Certes, Homère, Shakespeare, Cervantès ou Flaubert traversent tranquillement le temps à l'abri des fluctuations de la mode. Mais l'ombre qu'ils font à des auteurs moins cotés a quelque chose d'exagéré et d'artificiel. La littérature n'est pas la bourse ni une course de chevaux. Lisons les chefs-d'oeuvre (évidemment !), mais allons voir aussi ailleurs, dans les coins délaissés où nous attendent une infinité de livres prêts à sortir du grand oubli dans lequel l'histoire littéraire officielle les a ensevelis. Même s'il n'y a pas eu d'injustice pour tels romans ou essais réputés médiocres, le lecteur curieux peut y trouver encore de quoi réfléchir ou rêver. Leur lecture n'est pas du temps perdu, car elle permet une vision plus large et plus réaliste de la littérature et des aspects multiformes de l'esprit humain ; les vrais chefs-d'oeuvre n'en seront que plus appréciés. (p. 153)