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Citation de MarianneL


Tout juste le récit achevé, Adelphe Delalande sort la blague à tabac de la poche de son gilet et bourre sa pipe avec méthode. Il l’allume, la glisse entre ses lèvres et aspire des bouffées voraces qui forment un halo de volutes opaques, une sorte de voile sur l’embarras. Dimanche dernier, déjà, quand elle lui a offert le livre sur le parvis du temps, il s’est empourpré sans raison. D’ordinaire il reçoit les cadeaux de ses paroissiennes de bonne grâce, avec le sourire facile, le remerciement aisé. Lorsqu’il s’agit d’une bouteille de vin, il souligne avec malice les vertus d’un petit verre sur son âme en cas de turbulence. Ce jour-là, quelque chose sortait de l’ordinaire, les yeux de Gabrielle étaient arrimés aux siens d’une étrange façon. Une manière de faire qu’il ne lui connaissait pas, la paupière haute, volontaire et le chignon mal arrangé, des mèches blondes éparpillées sur un visage d’ange. C’est une sauvageonne qui lui tend le Goncourt de l’année, un roman d’Ernest Pérochon, en sifflant qu’il est édifiant. Sans doute y trouvera-t-il matière à sermon… Il a souri, d’un rictus emprunté, le cœur n’y était pas, seulement la pratique, une longue et patiente bienveillance acquise à force de saluer les fidèles à l’issue du culte chaque dimanche que le Seigneur a fait, avec parfois des surprises. Le geste de la jeune femme en était une.
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