Citations de Jeanne Burgart Goutal (23)
On ne croit plus au féminisme séparée de l'écologie, pas plus qu'à l'écologie séparée du féminisme, ni à ces enjeux s'ils sont séparés des combats sociaux, antiracistes et décoloniaux. C'est vital de penser l'interconnexion des luttes, parce que, si on les sépare, même les plus beaux idéaux tournent au vinaigre !
La nature nous donne tout. À chaque souffle on lui prend de l’air. À chaque repas, on lui prend des plantes, de l’eau, de la terre et de la lumière. À chaque fois qu’on fabrique quelque chose, on lui prend de l’espace et des matières… Alors on a une dette à son égard, une dette infinie liée à notre vie elle-même. En échange de ses dons, on doit quotidiennement la remercier, lui faire des offrandes […] : on offre des bougies, des chants, des sons de clochettes, des fleurs et des petits gâteaux… Chez les yogis, c’est encore plus intériorisé : ils lui offrent leur souffle, leur corps et leurs pensées… Bref, voilà, c’est la vision védique.
Que peut-on faire pour contribuer à l’équilibre de la Terre au lieu de le détruire ? Nous, les humains, nous ne pouvons pas trouver tous seuls la bonne réponse à cette question : notre intelligence est limitée à notre point de vue particulier. Pourquoi des peuples ont vécu des millénaires sans abîmer leur environnement ? Selon Macy, c’est notamment parce qu’ils avaient des pratiques rituelles pour écouter les autres espèces et prendre des décisions en partenariat avec elles.
Nous, les « modernes », nous avons perdu ce sens : pour nous, la terre s’est tue.
Selon les ecoféministes, c’est vital de surmonter cette coupure… Tout comme la coupure entre hommes et femmes… Pour trouver des solutions justes, on doit réapprendre à tendre l’oreille aux autres êtres.
Lorsque la marche du monde nous désole et qu’on se sent impuissants, tenons conseil et souvenons-nous : nous appartenons en fait à la communauté la plus vaste et la plus puissante, la communauté du vivant ! Quelle puissance peut-on tirer de cette appartenance ? Par quels actes exprimer ce pouvoir qui nous traverser ? À vous !
Perso, j’ai pas le temps de militer, mais bon, je peux agir à mon niveau en réduisant ma conso d'internet? Sa ne me plaît pas trop, cette histoire de numérisation totale de la vie. A partir de maintenant, les dimanches seront « journée déconnectée ». Comme ça, je vais enfin pouvoir attaquer la pile de livres qui m'attend depuis des mois et jouer avec mes enfants!
Les écoféministes proposent aussi de cesser de penser le monde en termes de dualités : corps/esprit, intellect/émotion, homme/femme, humain/nature. Parce que cela découpe et hiérarchise le monde. Ainsi, elles développent l'idée que la spiritualité, l'intuition ne sont pas les ennemis de la rationalité, de l'objectivité, ni de la maîtrise technique. On n'a plus besoin de croire que pour réfléchir, apprendre, diriger, on devait se couper de nos sentiments et de notre empathie.
Dans le magazine Kaizen n°55, mars, avril 2021
Risques de l'écologie seule :
- Créer des parcs naturels protégés... en expulsant des populations autochtones.
- Interdire les voitures polluantes... sans donner les moyens aux plus pauvres d'en changer.
- Passer au zéro déchet... en faisant la charge mentale écologique sur les épaules des femmes.
- Acheter des produits bio... fabriqués dans des conditions injustes à l'autre bout de la planète.
ETC.
Risques du féminisme seul :
- Accéder en haut de la pyramide... grâce à un métier qui participe davantage à l'écocide.
- Mettre en place des dispositifs d'ascension sociale... qui ne concernent que quelques privilégiées.
- S'émanciper des tâches domestiques... par l'exploitation de personnes plus précaires (au lieu de les partager avec les hommes).
ETC.
Imaginez : toutes les nounous du quartier gagnent au loto, et du coup elles arrêtent de s'occuper des enfants des autres. Je vois d'ici le tableau :
- Mais enfin madame Ocampo, comment on va faire sans nounou ? !
- Euh... vous allez vous occuper de vos enfants, par exemple ?
- Mais on a pas le temps, on travaille, nous !
- Désolée, c'est aussi du travail, les enfants...
Dans l'imaginaire occidental moderne, dans les romans, les récits religieux, les films et mythes, la femme est souvent associée symboliquement à la nature. Les femmes sont rapprochées de la Terre, de la Lune, des émotions. Tandis que l'homme incarne la raison. Alors rejeter notre animalité, et donc notre mortalité, implique de rejeter les femmes.
Dans le magazine "Kaizen" n° 55, mars, avril 2021.
Est-ce qu'on ne pourrait pas plutôt évaluer les conséquences concrètes de nos choix plutôt que de débattre sans fin de leur dimension "naturelle" ou "culturelle"?
« Tout ce qui est ici est ailleurs, ce qui n’est pas ici n’est nulle part. »
C’est une devise du tantra. Je te laisse méditer ça…
1987 Inde : Vandana Shiva fonde l'ONG Navdanya, pour préserver des semences gratuires, promouvoir l'agriculture biologique et protéger le mode de vie paysan. Résultat : création d'un réseau dans seize états.
1977 Kenya : Wangari Maathai fonde le mouvement de la Ceinture verte, qui incite les femmes à planter des arbres pour lutter contre la déforestation et générer un revenu personnel. Résultat : 50 millions d'arbres plantés et 30 000 femmes formées à la foresterie.
1973 Inde : les femmes du mouvement Chipko protègent de leur propre corps les forêts environnant leur village pour empêcher leur abattage à des fins commerciales. Résultat : moratoire de quinze ans dans plusieurs états.
Risques du postcolonialisme seul :
- Rattrapé les pays "développés"... en accélérant l'exploitation des ressources naturelles.
- Obtenir son indépendance... et subir une élite locale corrompue qui confisque le pouvoir.
- Lutter pour récupérer une souveraineté économique... en reproduisant les inégalités hommes/femmes.
ETC.
Risques de la justice sociale et raciale seule :
- Faire primer l'unité dans la lutte... en faisant taire les revendications spécifiques aux différents groupes.
- Mener des combats en faveur d'une minorité... tout en reproduisant les schémas patriarcaux.
- Gagner en pouvoir d'achat... et l'utiliser pour surconsommer au détriment de la planète.
ETC.
Dans les champs de canne à sucre, des patrons demandent aux employées de faire une ablation de l'utérus pour éviter règles et grossesses, qui réduisent la productivité.
97% des aides à domicile et des secrétaires... 90% des aides-soignants... 16 % des chefs d'entreprise...
... sont des femmes.
Tout ce qui est ici est ailleurs, ce qui n'est pas ici n'est nulle part.