Ils avaient annoncé la pluie. Elle a commencé vers midi, en traînées lentes sur les murs de la ville. maintenant l’accalmie est venue, avec des flaques grises figées sur le trottoir. Au-dessus des toits, de grands arbres surgissent avec des branches dégarnies où s'accrochent encore des feuilles bistres : des marronniers parcheminés, des platanes d'arrière-saison, des frondaisons roussâtres et avachies.
C'est l'après-midi qui débute et je vais devoir me montrer circonspect. Sinon j'aurais vite l'air d'un chien mouillé ou d'un clochard en mal d'abri.
Celui qui fouille dans son passé est menacé de langueur maligne. Le monde appartient aux oublieux, aux spécimens qui se lèvent tôt, à ceux qui ne font pas de rêves la nuit. Quant aux gens qui entassent leur courrier dans des caisses de carton, qui lisent le père Gury dans le texte, qui regardent les aquariums bien plus assidûment que la télévision, ceux-là sont des figures de musées, des mannequins bourrés de paille.
Si vous ne voyez pas comment on peut en boire les silences, en manger les odeurs, lisez ce livre. Et si vous pressentez déjà tout cela, vous serez peut-être plus étonné encore...