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Citations de Jean-Claude Fournier (68)


Des barricades avaient été dressées, ce qui avait entraîné plus de violences encore pendant la nuit, ainsi que des arrestations et des sanctions contre treize étudiants ayant participé à ces affrontements. En d’autres temps, les bourgeois des beaux quartiers, témoins de ce « désordre », eussent applaudi la police. Mais pour une fois, ce n’étaient pas des ouvriers qui battaient le pavé. Il s’agissait de jeunes gens de bonne famille envers lesquels les riverains du Boul’ Mich’ ressentaient une solidarité de classe. Ils n’approuvaient certes pas les slogans entendus ou lus sur les banderoles, ni surtout le fait que des pavés fussent déterrés et jetés sur les CRS. Ces derniers avaient fait preuve d’une brutalité sur laquelle les habitants du 5e arrondissement auraient pudiquement fermé les yeux si elle avait été dirigée contre des prolétaires venus de la banlieue. Mais ils ne comprenaient pas cette répression lorsqu’elle frappait leurs chères têtes blondes, les futures élites de la nation. Ils avaient assisté, hébétés, au matraquage de leur progéniture et avaient pris parti pour les manifestants. En ces gamins, ils croyaient reconnaître, provisoirement, les clones du Marius des Misérables, qui ne faisaient que protester contre l’autoritarisme du pouvoir. Ils ne savaient pas encore, ces bourgeois humanistes, que parmi les « héros romantiques » qui montaient à l’assaut des gardes républicains à côté de leurs propres enfants, se trouvaient des Gavroche d’un nouveau type qui s’étaient faufilés dans l’ascenseur social, cette machine à créer de nouvelles élites.
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À ces réjouissances champêtres ou bals de société urbains, JC préférait cependant les boums organisées à la cité universitaire par l’association des étudiants de lettres, par les carabins de médecine, etc. Il avait été sevré de vie nocturne à la française et il voulait rattraper le temps perdu. En revanche, il se rendit compte assez rapidement que sa relation avec Sarah avait modifié ses exigences en matière d’aventures sentimentales. Il ne se satisfaisait plus d’accumuler les conquêtes comme semblaient s’en régaler provisoirement filles et garçons. Cet attrait de la quête quantitative le poussait toujours à hanter les bars de nuits et tous les endroits où l’on s’étourdissait d’alcool, de musique et du plaisir de séduire. Une bonne décennie après celle des pays du Nord, cette jeunesse découvrait elle aussi la toute nouvelle liberté offerte par la divine pilule contraceptive. Les filles se la procuraient désormais facilement et sans vergogne auprès du planning familial. Cependant, sans cracher sur ces plaisirs faciles, JC espérait rencontrer là une compagne intelligente, avec laquelle il pourrait faire un bout de chemin.
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Et en plus de ça, la chanson d’la « môm’ Piaf » avait pas peu contribué à convainc’ quèques gars pas vraiment méchants ni costauds, qu’y z’avaient intérêt à rouler des mécaniques pour emballer. Qu’esse qu’elle disait déjà c’t’e chanson ? Ah oui, quèqu’ chose comme ça : « Il portait des culottes, des bottes de moto, un blouson de cuir noir avec un aigle sur le dos. Sa moto qui partait comme un boulet de canon, semait la terreur dans toute la région. »
Avec un tube comme ça, (chanté par une vieille en plus !), ça suffisait pour rend’ méfiants tous les videurs du coin. Et ça nous foutait un peu la trouille de nous aventurer pour la premièr’ fois dans la cour des grands. Mais ça avait pas suffi à nous dissuader d’aller y voir. En plus, le boucher et la bouchère, qu’avaient été sevrés d’bals quand y ‘z’étaient jeunes, pendant la guerre, y nous poussaient à nous lancer dans l’grand bain. Y voulaient pas qu’on « perde not’ jeunesse » comme eux. La bouchère surtout. Elle nous aurait accompagnés là-bas si elle avait pu. Elle nous avait tous encouragés à aller prend’ des cours rue Barathon chez une dame qu’apprenait la danse de salon aux « débutantes » et aux « débutants » comme nous. La bouchère nous montrait elle-même des pas dans la cuisine en passant des tangos, des pasos et des valses sur le Teppaz familial.
Mais pour le rock, elle était pas dans l’coup. Ses yeux d’Hirondelle des faubourgs s’allumaient comme des quinquets quand elle nous parlait d’sa rencont’ avec l’boucher. Y y’avait plu passqu’il était très bon danseur. Alors, y fallait qu’nous aussi, on soye à la hauteur pour cette « première fois »… « En attendant d’aut’s premières fois », qu’elle ajoutait, en rigolant avec son mari, sans préciser lesquelles, mais on avait d’viné assez facil’ment à quoi è f’zait allusion.
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Nous étions également poussés à prendre la parole en début du cours pour raconter la vie de notre quartier,
les incidents, chagrins ou joies de nos vies d'enfants.
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À cet âge, que pouvait-on espérer de plus que quelques baisers ou les dents s'entrechoquaient ?
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la rose vouait à ce garçon un amour absolu, dévorant, un amour qui inquiétait presque l'entourage, tant il était exclusif, jaloux de tous ceux qui approchaient le gamin, puis l'adolescent ensuite. Elle le couvait et le gâtait, comme si elle voulait se faire pardonner la tendresse qu'elle n'avait su prodiguer à sa fille.
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L’Aumance qui enlace le village comme un serpent déployant nonchalamment ses anneaux d’écailles luisantes, qui rampe paisiblement le long de la promenade et du parc, qui se love furtivement sous le pont aux arches trapues, qui glisse plus lascivement sous la passerelle…
Le baiser langoureux, intemporel, qu’elle dépose délicatement sur les champs qu’elle traverse en aval…
Les ondes de douceur qu’elle communique aux près et aux berges, ce petit filet d’une eau modeste et tranquille, qui réfléchit en son miroir trouble et frémissant les maisons médiévales en pierre rose du lieu, tout cela s’enroule malgré moi autour de mes souvenirs d’enfant, à la façon des cache-col que ma mère nouait autour de mon cou avant de m’envoyer dans le froid.
Ce n’est, en amont, qu’un ruisseau sans prétention, qui se prend déjà pour une petite rivière en arrivant dans la boucle onctueuse du village, en découvrant, incrédule, les ruines qui la surplombent. Elle acquiert ici une sorte d’humble majesté, ruisselant des clapotis discrets qu’elle envoie en frêles vaguelettes au loin, vers la forêt centenaire, bruissant elle-même, à sa manière, en un écho chuchoté par les ancêtres feuillus et immobiles qui la peuplent, ou résonnant du brame lourd des autres habitants de ces lieux…
Elle se faufile doucement, cette mince romance d’eau, entre les saules qui, laissant pendre paresseusement leurs longs doigts effilés, caressent les flancs de l’onde jusqu’à Meaulnes. En son cheminement tortueux dans cette modeste vallée, semée de quelques hautains manoirs, la rivière se farde d’une sorte de grandeur rustique. Elle fait sa dame et sa câline, et avant de tirer sa révérence en rencontrant le Cher, dans lequel elle s’évanouira, elle glisse plus lascivement encore, semblant lécher le bocage capricieux, fait de la trame des petits lopins de terre assemblés au hasard du relief vallonné.
Ce damier de bouchures épineuses au tracé délicieusement irrégulier, la rivière le borde affectueusement de ses éclats de lumière tournicotant au gré du courant et des remous.
Elle l’enrichit à la patine du souvenir, au lustre des ruines laissées par les hommes ayant bâti la petite cité qu’elle vient de quitter presque à regret.
La proximité mystérieuse de la grande forêt que la rivière longe respectueusement sans oser, malheureusement, la pénétrer, la troubler de ses murmures cristallins, nous laisse l’amertume de noces jamais consommées entre Aumance et hautaines futaies de Tronçais.
Cette présence à faible distance d’un océan d’arbres éternels a de quoi, en effet, faire regretter aux riverains une rencontre avortée - qui eût pu s’avérer majestueuse - entre chênes vénérables et vaporeuse sinuosité de l’eau, baignant les troncs rugueux, dressés vers le ciel comme des défis, tels les mâts vermoulus de vaisseaux fantômes, telle une armada vaincue par la mousse carnivore du temps, engloutie dans l’ombre d’une mer des Sargasses bourbonnaise, où se balanceraient nonchalamment, en un ballet d’algues devenues peu à peu amphibies, puis enfin terrestres, des champs de fougères ondoyantes. »
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