Citations de Jasmine Warga (49)
Et j'ai envie que ça dure, envie de continuer à ressentir les choses, même les émotions les plus cruelles et les plus douloureuses. Car ce sont les émotions qui nous font savoir qu'on est vivant.
D'une certaine manière, ta tristesse est si profonde et pesante que tu as peur qu'elle étouffe ceux qui t'entourent si tu les laisses trop s'approcher.
- Je t'interdis de mourir sans moi.
Je me fais une promesse : je serai plus forte que ma tristesse.
Ce n'est plus une personne avec qui je veux mourir mais la personne avec qui je veux vivre.
Ses yeux noisette sont grands ouverts mais éteints. Pour la première fois, j'en ai l'intime conviction. FrozenRobot ne plaisante pas : il veut mourir.
Les gens passent leur temps à rabâcher que "le suicide, c'est la voie des lâches". Et je suppose qu'ils n'ont pas tort. Moi, en l’occurrence, j'abandonne, je capitule.
Si tous les jours ressemblaient à celui-ci, je ne crois pas que je serai si pressée d'en finir. Le problème, c'est que la neige au mois de mars, c'est un miracle. Or on ne peut pas passer sa vie à attendre un miracle.
Il y a bien des étoiles mortes, c'est sûr. Mais elles au moins, avant de mourir c'étaient des étoiles.
Et leur mort à donné lieu à une supernova. Ma mort ne méritera sûrement pas le nom de supernova. Il n'y aura personne dans les parages pour voir mon énergie s'éteindre.
- Tu es comme un ciel gris : belle sans le vouloir.
La dépression fait partie intégrante de vous ; elle s’infiltre dans vos os, dans vos veines. S’il y a bien une chose que je sais à ce sujet, c’est ça : on n’y échappe pas.
" Je passe beaucoup de temps à me demander si la mort produit le même effet, la même résonance, si comme ces notes de musique, j'exploserai moi aussi en vol en poussant un dernier cri de douleur avant de me taire pour toujours. Ou si, à l'inverse, je me transformerai en parasite presque inaudible et pourtant incessant, si on tend bien l'oreille... "
" Je n'ai aucune envie d'être prudente mais plutôt de pousser un dernier coup avant de lâcher prise, voltiger et m'écraser par terre.
- Je t'interdis de mourir sans moi, ajoute-t-il tout bas. "
" J'aimerais bien que la grosse limace s'active et me débarrasse de ma gêne. Allez, à un moment donné, il va falloir qu'elle soit plus gloutonne que ça."
" La femme qui tient le stand lève un doigt maigrelet pour indiquer qu'il a marqué un point. Merci pour cette précision. On sait compter jusqu'à un. On est suicidaires, pas ignares. "
Je m'éloigne vers une des balançoires, agrippe ses chaînes de suspension et m'assieds sur son siège en métal tout écaillé. Allongeant et repliant les jambes en cadence, je tente de m'élever le plus haut possible. Si je me donne à fond, je finirai peut-être par m'envoler et mon énergie cinétique me propulsera hors de cet univers. Il y a peu de chance pour que ça arrive, mais on a le droit de rêver.
Roman reste silencieux et s'assied sur la balançoire voisine. Elle oscille sous son poids sans même qu'il remue les jambes.
Ma balançoire grince de plus en plus à mesure que je prends de la hauteur.
- Attention, prévient-il.
- A quoi ?
Je n'ai aucune envie d'être prudente mais plutôt de pousser un dernier coup avant de lâcher prise, voltiger et m'écraser par terre.
Je me glisse au fond de mon lit. Je rabats la couette anthracite sur ma tête et fais comme si j'étais au beau milieu de l'océan en train de boire la tasse sous le fracas des vagues pendant que l'univers entier sombre dans le néant. J'essaie d'imaginer mon énergie potentielle devenant tour à tour énergie cinétique puis énergie nulle. Tout en fredonnant le Requiem de Mozart, je me demande ce qu'on ressent quand toutes les lumières s'éteignent et que le silence éternel se fait. J'ignore si ça sera douloureux et si j'aurai peur durant les derniers instants, mais je croise les doigts soit vite réglé, paisible et définitif.
Les poings serrés le long du corps, je me force à dépasser la plaque et pénètre dans le gymnase. Tandis que le soleil répand sa lumière sur le parquet ciré, je me demande sur qui mes camarades déverseront toute leur haine, leur colère et leur peur quand je ne serai plus là.
Vivement que je ne sois plus là.
Accoudée sur la table devant moi, je voudrais pouvoir me fondre dans son plastique gris et me transformer en un alliage synthétique de polymètres insensible et inanimé. Sous le poids de mon corps, je sens qu'un bleu commence à endolorir mes coudes tandis que je fredonne tout bas la Toccata et Fugue en ré mineur de Bach. Accaparée par les notes sombres et pesantes de l'orgue, j'imagine les touches du clavier s'agencer en forme d'échelle, une échelle qui mènerait à un endroit paisible, désert, loin d'ici, loin de tout et de tout le monde.
La musique, surtout la musique classique, et en particulier le Requiem en ré mineur de Mozart, possède une énergie cinétique. Si on écoute bien, dès le début on entend l'archet du violon trembler sur les cordes, prêt à mettre le feu aux notes, à les faire naître. Et une fois qu'elles retentissent, ces notes se téléscopent, jettent des étincelles, volent en éclats.
Je passe beaucoup de temps à me demander si la mort produit le même effet, la même résonnance, si comme ces notes de musique, j'exploserai moi aussi en vol en poussant un dernier cri de douleur avant de me taire pour toujours. Ou si, à l'inverse, je me transformerai en parasite presque inaudible et pourtant incessant, si on tend bien l'oreille.
L’amour se résume peut-être à ça : avoir quelqu’un d’assez aimant pour nous prêter attention et nous donner envie d’avancer, de changer et de faire des étincelles avec notre énergie potentielle pour la transformer en énergie cinétique. On a peut-être juste besoin, tous, que quelqu’un nous remarque et s’intéresse à nous.
Parfois il faut voir une personne extérieure chez soi pour se rendre compte de la façon dont on vit.
Bien qu’elle n’ait jamais participé aux concours de beauté du Kentucky, elle a cependant appris à jouer la comédie. Quand il s’agit d’afficher un sourire jovialissime alors qu’en réalité elle a envie de pleurer, ou de répondre d’une voix calme et mesurée alors qu’elle voudrait hurler, c’est la reine. Parfois j’aimerais bien qu’elle pique une colère. Cette manie qu’elle a de toujours faire comme si tout allait bien ne fait que me donner l’impression d’être encore plus cinglée que je ne le suis déjà.