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Citation de Woland


[...] ... A cette saillie, qui n'était pas sans fondement, Hulot lui-même ne put s'empêcher de partager l'hilarité générale. En ce moment, Merle avait achevé de faire ensevelir les morts, et les blessés avaient été, tant bien que mal, arrangés dans deux charrettes par leurs camarades. Les autres soldats, rangés d'eux-mêmes sur deux files le long de ces ambulances improvisées, descendaient le revers de la montagne qui regarde le Maine, et d'où l'on aperçoit la belle vallée de la Pèlerine , rivale de celle du Couësnon. Hulot, accompagné de ses deux amis, Merle et Gérard, suivit alors lentement ses soldats, en souhaitant d'arriver sans malheur à Ernée, où les blessés devaient trouver des secours. Ce combat, presque ignoré au milieu des grands événements qui se préparaient en France, prit le nom du lieu où il fut livré. Cependant, il obtint quelque attention dans l'Ouest, dont les habitants, occupés de cette seconde prise d'armes y remarquèrent un changement dans la manière dont les Chouans recommençaient la guerre. Autrefois, ces gens-là n'eussent pas attaqué des détachements si considérables. Selon les conjectures de Hulot, le jeune royaliste qu'il avait aperçu devait être le Gars, nouveau général envoyé en France par les princes, et qui, selon la coutume des chefs royalistes, cachait son titre et son nom sous un de ces sobriquets appelés noms de guerre. Cette circonstance rendait le commandant aussi inquiet après sa triste victoire qu'au moment où il soupçonna l'embuscade, il se retourna à plusieurs reprises pour contempler le plateau de la Pèlerine qu'il laissait derrière lui, et d'où arrivait encore, par intervalles, le son étouffé des tambours de la garde nationale qui descendait de la vallée du Couësnon en même temps que les Bleus descendaient dans la vallée de la Pèlerine.

- "Y a-t-il un de vous," dit-il brusquement à ses deux amis, "qui puisse deviner le motif de l'attaque des Chouans ? Pour eux, les coups de fusil sont un commerce, et je ne vois pas encore ce qu'ils gagnent à ceux-ci. Ils auront au moins perdu cent hommes, et nous," ajouta-t-il, en retroussant sa joue droite et en clignant des yeux pour sourire, "nous n'en avons pas perdu soixante. Tonnerre de Dieu ! Je ne comprends pas la spéculation. Les drôles pouvaient bien se dispenser de nous attaquer, nous aurions passé comme des lettres à la poste, et je ne vois pas à quoi leur a servi de trouer nos hommes." Et il montra, par un geste triste, les deux charrettes de blessés. ""Ils auront peut-être voulu nous dire bonjour," ajouta-t-il.

- Mais, mon commandant, ils y ont gagné nos cent-cinquante serins," répondit Merle.

- Les réquisitionnaires auraient sauté comme des grenouilles dans le bois que nous ne serions pas allés les y repêcher, surtout après avoir essuyé une bordée," répliqua Hulot. "Non, non," reprit-il, "il y a quelque chose là-dessous." Il se retourna encore vers la Pèlerine. "Tenez," s'écria-t-il, voyez ?"

Quoique les trois officiers fussent déjà éloignés de ce fatal plateau, leurs yeux exercés reconnurent facilement Marche-A-Terre et quelques Chouans qui l'occupaient de nouveau.

- "Allez au pas accéléré !" cria Hulot à sa troupe, "ouvrez le compas et faites marcher vos chevaux plus vite que ça. Ont-ils les jambes gelées ? Ces bêtes-là seraient-elles aussi des Pitt et Cobourg ?"

Ces paroles imprimèrent à la troupe un mouvement rapide.

- "Quant au mystère dont l'obscurité me paraît difficile à percer, Dieu veuille, mes amis," dit-il aux deux officiers, "qu'il ne se débrouille point par des coups de fusil à Ernée. J'ai bien peur d'apprendre que la route de Mayenne nous est encore coupée par les sujets du roi." ... [...]
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