Inexorablement, la bête avance, elle envahit notre cité pour l'embraser.
" Mes frères et sœurs, un vent d'agonie va souffler sur notre monde et tout va disparaitre. La fin des temps est proche. Courez vous réfugier dans nos abris. Vers les égouts, les caves et les greniers. Je ne quitterai pas notre navire. Je resterai ici. Je resterai votre roi."
Plus la bête approche, plus je discerne ses traits.
Ce sont les hommes.
Ils avancent sur nous. Ils sont là par milliers. Ne formant qu'un amas flottant sur l'étang de feu. Je ne reconnais pas leurs visages, déformés par la haine.
Ils mettent le feu au monde et détruisent tout sur leur passage.
Je ne comprends pas ce qu'ils disent, les explosions couvrent leurs mots.
Ce matin une odeur inhabituelle envahit ma chambre. Mes tempes cognent, ma bouche est sèche, le long de mon échine, des gouttes de sueur perlent. Tout mon corps est transporté par ce parfum. Qui a laissé entrer une flamme dans l’obscurité ? Quelque chose s’est infiltré durant la nuit, insidieusement, délicatement, délicieusement. D’ordinaire, je ne sens que l’humidité glaciale du vide. Mais aujourd’hui les senteurs d’un festin ont traversé les murs pour m’offrir le parfum du paradis perdu. Celui d’une cène.
Ce matin je me lève et je perçois des chants célestes célébrant un nouveau roi. C'est le jour de ma renaissance. je suis mort durant la nuit et j'ai ressuscité au lever du jour. Aujourd'hui je vous le dis, plus rien ne sera comme avant. Car je suis devenu Roi. Tous ces chants divins annoncent mon avènement. Avec force et fracas, j'ouvre les portes de mon palais. Face à moi se dresse la montagne sacrée de détritus. Le roi se fait pèlerin. je serais le premier et le dernier à gravir la plus haute cime du monde. j'escalade le mont d'ordures que les hommes m'ont élevé. Je me hisse entre les plus et les courbes. Arrivé au sommet, je réalise qu'ils m'ont bâti un empire.