Elle s’appelle Magda. Elle n’est pas très âgée,mais ses enfants sont partis au loin et elle est veuve depuis longtemps. Elle sort rarement de la maison, sinon pour faire les emplettes.Elle pourrait passer par le centre du parc,mais elle fait plutôt le tour. La vue des enfants qui jouent provoque en elle un sentiment de solitude presque insupportable, moins pourtant que celle des amoureux ou des couples qui passent en se tenant la main. Aujourd’hui, comme toujours, elle suit le trottoir qui borde le parc. Elle se sent vieille,un peu inutile. Soudain, un léger étourdissement lui fait perdre l’équilibre, elle s’adosse à un lampadaire et glisse lentement au sol. Elle pourrait se lever, mais elle se retient. Elle gémit un peu. Des gens passent à côté d’elle. Ils se rendent au travail ou font des courses.Tous semblent pressés sur le trottoir. Ils regardent un instant Magda, assise sur le sol et adossée au lampadaire, mais ils poursuivent leur chemin sans réagir.
Modesto la voit par terre. Il vient près de s’arrêter, mais il n’ose pas. Il passe son chemin.Il fait cinq pas ; quelqu’un s’en occupera. Il fait dix pas ; il regarde derrière lui. Il fait vingt pas... il est déjà loin. On ne le voit plus.
Aujourd'hui, comme à l'accoutumée, elle emprunte le trottoir, qui longe le parc.