Les raisons qui animèrent les fondateurs des bastides ont été de différents ordres :
Les desseins politiques
L’aspect politique a joué son rôle et s’est même révélé très souvent primordial. La rivalité franco-anglaise qui régnait en Aquitaine s’est manifestée aux confins de l’Agenais et les Capétiens aussi bien que les Plantagenets ont cherché à « marquer » leur territoire. En 1225, Alphonse de Poitiers avait déjà fait construire Montréal, véritable sentinelle face aux anglais. Ces derniers ayant de leur côté pris possession de l’Agenais en 1279, s’efforcèrent d’étendre leur domaine. De 1280 à 1289, ils fondèrent à leur tour Arouille, Mauvezin, Larée, Lias, Saint-Gein. Pendant ce temps, Eustache de Beaumarchais continuait à ériger de nouveaux villages pour le roi de France à Beaumarchès, Miélan, Mirande, Fleurance etc… Et la compétition entre les deux partis se poursuivit au cours des décennies suivantes.
La sécurité
Au Moyen Age, les problèmes de sécurité étaient particulièrement importants et ils semblent, eux aussi, avoir dans certains cas influencé les fondateurs.
A la ville ou à la campagne, les vols, pillages et agressions étaient plutôt fréquents. Monsieur Curie-Sembres, qui en son temps avait examiné les raisons des fondations, avait déjà retenu ce motif d'implantation. Il l’affirmait d'ailleurs en ces termes :
« Il y a à remarquer que si les titres initiaux des bastides énoncent comme motif de leur établissement la nécessité de purger ces lieux de la présence d'hommes sans aveu, adonnés au brigandage, c'était parce que les malfaiteurs, pour être mieux en sûreté, se regroupaient sur des frontières indécises et contestables. »
Au XIIIe siècle, en effet, les routes souvent mal entretenues étaient peu sûres. On parlait de coupeurs de bourses, de bandes de pillards constitués d'anciens soldats et de routiers qui désolaient le pays. On racontait qu'à l'époque ils s'abritaient dans les zones boisées et survenaient à l'improviste pour rançonner les voyageurs. Ce phénomène se vérifiait tout particulièrement en Armagnac et en Astarac dont certaines parties étaient recouvertes de forêts et de marécages. Les hors-la-loi y vivaient dans une certaine impunité et sortaient de leur repère pour saccager les récoltes et piller les fermes et les églises. Un climat d'insécurité s'était instauré en de nombreux endroits. Les autorités locales ont voulu remédier à cette situation en protégeant la population au sein de nouveaux villages.
En Armagnac, par exemple, l'emplacement de Marciac était occupé au début du XIIIe siècle par une grande forêt de marécages et lorsque l'abbé de la Case-Dieu signa un acte de paréage avec le roi pour y créer une bastide, il cherchait essentiellement à déloger les brigands et les voleurs qui séjournaient dans la région. La tradition rapporte aussi que non loin de là Montfort a été érigée entre Mauvezin et Lectoure pour réprimer le brigandage et mettre fin à l'insécurité dont souffrait la population locale.
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... il arrivait que les serfs fussent affranchis par les Templiers, ces derniers se montrant alors - tout comme les fondateurs des bastides - des précurseurs en la matière. Ce fut le cas à Montricoux, en Quercy, où avant l'arrivée des Templiers, les habitants bénéficiaient de statuts très contraignants : ils n'avaient aucune garantie sur leur liberté personnelle ou sur le droit de propriété ; ils ne pouvaient guère sortir des terres seigneuriales ; ils n'avaient pas non plus la possibilité de marier leurs enfants ou d'envisager pour eux l'entrée dans les ordres religieux sans l'autorisation du seigneur. Les frères du Temple leur offrirent de nombreuses libertés...
LE MEURTRE DE LA FAUSSE SORCIERE EN BIGORRE
En avril 1850, près de Vic-de-Bigorre, dans les Hautes-Pyrénées, Jeanne Bedouret fut invitée par ses voisins, les Subervie, qui se croyaient victimes d'un mauvais sort. Elle fut reçue par la maîtresse de maison, qui l'agressa par ces paroles : "Tu vas brûler jusqu'à ce que tu nous aies délivrés." Et, joignant le geste à la parole, son mari et elle la mirent dans le four avant de la retirer, épouvantés par ses cris. La pauvre Jeanne Bedouret, souffrant de graves brûlures, se traîna jusque chez elle et succomba cinq jours après. Encore une mort provoquée par de fausses accusations...
D'autres églises templières aux chapiteaux ouvragés, aux portes ornées de sculptures et aux murs recouverts de peintures réservent aussi des surprises. À Montsaunès, un chapiteau représente le Christ bénissant, entouré de deux femmes agenouillées qui le servent. Certains pensent qu'il s'agit là du miracle de la guérison de la sage-femme, lavant un enfant à sa naissance. Mais il est troublant de constater que cette scène ne figure que dans des évangiles apocryphes.
... la plupart des établissements templiers ont été des exploitations agricoles qui ont participé à la mise en valeur du sol entre les XII° et XIV° siècles. Ils ont été complétés par des « enclos », à la vocation légèrement différente, dans diverses grandes cités. Mais les moines-soldats se sont aussi révélés en tant qu'urbanistes. Ils ont donné naissance à un certain nombre de nouveaux villages, participant ainsi au peuplement des zones rurales.
Dans les régions de production ovine, les Templiers semblent s'être livrés à la fabrication de fromages. Ce fut le cas notamment sur le territoire aveyronnais. À l'image des Hospitaliers de Saint-Felix, les Templiers de Sainte-Eulalie furent des promoteurs en matière d'industrie fromagère et certains disent qu'ils furent à l'origine du roquefort.