Moi j'aime pas quand on me dit qu'il n'y a rien à craindre, c'est là que je commence à flipper...
- Hé, Sybille, ça va ? T'es blanche comme un Lexomil de fin de show-room. Limite verte. J'ai failli te confondre avec le ficus du hall.
A la jonction de deux autoroutes, la commune d' Aulnay-sous-Bois était emprisonnée entre deux zones aéroportuaires internationales, Le Bourget et Charles-de-Gaulle. Des millions de passagers passaient tous les jours au-dessus des barres d'immeubles, et longeaient les façades tristes de l'un des quartiers les plus pauvres et criminels de la banlieue parisienne.
- Oh My God. Partir au soleil en plein hiver, j'avais pas prévu, je suis au bout de ma vie.
- Mais pour nous ça va, hein, comment elles vont faire, aux RH, elles ont tellement de cellulite qu'elles vont bronzer en pointillé.
Comme tous les autres je suis un outil. Quand un outil est précieux, on en prend soin, on l'entretient, on le bichonne. Quand un outil est obsolète, on s'en débarrasse.
En rentrant à Paris, elle filerait chez Muhlstein et lui collerait sa démission avec plaisir et soulagement. Tant pis pour ses rêves d'ascenseur social. La jolie Sénégalaise de la cité des Trois-Mille à Aulnay-sous-Bois ne se ferait jamais un nom dans la mode parisienne, mais au moins elle garderait les valeurs transmises par l'oncle et la tante qui l'avaient élevée.
L'organigramme. La hiérarchie. Le secret. Le dessein qui les dépasse mais qu'ils servent avec ardeur, soldats misérables d'une armée qui tourne en rond, trop occupée à contempler sa propre splendeur pour prendre conscience de sa décadente vanité.
Il rêvait Thierry la fronde, il s’est réveillé Thierry la frousse. Il a eu le mérite d’attirer l’attention, au moins. Le SUT n’est pas réputé pour sa pusillanimité. Une épine de plus dans le pied déjà meurtri de la direction. L’Inspection du travail de devrait pas tarder à faire sonner la cavalerie, et les liens prêts à rompre face à la menace de l’Institution.
A force d’exécuter sans réfléchir, les neurones se grippent.
Angelo, Sophie et tout l’état-major de cette armée d’ovins bêlant à l’unisson ont longtemps su entretenir l’illusion la plus grisante qui soit : « Chacun de vous contribue à l’effort collectif, par la singularité de son parcours et par la richesse de sa personnalité. »
Ils n’ont, pour la plupart, plus la force de crier. Les plus résistants trouvent encore la ressource pour gémir. Je les hais. Je les plains mais je les hais. Je ne les connais pas tous. Il y en a même que je n’avais jamais vus auparavant. Tant pis. Il est trop tard pour renoncer. Ils paieront pour les autres, et comme les autres.