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Critiques de Jean-François Chiappe (5)
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Louis XVI. Tome 2 : Le roi

ISBN : 9782262004651



Ce volume s'attache à l'étude détaillée de la politique, tant intérieure qu'extérieure, menée par Louis XVI jusqu'en 1788-1789. C'est probablement le tome de la trilogie que l'on risque de trouver le plus ardu et - pour certains - le moins digne d'intérêt. En réalité, ce tome deuxième constitue toute une mine, que nous fait visiter (avec quelle passion ! ) Jean-François Chiappe, sur le caractère de l'un des monarques les plus calomniés et les moins bien compris de notre Histoire - et d'ailleurs de l'Histoire mondiale. Dans le tome I, l'auteur nous rappelait déjà les liens du sang qui rattachaient Louis à Marie Stuart - Guise et Lorraine par sa mère, ne l'oublions pas - ainsi que la fameuse et sibylline devise de la reine décapitée : "En ma fin est mon commencement", devise qui conviendrait tout aussi bien à son lointain parent. Chiappe parlait aussi de l'intérêt que le Dauphin Louis, bien plus cultivé qu'une certaine tradition a voulu le représenter, portait à l"Histoire d'Angleterre" de Hume et, dans celle-ci, au chapitre consacré à la première victime de la "Glorieuse Révolution", Charles Ier, époux par ailleurs d'Henriette de France, fille de notre bon roi Henri. Or, Charles Ier mourut, lui aussi, décapité ...



Ce tome II nous fait plonger au coeur de la politique de Louis XVI mais aussi au coeur d'une personnalité dont Chiappe, tout en restant d'une rare pudeur sur ce point, ne cesse de nous rappeler le formidable complexe d'infériorité sur lequel se bâtit le monarque. En tant qu'"Oint du Seigneur" et de "Roi Très-Chrétien", Louis XVI n'a jamais douté de lui-même. Mais en tant qu'homme, frère de l'inégalable Louis-Joseph, fils de l'irremplaçable et trop dévot Dauphin et enfin petit-fils de l'incomparable Bien-Aimé, Louis-Auguste n'a jamais cessé de se remettre en question. Sans jamais s'en ouvrir aux autres : héritier du trône puis roi, cela lui était formellement interdit. En outre, même si son siècle commençait à revoir, entre autre, sa vision de l'éducation et de l'enfant, Louis marchait avec lui et ne faisait que pressentir les complexités mentales et psychiques que, au siècle suivant, Freud s'empressera de compliquer encore.



On l'a dit et répété : sur le plan extérieur, la politique menée par Louis XVI et ses différents ministres fut exceptionnelle. Exceptionnelle de détermination, d'audace et d'innovation puisque, n'en déplaise à Mr Obama aujourd'hui, les Colonies américaines n'eussent probablement pu acquérir si tôt leur indépendance sans l'aide militaire et stratégique que leur fournit notre pays. Certes, Louis agissait ainsi surtout pour saper la suprématie anglaise - mais c'était de bonne guerre. Il fallait remonter aux tentatives faites sous le Régent pour voir la France tenter de se réconcilier avec cet "Ennemi Héréditaire" que fut, pendant tant de siècles, la perfide Albion. Sous Louis XV, tout était redevenu normal (avec l'éternel contentieux de la Guerre de Cent Ans), avec d'autant plus de facilité que les monarques britanniques étaient désormais de souche ... germanique. En effet, un an pratiquement avant la mort du Roi-Soleil, Georg Ludwig, Electeur de Hanovre, avait, par le jeu des alliances familiales et des successions, coiffé la couronne de Grande-Bretagne et d'Irlande. Il ne parlait pas un mot d'anglais et ne se donna jamais la peine d'apprendre la langue de ses nouveaux sujets - ses cendres reposent d'ailleurs en terre allemande. Mais il était protestant, et c'était surtout cela qui comptait : tout sauf un Stuart honni et catholique, pour les Anglais, tel était - et resta - le mot d'ordre.



Qu'ils naquissent en Hanovre - ce fut le cas de George Ier et de George II - ou en Angleterre, les souverains britanniques s'entêtaient encore et toujours à régner sur les mers ... et sur le commerce mondial. On l'a aujourd'hui oublié - en tous cas, on ne l'enseigne plus - mais, en ce temps-là, l'Angleterre jouait volontiers au Gendarme du Monde civilisé, ce qui, bien entendu, faisait grincer les dents des puissances continentales. Il est d'ailleurs on ne peut plus piquant de se dire que ce rôle tant envié allait, deux siècles plus tard, être endossé par leurs anciennes colonies outre-Atlantique, devenues les Etats-Unis d'Amérique. Et il est à la fois ironique et un peu navrant tout de même de se dire que, sans la France, tout cela ne serait peut-être jamais arrivé, en tous cas dans les conditions que nous connaissons actuellement.



Bref, Louis XVI et la France permirent l'émergence des Etats-Unis, ce qui n'empêcha d'ailleurs nullement les membres du Congrès de traiter une paix séparée avec l'Angleterre et de placer leurs alliés devant le fait accompli, ce qui ne plut bien entendu pas aux intéressés. Pour la première fois, une monarchie aidait une République à se mettre en place. Les Anglais se dirent-ils, à la chute de Louis XVI, que ce châtiment était bien le seul qu'il méritait ? Une chose est sûre : l'or anglais a beaucoup servi - et Chiappe le démontre maintes fois - à déstabiliser une France où nombre de Philosophes admiraient - on ne voit pas trop pourquoi mais tant pis - le système politique britannique, où l'anglomanie fleurissait chez les plus proches du Trône (tel le comte d'Artois, qui demeura pourtant fidèle à son aîné, et, bien sûr, le duc d'Orléans qui, lui, devait faire basculer le vote de l'Assemblée en faveur de la mort de Louis) et où, fidèle à ses tics habituels et séculaires, le peuple français dans son intégralité trouvait que, ailleurs, l'herbe était bien plus verte.



Un fait cependant est indéniable : la croissance de la dette. C'est sur ce plan strictement intérieur que Louis XVI se révèle parfois trop influençable ou indécis ou encore, ce qui le perdra, pas assez déterminé sur la longueur de l'expérience. Il renvoie l'abbé Terray, qui avait pourtant réussi à réduire le déficit, ne voit pas les erreurs pratiques d'un Turgot dont la théorie ne pouvait se révéler excellente qu'à long terme, troque le rigide baron pour un Necker à qui vient l'idée baroque de publier au grand jour l'Etat des finances du pays (et encore en se référant à des calculs qui ne sont pas tout à fait aussi orthodoxes qu'on devrait en attendre d'un aussi grand expert-comptable), renvoie aussi le Genevois pour le remplacer par un Calonne brillant, talentueux mais dont la méthode foncièrement turgotique est desservie par ce que nous appellerions aujourd'hui une campagne de presse mensongère et éhontée (eh ! oui, à cette époque aussi, la presse était aux ordres de ceux qui avaient suffisamment d'or pour la circonvenir, à savoir essentiellement les Anglais et la clique d'Orléans ), et enfin, au dernier acte, rappelle un Necker qui, malgré toute son adresse, tout son crédit et toute son intelligence - car le personnage est intelligent et même intègre, chose rare pour un banquier : Chiappe ne lui reproche en fait que son narcissisme - n'en peut plus mais. La machine est en marche et les Etats généraux convoqués. Avant cela, Louis a tenté une dernière manoeuvre : réunir l'Assemblée des notables afin de tenter de régler le problème financier. Mais les Parlements, ces Parlements que le jeune roi, encore tout imprégné de Fénelon, avait commis l'erreur de rappeler lors de son accession au trône, rompant ainsi avec la volonté de son grand-père qui se méfiait, avec raison, de tous ces robins, exercent une telle pression sur les notables que ceux-ci se refusent à trancher, acculant par là-même Louis XVI à la convocation des Etats.



En tentant de s'enfoncer dans la psyché de Louis XVI, Chiappe nous ramène à une question que le XXème siècle, lui, s'est posé souvent quant à ses gouvernants : les maladies dont ils souffrent influent-elles ou non sur leurs capacités politiques et, si oui, devrait-on, dans ce cas, les démettre de leurs fonctions ? Physiquement, Louis XVI avait échappé à la tuberculose qui avait frappé son frère aîné et qui, si l'on doit en croire les rapports officiels, mit fin à la vie de l'enfant mort au Temple. Mentalement, c'était un homme de bon sens. Mais, après l'Affaire du Collier - évoquée dans ce tome et dont nous reparlerons - et avec les libelles de plus en plus infâmes qui attaquent la Reine, semble se produire une cassure. L'un de ses écuyers le trouvera, Chiappe l'assure, assis dans l'herbe et pleurant à chaudes larmes sur des pamphlets contre Marie-Antoinette qu'il lisait alors que, logiquement, il aurait dû continuer à chasser. En outre, fait tout aussi grave - sinon plus car il ressuscite le traumatisme central de l'enfance du roi, le destin gâché de son frère aîné et, bien sûr, la transmission du titre d'héritier du trône à un enfant qui, à l'origine, n'était pas fait pour le porter - le petit Dauphin (également prénommé Louis-Joseph, comme son oncle emporté trop tôt) est gravement malade. Là encore, la tuberculose. Elle emportera l'enfant le 4 juin 1789. Les noms, les dates parlent : le passé - son passé - rattrape Louis XVI, et dans une période où, justement, le monarque a besoin de toute son énergie.



Mais Louis XVI est-il encore en phase avec son destin de roi ? Plus précisément, en voit-il toujours avec autant de netteté l'aspect temporel ? Ne s'apprête-t-il pas, avec cette humilité et cette noblesse qu'il sut toujours garder dans les moments les plus critiques, sacrifier ce temporel à l'aspect spirituel de sa charge ? ... Consciemment ou non, Louis, fortement dépressif comme nous le dirions aujourd'hui, n'a-t-il pas perdu le goût de vivre ? Tout semble lui filer des mains. Lui, le premier de nos rois à se vouloir à tous prix "populaire" - en ce sens-là aussi, il innove - se voit incompris, dédaigné, humilié par un Peuple qu'il a aimé avec une passion qu'on ne retrouve que chez son aïeul Henri IV. Son fils, en mourant, s'apprête à laisser la couronne à son cadet, le petit duc de Normandie. L'Histoire se répète dans ce qu'elle a de plus familial et de plus triste. Car Louis-Auguste, le "petit Berry", finalement, n'était pas fait, à l'origine, pour être roi ... ;o)
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Louis XVI. Tome 3 : L'otage

ISBN : 9782262006549



C'est le tome le plus dur, le tome de l'agonie qui commence. Une agonie lente que, croyant ou pas, on ne peut que rapprocher des fameuses "stations" du chemin de Croix accompli par le Christ. Louis XVI, on y pense trop rarement, mourut à l'âge de trente-huit ans, ce qui, même au dix-huitième siècle, n'était pas précisément un âge canonique ... Si certains pouvaient l'accuser - et l'accusent encore de nos jours - de ne pas avoir toujours vécu comme l'eût fait, par exemple, son irremplaçable aïeul de Roi-Soleil, il est indéniable qu'il mourut en roi, avec toute la dignité et le courage qui s'imposaient. Un seul sursaut devant l'échafaud, non pas provoqué par la vision de la lame de la Veuve mais par l'usage qui voulait que les bourreaux lui liassent les mains derrière le dos. L'intervention de l'abbé de Firmont, prêtre insermenté qui avait accepté de l'accompagner jusqu'au bout, lui rappelant les humiliations infligées au Christ, fit taire cette ultime révolte.



Reconnaissons-le sans nous voiler la face, nous qui le suivons depuis maintenant trois épais volumes : Louis, qui avait conscience de ne plus régner sur le temporel - la Constituante d'abord mais plus encore la terrible Convention, sans oublier, sous le couvert de ses "bonnes intentions", cet étourneau ambitieux et arriviste de La Fayette, l'avaient dépouillé de tous ses pouvoirs de souverain effectif - s'était tourné vers la seule issue qui restait à sa disposition : le spirituel. Certes, encouragé par des clercs désireux de se faire bien voir de l'Assemblée et du peuple, et espérant toujours - ah ! cet optimisme incurable qui allait le porter jusqu'à l'échafaud ! cette manie de croire que, puisqu'il était loyal, les autres l'étaient aussi ! - il approuva la Constitution civile du clergé mais sa signature n'avait pas eu le temps de sécher, qu'il avait compris son erreur. Cependant, ni Marat, du plus profond des souffrances qui lui brûlaient littéralement la peau et le rendaient à moitié fou ; ni Hébert, toujours tiré à quatre épingles mais infâme prosateur du "Père Duchesne" ; ni Danton, ce Mirabeau au petit pied qui ne connaissait que la grandeur des corruptions en tous genres ; ni Robespierre enfin, dont il convient de rappeler ici que, dans ses débuts, il était un ennemi acharné de la peine de mort, ne pouvaient arracher à Louis ce qui, chez lui, faisait l'homme. S'ils visaient à vaincre non le monarque - on ne saurait dire sans faire preuve de malhonnêteté, fût-ce du redoutable Saint-Just, qu'il haïssait Louis XVI en tant qu'ennemi personnel - mais la royauté que, même dans le donjon du Temple, le prince déchu continuait à symboliser, ils ne pouvaient abattre ce qu'ils auraient probablement appelé, faute de mieux, "le simple citoyen." Tous le savaient, tous le sentaient et, si l'on excepte Marat - que ses souffrances privaient de tout bon sens - Hébert - qui s'acharnera de la manière ignoble que l'on sait sur Marie-Antoinette - et quelques hyènes miteuses dont on a oublié les noms, toujours prêtes à se partager les dépouilles, ce serait mentir de prétendre que les Conventionnels ont jamais poursuivi ce but.



La question, bien sûr, prend une autre tournure lorsque l'on évoque Philippe-Egalité, ex-Philippe, duc d'Orléans, propre cousin de Louis XVI et père du futur Louis-Philippe Ier (lequel acceptera d'être non pas "roi de France" mais "roi des Français"). Comment ce descendant en droite ligne du frère de Louis XIV - dont la fidélité au Soleil ne connut aucune trahison - et du Régent - qui tint son rôle sans jamais chercher à spolier le jeune Louis XV - comment a-t-il pu voter la mort du Roi ? Certes, on perçoit bien l'arrière-pensée : "Si Louis meurt, le trône me reviendra tôt ou tard ou, à tout le moins, je deviendrai régent et, à partir de là ..." A la limite, on peut comprendre qu'il l'ait eue. Mais derrière le vote abominable, dénaturé de l'ancien duc d'Orléans - le seul Conventionnel qui, du propre aveu de Robespierre, se devait de voter contre la mort du Roi - on perçoit aussi une haine plus personnelle, une haine sans excuse parce que sans motif autre que l'envie la plus dégénérée.



Philippe dit "Egalité", de l'avis quasi général (aristocrates et révolutionnaires mêlés) ne brillait pas par son intelligence et les historiens les plus intègres, peu soucieux de déplaire à l'actuelle famille d'Orléans, insistent beaucoup sur sa mollesse et son bon caractère, comme si ceux-ci étaient des excuses à son intolérable lâcheté - laquelle ne lui épargna d'ailleurs pas l'échafaud. Quand on voit comment il traita son épouse et la déposséda de ses enfants pour les confier à sa maîtresse, Mme de Genlis, déjà, on peut avoir certains doutes sur l'"humanité" du personnage. Philippe pouvait bien sûr se montrer très généreux avec les dames qui lui plaisaient et les messieurs qui chantaient ses louanges, mais, pour notre part, on ne parviendra jamais à nous convaincre de son "sens de la famille." On le prétend par exemple "bon père" - mais il le fut "à éclipses" et ne se gêna guère pour élever ses enfants sinon dans la haine, en tous cas dans le mépris de leur mère. Que l'on pense ce qu'on veut de Marie-Adélaïde de Bourbon-Penthièvre, devenue duchesse de Chartres, puis duchesse d'Orléans et qui finit, dans son exil, par épouser morganatiquement l'ancien Conventionnel - non régicide - Rouzet, sa conduite d'épouse et de mère ne méritait pas pareille injustice qui la fit certainement beaucoup souffrir.



Quant à Louis XVI, quand on lui apprit le vote de son cousin, il répondit, avec son bon sens et sa noblesse naturelles : "Je suis en peine pour mon cousin, M. d'Orléans. Que lui ai-je donc fait pour qu'il me poursuive ainsi ? Mais pourquoi lui en vouloir ? Il est plus à plaindre que moi. Ma position est triste mais le fût-elle encore davantage, non certainement, je ne voudrais pas la changer avec lui."



Paroles de roi, dira-t-on. Paroles d'homme bon, peut-on ajouter et aussi, paroles d'homme lucide - et certainement pas paroles de mollasson et d'imbécile !



Mieux qu'un autre - tant d'historiens sont si "amoureux" de Marie-Antoinette qu'ils refusent de voir en celui qui fut son époux autre chose qu'un faible et un imbécile, aussi peu fait pour régner sur la France que l'eût été le mythique "Bon Sauvage" de Rousseau - Jean-François Chiappe a su, dans les deux volumes précédents, cerner au plus précis le caractère du roi, ne reculant pas devant certaines de ses contradictions. Dans ce troisième et dernier volet, si douloureux, si prenant, il peaufine son hommage à la mémoire d'un roi que l'Histoire de la République, pour des raisons politiques évidentes, se refusa si longtemps à connaître - de nos jours, les choses se sont un peu améliorées mais il reste encore beaucoup de travail à accomplir. Mais Chiappe double cet hommage, nécessaire parce que dicté par l'Histoire, de celui qu'il rend en parallèle à l'homme, à l'époux, au père que fut aussi Louis de France, seizième du nom. La Révolution qui l'a sacrifié sur son autel n'a-t-elle pas été la première à déclarer que "tous les hommes sont égaux en droits" ? Eh ! bien, si c'est vrai, il est temps de rétablir Louis XVI avant tout dans sa dignité d'être humain. Bien sûr, il est comme vous, comme moi - comme nous et, après avoir lu cette trilogie, vous comprendrez combien cette simple phrase, s'il pouvait la lire, le comblerait de joie et d'émotion : c'est-à-dire qu'il a, lui aussi, ses petites bizarreries, ses coins de tristesse obscure et enfantine, ses timidités inexplicables, ses entêtements qui ne lui rendent pas toujours service, ses passions pour les nouveautés (la cartographie à son époque), ses détestations instinctives, ses enthousiasmes parfois naïfs, ses moments, rares mais francs, de mauvaise humeur et son droit indiscutable à l'erreur avec, parfois, le désir de tout laisser tomber et une tendance à déprimer parce que, autour de lui, on ne le comprend pas tandis que ceux qui auraient pu le faire sont morts depuis longtemps. Ces mille petites choses ajoutent à la vérité du personnage, à l'authenticité de cette figure aimable et bonhomme, à qui Saint-Simon, mi-grondeur, mi-indulgent, eût sans doute reproché (non sans raison) sa "débonnaireté", à ce roi dont la seule erreur fut de se montrer trop humain lorsque, alors qu'il devait à sa couronne de faire tirer sur le peuple, il refusa de voir couler pour lui le sang français. ;o)
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Louis XVI. Tome 1 : Le prince

ISBN : 978-2262004569



Parmi les monarques français, et j'irai jusqu'à écrire parmi les particuliers, jamais personne n'a été traité par l'opinion publique comme le fut Louis, seizième du nom. De nos jours encore, cette opinion publique toute puissante - et de plus en plus puissante par la révolution pacifique du Net - remet Louis XVI, sa vie et son destin tragique en question en osant le camouflet ultime, cette humiliation que ne méritaient certainement pas plus l'homme que le monarque. On le compare en effet à un certain François Hollande, président de l'actuelle République française, lequel, depuis son élection, n'a cessé de rabaisser et d'humilier notre pays en s'abstenant soigneusement de prêter la moindre oreille aux besoins et aux volontés d'une nation déstabilisée, de plus en plus assommée par la précarité et le chômage, en quête désormais, le mouvement s'affirme, d'un retour à ses idéaux de toujours : liberté, souveraineté, culture et grandeur.



Bref : l'antithèse parfaite de Louis XVI.



Devant pareille insulte à la mémoire d'un roi qui ne souhaitait peut-être pas régner mais qui le fit avec honnêteté, s'inquiétant de ses peuples et de leur bien-être, bataillant tout seul (ou presque) pour des réformes fiscales d'une telle ampleur qu'elles ne pouvaient s'accomplir sans l'union des Trois Ordres, d'un roi qui connut en cette vie un véritable chemin de croix avant de périr, avec la dignité que l'on sait, sur un échafaud qui, la Malchance le poursuivant jusqu'à la dernière seconde, le décapita non pas à hauteur du cou mais au niveau de la mâchoire, il nous apparaît primordial de tenter de brosser un portrait plus exact, plus juste de celui que son entourage, la Cour de Versailles, les rivaux d'Orléans, les Révolutionnaires bien sûr mais aussi des historiens peu empressés et adeptes des idées reçues susceptibles de pouvoir renforcer la République encore toute jeune - ben oui, la IIIème République était encore très jeune et il lui fallait se construire sa légende, ses mythes - et enfin des pseudo-intellectuels qui, sans s'informer, sans réfléchir par eux-mêmes, se sont contentés de répéter ce que d'autres avaient dit, considéraient grosso modo comme un brave type, certes, mais dépourvu d'intelligence et de bon sens, plus occupé de serrurerie que de politique, asexué ou quasi, ce qui n'arrangeait pas son cas, cocu tant sur le plan saphique que sur le plan de l'hétérosexualité par une Marie-Antoinette elle aussi allègrement calomniée et critiquée à tout-va, bref, comme un pauvre imbécile indigne de porter le nom glorieux des Bourbons et qui a eu ce qu'il méritait en finissant guillotiné.



Eh ! bien, non ! Mesdemoiselles, Mesdames, Messieurs, Louis-Auguste de France, duc de Berry, puis Dauphin et enfin Roi de France sous le nom de Louis le Seizième, n'a rien à voir avec cette caricature que vous contemplez encore, en plein XXIème siècle, avec tant de commisération méprisante. Si Robespierre, le seul de nos politiques à ne pas avoir usurpé le surnom d'"Incorruptible" qu'on lui avait donné - au fait, il paraîtrait que Messieurs Juppé et Sarkozy, pour ne citer que ces deux-là, détestent l'avocat d'Arras - mérite bien, malgré ses excès, sa froideur et son jusqu'au-boutisme absolu, de se voir réhabilité, il en est de même pour celui dont il vota la mort, dit-on, avec fermeté mais à regrets.



Si brusquement, vous vous sentez un peu de suspicion envers les préjugés dont on vous a abreuvés, si mon discours vous pique un peu - et j'espère qu'il y réussira - plongez-vous dans la biographie magistrale que Jean-François Chiappe a consacrée, en trois volumes, à Louis XVI. Biographie, dis-je, et non hagiographie. Car l'homme et le monarque eurent, comme tout le monde - vous comme moi - leurs défauts et leurs faiblesses. De là à oser prétendre qu'il n'était que ça et qu'il ne s'est jamais préoccupé de son pays ni des souffrances de son peuple - ce peuple dont il refusa, jusqu'au bout, de faire couler le sang - il y un abysse. Oui, Louis XVI mérite bien mieux que ce que l'on a dit - et ce que l'on continue de dire - sur lui.



Second fils de Marie-Josèphe de Saxe et de Louis-Ferdinand, Dauphin de France et fils de Louis XV, Louis-Auguste n'était pas né pour régner. Avant lui venait Louis-Joseph, titré duc de Bourgogne par leur grand-père, un enfant brillant, intelligent, vif, extraverti, hautain, astucieux : un modèle et un futur grand roi, nul n'en doutait. D'ailleurs, tout le monde le pensait, tout le monde le disait et ses parents l'idolâtraient. Mais un jour, la tuberculose osseuse s'invite au chevet de l'enfant. Et le rêve prend fin. Louis-Joseph, si avide de faire rendre gorge à Frédéric de Prusse qui sévit encore à l'époque, comprend, lentement mais sûrement, qu'il ne règnera jamais. Il passe bientôt ses jours en fauteuil roulant, ses professeurs renoncent à poursuivre leurs cours (trop de fièvre, trop de faiblesse) et, en définitive, la Faculté, solennelle et résignée, recommande l'alitement.



Alors, pour "distraire" le petit moribond dont on ne sait exactement quel jour la Camarde passera prendre livraison, ses parents, son grand-père lui-même (un homme pourtant réputé pour son intelligence) lui donnent pour compagnon son cadet, le petit Berry. Et cet enfant, pourtant héritier en second du trône, est mis à "disposition" de son aîné. Ce qui signifie qu'il ne joue plus, qu'il bouge à peine, parle encore moins mais écoute, écoute son aîné - tant aimé, tant admiré - lui donner des ordres et lui prêcher la sagesse et la soumission. Et sans cesse, dans les yeux de ses parents, dans ceux des familiers, jusque dans ceux de "Papa-Roi" Louis XV, Louis-Auguste perçoit les comparaisons, toujours à son désavantage, lui, si pataud, si lourdaud, si timide, si posé en tous cas en apparence. Pire, sa sensibilité discerne la question : "Pourquoi Louis-Joseph doit-il nous quitter, lui, si vif, si intelligent, si prometteur alors que Dieu aurait mieux fait de nous prendre ce pauvre Louis-Auguste, mignon certes, mais visiblement si inférieur à son aîné par l'intelligence et les talents ? ..."



Imaginez tout cela dans la tête d'un enfant de six ans. Peu importe qu'il soit appelé à régner, peu importe le siècle où il est né. Prenez un enfant de cet âge, aujourd'hui, et faites-lui voir les mêmes horreurs dans les yeux de ceux qu'il aime le plus au monde. Imaginez. Imaginez les ravages. Quoi ? Vous fermez les yeux ? vous détournez la tête ? Mais Louis XVI, c'est ça. Aussi. Avant tout. Ah ! ça fait un peu bizarre, hein ?



C'est ainsi très tôt, trop tôt, dans son enfance que prend racine le terrible complexe d'infériorité que cultivera le futur Louis XVI, cherchant néanmoins parfois à s'en défendre mais finissant, en maintes occasions, par ployer sous le faix. Paradoxalement, c'est dans les derniers mois de sa vie, dans le Malheur, que le prince comprendra enfin ce qu'il est, ce qu'il a toujours été : un homme et un monarque dont la noblesse de coeur, le rare courage, le sens de l'Etat et le respect de la parole donnée à Dieu et à ses peuples lors du discours du Sacre ne dépareront certes pas parmi ses brillants aïeux.



Et cette période si douloureuse de son enfance ne constitue que l'un des obstacles qui s'opposeront au développement harmonieux de Louis XVI. Son illustre aïeul, Louis le Grand, avait, rappelons-le, bénéficié sans compter de l'amour de sa mère, Anne d'Autriche. Louis-Auguste, lui, n'aura pas cette chance car, au moment où la Dauphine semble s'apercevoir des qualités de son fils, elle décède brutalement. Et Dieu sait combien l'amour d'une mère est important pour un enfant ...



Ce premier tome de la biographie de Chiappe, étayé avec ferveur mais réalisme, rédigé en un style superbe, ouvre au lecteur curieux mais impartial les portes d'un caractère trop longtemps calomnié ou carrément dénié à celui qui le possédait. On ne s'y ennuie pas un seul instant et la fin du règne de Louis XV tout comme les débuts bien timides de son successeur nous sont restitués comme si nous y étions. A la fin de cette lecture, on n'a qu'une seule hâte : entamer le second tome.



... Et déjà - et c'est une belle victoire pour l'auteur - on se met à avoir une idée plus nette, plus précise et oh ! combien plus vivante de Louis XVI. C'est bien simple : on le sent là, à nos côtés, toujours un peu étonné que ces étranges descendants des Républicains de 1789 continuent à s'intéresser à lui et encore plus surpris - et vaguement ému - de constater qu'ils cherchent non pas à l'accabler mais à mieux le connaître. Louis XVI ne souhaitait rien tant que cela justement : que ses peuples le vissent tel qu'il était : avec quelques siècles de retard, Jean-François Chiappe a donné cette joie ultime à ses mânes. Grâces lui en soient rendues à jamais. ;o)
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Georges Cadoudal ou la Liberté.

Un superbe ouvrage sur la période de la révolution française et de la vie d'un heros méconnu de nos jours.Le livre semble relater de facon assez fidèle les aventures de ce heros de l'epoque et j'ai pris beaucoup de plaisir a lire ces lignes qui nous replongent a l'epoque napoléonienne.
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Le Comte de Chambord

Ce livre intitulé le Comte de Chambord et son mystère, rappelle à dessein que Henri d’Artois fut le dernier prince de la Maison de France - à ce jour - qui aurait pu rétablir la royauté. Pourtant, sa vie à peine entamée commença mal, très mal. Son père, le duc de Berry fut assassiné par un bonapartiste nommé Louis-Pierre Louvel. Ce dernier désirait « détruire la souche des Bourbons ». Le tueur déclara à son procès : « Tout Français qui a porté un jour les armes contre sa patrie perd à jamais sa qualité de citoyen français ; les Bourbons n'ont pas le droit de rentrer en France, et surtout d'y vouloir régner. Louis XVI a été exécuté légalement et justement de l'aveu de la Nation entière ; la Nation serait déshonorée si elle se laissait gouverner par cette race de traîtres. » Propos au demeurant excessifs, mais qui témoignent parfaitement du caractère fanatique de ce révolutionnaire. Comme l’écrivit Chateaubriand : « La fortune refusa à Monseigneur le Duc de Berry la mort de Charrette et celle d’Enghien, pour lui réserver celle d’Henri IV : elle voulait le traiter en Roi ». Maigre consolation offerte par les voies impénétrables de la Providence… Durant son agonie très chrétienne, au cours de laquelle il demanda à Louis XVIII la grâce pour son meurtrier, le duc de Berry dit à sa femme, Marie-Caroline des Deux-Siciles, de se ménager pour l’enfant qu’elle portait. Sept mois plus tard l’enfant du miracle, surnom donné par le poète Lamartine, naissait. Sa mère, lors de l’accouchement, conscient du trésor qu’elle portait dans ses entrailles déclara au praticien : « Souvenez-vous qu’entre les deux, vous ne devez pas hésiter. Ma vie n’est rien, la sienne est tout. »



Il fut prénommé Henri en l’honneur du premier des Bourbons. Aimé voire adulé, il reçut en cadeau, grâce à une souscription nationale, le domaine de Chambord. Pour autant, Henri n’eut pas la joie de connaître son père, ni d’avoir d’enfants. Il faut peut-être voir dans ce phénomène rare mais non pas unique, ce voile de mystère qui entoure encore ce petit-fils de France. En effet, comme l’écrit Chiappe : « Ce prince privé de fils n’en est pas moins animé de sentiments paternels à l’égard de son peuple. C’est bien le motif pour lequel il ne montera jamais sur le trône ; il inspire la peur aux grands capitalistes – les plus intelligents – et aux petits – les plus bêtes. C’est ainsi que la gauche et l’extrême gauche seront liguées contre une restauration au sens plein du mot. » Certains, aussi étonnant que cela puisse paraître, voyaient dans cet homme l’arbitraire même. Laissons Charles X leur répondre : « On pilerait tous les princes de Bourbon dans un mortier qu’on n’y trouerait pas un grain de despotisme. » Il n’y a rien de pire que la méconnaissance et l’ignorance. Chiappe nous permet de découvrir la jeunesse de l’enfant royal, et nous le suivons, malheureusement, sur les routes de l’exil. Même hors de son pays, le Duc de Bordeaux, titre que lui donna Louis XVIII en hommage à la première ville qui se rallia aux Bourbons en 1814, se souciait de cette France, travaillée par les factions orléanistes, bonapartistes, républicaines voire pré-marxistes. Parfaitement lucide sur les affaires de son temps comme le démontre l’auteur : « Le prince voit fort bien la situation d’une Europe déchirée entre le capitalisme grossissant et le prolétariat furieux de maigrir », le Comte ne reste pas silencieux face aux différents problèmes nationaux et internationaux de son époque. Alors que le régime de Louis-Philippe, malgré quelques réussites économiques et politiques, rencontre des difficultés, des hommes politiques - de toutes tendances confondues - soucieux de l’avenir de la France contactent le Prince. S’en suivront des réunions, des débats, des comités, des lettres, des publications, qui malheureusement ne ramèneront pas Henri sur le trône de ses aïeux. Il est intéressant de noter que déjà, la liberté d’enseignement constituait un des points non négociables de la doctrine légitimiste. Le Comte de Chambord, au moment des palabres politiciennes, avait écrit la chose suivante : « Je m’associe à la lutte persévérante et courageuse des catholiques de tous les partis en faveur de la liberté de l’enseignement qui ne devrait avoir d’autres limites que l’autorité tutélaire d’un sage gouvernement. » De plus, certaines de ses idées portent un accent terriblement moderne, car elles condamnent : « les lois injustes qui privent le plus grand nombre des contribuables de la participation légitime au vote de l’impôt. » Et dire qu’ils menèrent la révolution pour soi-disant abattre les privilèges… Ceci étant dit, il nous semble toujours difficile de comprendre un pays quand on n’y réside pas. Nonobstant la distance, l’éloignement et le concert de louanges qu’il reçoit, Henri se montre méfiant à l’endroit des adresses de sympathie et bien plus, que ces proches lui lisent le soir près du feu. Comment faire confiance aux Français en général, et à l’administration en particulier ? Chiappe résume ainsi : « Il est divertissant de consulter la liste des conseillers municipaux de l’époque. On retrouve les mêmes noms trempant à toutes les sauces : le Consulat, l’Empire, la Restauration, l’Acte additionnel, la deuxième Restauration, la monarchie de Juillet, la deuxième République, et bientôt, le second Empire ». En définitive le Français se montre bien plus légaliste que légitimiste… Après les échecs des différentes tentatives de restauration, beaucoup critiqueront Chambord pour son intransigeance envers les trois couleurs. Dans celles-ci, Henri d’Artois pouvait bien accepter - en dépit de quelques réserves - d’y voir Jemmapes et Austerlitz, mais non pas le tricolore de 1830, synonyme à ses yeux de trahison et d’usurpation. Les textes exprimant sa position sur ce sujet sont connus, et nous ne les citerons pas ici. Pour autant, il ne faut jamais oublier qu’il existe une différence notable entre le pays légal et réel. D’aucuns disent : « avec une majorité assez confortable à la Chambre, Chambord fut incapable de prendre le pouvoir ». Le vicomte de Meaux, bon historien et brillant analyse avait écrit : « l’Assemblée était royaliste mais le pays ne l’était pas ». Plus de 40 ans après l’imposture orléaniste qui avait scellé l’exil de la branche ainée de la famille de France, sans oublier que la France avait connu différents régimes, monarchie constitutionnelle, la deuxième République, le deuxième Empire, les Français dans leur grande majorité n’avaient-ils pas oublié les fleurs de lys ? Vaste question à laquelle il est difficile de répondre avec certitude. Malheureusement les accusateurs, qui reprochent à Chambord son inefficacité, oublient une donnée essentielle que lui-même répétait constamment : « Ma personne n’est rien, mon principe est tout » et il poursuivait en toute modestie : « Si je n'étais pas l'Aîné des Bourbons, je ne serais qu'un gros homme boiteux. » Son grand-père Charles X avait déclaré : « Je préfère être jardinier que de régner comme mon cousin le roi d’Angleterre. » Tout était dit, tout était consommé. Henri voulait être réellement et pleinement le roi de France, et non pas être l’otage d’un parti ou pire d’une coterie. Il n’entendait pas renier son statut et être réduit à un vulgaire candidat républicain…



Chiappe nous livre une biographie intéressante et intrigante qui nous plonge dans un siècle troublé pour la France tout en tentant de percer, non pas le mystère mais selon nous, l’énigme Chambord. Nous voyons les comités royalistes se mettre en place, les républicains manœuvrer habilement, la famille royale divisée. Nous découvrons également la montée en puissance de Thiers ainsi que sa chute, et notre loyalisme se heurte à la duplicité de Mac-Mahon et de certains parlementaires… Les Français, jeunes et moins jeunes, doivent lire ce livre pour se rappeler que la royauté incarnée ne repose pas sur une pauvre chimère sentimentaliste mais sur un principe transcendant qui nous unit et nous dépasse tous. Nous n’emporterons peut-être pas votre conviction, mais vive le Roi à tout jamais.







Franck ABED



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