Je me mets au travail et le monde entier disparaît, c’est aussi simple que ça. Ne compte plus cet effort pour trouver un équilibre entre la pierre et moi, le mouvement régulier de la massette sur le ciseau, précis. Si je fais la délicate, la pierre ne réagit pas. Si je frappe en force, je creuse des petits trous très laids. Et tout dépend aussi de l’inclinaison de mon ciseau à bord droit. Au début, je l’ancre mal, il dérape et glisse sur la pierre. Je cherche l’angle idéal pour l’attaquer sans l’abîmer. Ça me prend une petite demi-heure et puis je trouve un rythme. Ça marche un temps, mais c’est provisoire, la pierre change, elle demande plus ou moins de puissance, j’enlève mes gants de temps à autre pour la sentir avec la paume de ma main. Il me semble l’entendre qui répond, plus douce, il faut la reprendre à certains endroits, là où ça pointe, je m’y remets aussitôt.