Hans Holbein, le peintre chouchou d'Henri VIII.
Son nom évoque le nom d'Albert Durer, comme celui de Durer évoque le sien ; ainsi la tradition se plaît-elle à rapprocher deux artistes dont la chronologie et la communauté d'origine ne sauraient atténuer les différences profondes. Durer est fils du Moyen-Age; son génie âpre et ultra-romantique se complaît dans un symbolisme ardent, fanatique même ; il vît pour l'idée qui chez lui maîtrise toujours la forme, la dépasse parfois; Holbein, merveilleux d'équilibre et de pondération, réaliste sans excès, épris seulement de nature et de vérité, apparaît comme un des fruits les plus savoureux de la Renaissance. Durer représenta noblement sa patrie et son temps; Holbein illustre l'art universel et l'humanité.
Rentré à Bâle, il songea à s'établir et s'y employa avec une sagesse qu'on n'attendrait pas de son âge — il avait vingt-deux ans — ni de ses antécédentes un peu légers ; mais il possédait un esprit très pratique ; et d'ailleurs ses bons amis , Erasme et les imprimeurs, durent y tenir la main. En quelques mois il était affilié "Au Ciel ", confrérie la plus importante des peintres bâlois, en devenait dignitaire, se mariait — mariage de raison — acquérait droit de bourgeoisie ; toutes promotions sociales ou professionnelles destinées à consolider sa situation , à dégager son génie de toute entrave officielle ou matérielle.
Si Holbein n'avait représenté que des personnages inconnus, bourgeois et bourgeoises d'Allemagne, de Suisse ou d'Angleterre, il faudrait bien s'en tenir aux témoignages des contemporains, à la technique réaliste du peintre, au caractère de sincérité qui se dégage de son œuvre pour affirmer la parfaite ressemblance — ressemblance physique et morale — de ses modèles et de ses portraits; mais il a aussi fixé sur la toile nombre de personnages historiques dont le caractère essentiel, qui apparaît dans l'image, est précisément celui que l'histoire leur assigna; par exemple, Erasme, Henry VIll, Jeanne Seymour en font foi.
Il ne peu être question ni de Holbein ni de la Danse des Morts. Bien que ces deux sujets n'aient peut-être pas encore été traités d'une façon réellement définitive, ils sont trop beaux et trop énormes pour ne pas leur épargner de ne donner à propos d'eux que quelques indications générales aussi rebattues qu'incomplètes, et par là fort inutiles. L'Alphabet où Holbein a figuré la Mort entraînant les personnages de tous les états doit être le seul objet de cette note.
Bon, on verra ça à Pâques pour le Christ mort d'Holbein