question, il en rend responsable le monde entier, à commencer par ses clients, ce qui ne peut évidemment que déboucher sur un désastre.
Pour autant que j’aie pu en juger à la lecture des études qui lui sont consacrées, nombre de ses personnages sont conçus sur ce même modèle et il fait très souvent preuve d’un pessimisme qui ne rend guère ses textes attrayants. Ce qui ne les empêche pas de présenter un grand intérêt tant par la peinture de la réalité sociale qui les sous-tend que par la place privilégiée que la femme y occupe.
Encore faudrait-il pouvoir juger sur pièces et que cette œuvre soit enfin traduite en français.
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Une intrigue basique : une famille "de bonnes origines" peu argentée reçoit chez elle moyennant finances une jeune fille de parvenus, donc aux manières beaucoup plus rudimentaires qui, de plus, cherche à se marier.
Que va-t-il se produire ? Comment vont-ils cohabiter (ou pas) ? Je n'en dirai pas plus...
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Que dire? Un grand classique de la littérature anglaise de la seconde partie du dix-neuvième siècle par un auteur injustement méconnu qui, de plus, a vécu les dernières années de sa vie en France et y est décédé, marié avec une Française.
"New Grub Street" (Grub Street est le nom d'une mythique rue de Londres habitée en grande partie par des artistes) est souvent considéré comme le chef d’œuvre de Gissing et il y parle assez directement du nœud du problème : l'argent, en l'opposant à l'art. Mais l'opposition n'est que technique et l'argent gagne à tout coup, c'est la loi. Et s'opposer à cette loi conduit Biffen à sa perte, tandis que Jasper, présenté comme le héros, se sort de l'ornière en faisant un bon mariage in extremis (alors qu'il était épris d'une fille plus pauvre) et en parvenant à un poste de rédacteur en chef. La valeur artistique est également traitée sans complaisance : certes, le roman de Biffen reçoit le qualificatif de "chef d’œuvre" mais ceux d'autres personnages épris de pureté artistique (comme Yule ou Reardon) en sont loin, tandis qu'on nous parle peu, au fond, des écrits de Jasper. L'amertume ou le réalisme de Gissing s'approche plus tard de la parodie dans "Will Warburton", mais c'est une autre histoire...
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Brève critique, qui à vrai dire ne peut qu'être positive : en format Kindle, celui que j'ai lu, le livre était gratuit. Pour le reste, Gissing, presque à son meilleur dans une nouvelle assez longue (une centaine de pages environ) sur un de ses sujets majeurs : les différences sociales, pour ne pas dire de classe(s). On peut aussi lire cette nouvelle comme un thriller : la tension monte progressivement et on se demande si oui ou non, un drame finira par avoir lieu ou si... Mais, non, je ne dirai rien de plus.
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