APORIES
Toute
beauté
redouble
la douleur.
Le
bleu
du ciel
est
une
tragédie.
La
rondeur
du galet
nous
exclut
de son
cercle.
On
se noie
dans
l'eau
claire.
La
plénitude
des choses
nous est
déchirement.
Tout
ce qui
nous
touche.
Que
nous
ne savons
pas
toucher.
(extrait de " Dessous ") - pp. 53-54
Rien pour le moment…
Rien pour le moment
Si c’est possible, pour rien,
On défait la table, on débarrasse,
même pas une nappe,
pour le moment rien, plus rien,
Ne me fais penser à rien, ne me fais
ni reproches ni compliments, enlève
ces photos, on dirait des disparus.
Éclaircie pour un désert,
l’œil non encombré, lavé, pas de nostalgie
dans l’arrière de ton œil, pas de rêves érotiques,
les fleurs, à côté, ne les vois pas tout de suite,
et surtout, pas de phrases, rien de déjà là,
si c’est possible avec des phrases : pas de phrase.
Rester sur la corde.
Ne pas vouloir, ne pas miser.
Au plus simple, au plus court,
ciel sur table. Aimable et gai, ciel pur.
// Béatrice de Jurquet
La vie le vie…
La vie le vie
Au cœur du monde n’éclot que
dans l’essaim d’abeilles, le galop
du troupeau, le martèlement des prières
Les mains fermant les pleurs
Adieu à trop de compromis
Arrête la balance des jours
Sois ce fléau inflexible marquant la verticale de l’élan
Alors le chant suprême t’accompagne
Celui des anges éclos de ta chair
de ton sang
loin de la bassesse d’une humanité quiète
// Nicole de Pontcharra (1935-)
La vie est un kit. Il faut continuellement en inventer et en bricoler la matière première. Il importe de trouver des combinaisons, des agencements pour qu'entre vivre et soi se dessine une présence, un destin, une personne, une preuve d'existence.
(Frédérique Verlinden in "le corps relatif d'Awena Cozannet")
Le corps devient sujet, incarnation, miroir, vertige de soi.
Chaque création invite chacun à rentrer en lui-même.
Chaque performance contribue à la construction d'un groupe éphémère.
Chaque rencontre est un moment festif.
Adhérer à soi, faire corps, c'est rendre visible sa vie.
Où se nouer à l’aube…
Où se nouer à l’aube
Arbres d’un présent aux racines de fleuve ?
Dans la rumeur des foules désertées de leurs rêves
Au cœur de souveraines solitudes ?
Épars comme printemps à travers les vallées
Quémandeurs de destins aux vents inconcevables de l’histoire
Cette source effrénée
Des regards
Des morts
Faille où nos arrogances s’inclinent
Où la misère demeure silence
Témoin sans refuge
À travers la lumière des larmes
Profonde comme la nuit
Qui cherche le pardon.
// Marie-Dominique Cotte
Nuit de nuit …
Nuit de nuit noir plus noir du
puits rouge allumé à l’intérieur
Volcan muet crachant sans fin la lave
Sans altérer le silence, l’immobilité du corps
en extase
Demeure dans le sifflement du feu
la trajectoire de la vitesse des globules
sans limite ni but
L’accélération de la douleur
Personne ne te regarde
Les visages tournés vers le doute
trouvent leur réconfort dans le miroir
où ils s’absentent
…
// Nicole de Pontcharra (1935-)
Musique effilée…
Musique effilée
Portée haute du vent
Nuit de la flûte sur les eaux
Qui écoute
Dans l’instant de cette vie
La fragile tension du silence ?
Ange inventé
Pour la soif d’errer
la prière incertaine
L’ardente obscurité d’aimer
Ange effleuré
Clémence d’aube
Clairvoyance dans l’inconnu.
// Marie-Dominique Cotte
Soulever les racines marcher sur l'eau
Il va falloir nommer
Nommer pour faire face
Faire face pour résister
Résister pour donner forme
Awena Cozannet