Il n'y avait plus d'homme à la maison. J'ai toujours eu du boulot sur le dos! Je n'ai pas été beaucoup à l'école parce que maman ce n'était pas une personne costaud. Elle était asthmatique. Il n'y avait pas de médicament en ce temps-là... Le matin avant d'aller à l'école, elle me demandait : « Tu ne voudrais pas faire les lits avant de partir ?» Il ne lui fallait pas de poussière... Le soir, je ne restais pas m'amuser à l'école, je revenais rapidement, une bonne petite tartine de pain et j'allais travailler. Je ne sais pas si j'avais 13 ans quand j'ai commencé à faucher à la faux. J'avais terminé l'école. Heureusement, il y avait de l'entraide. Les voisins n'ont jamais laissé maman seule. [...] Mon père est revenu en juin 1945. Ma mère est décédée en 1946, je n'avais pas 18 ans.
On ne les attendait pas. La plupart des familles à la campagne n'avaient pas d'informations, pas de radio. On ne savait pas où ils étaient arrivés. Le dimanche 14 juin, on entend dire : « Les Allemands sont entrés dans Paris ! » Trois ou quatre jours après, ils étaient là. Ils allaient plus vite que le train ! On avait peur, surtout qu'on en entendait de toutes les manières à leur sujet. Les anciens nous avaient raconté la guerre, pour nous c'était terrible. Quand on entendait parler de l'arrivée des Allemands, on imaginait des combats, comme en 14-18.
Ma mère m'a raconté que le capitaine Emile a reproché à mon père d'avoir déclaré que son groupe de résistance était une bande de voyous. Il lui a répondu : « On ne prend pas le maquis dans un bourg, car si un coup de main ne réussit pas, c'est la population civile qui paie. » Mimile a rétorqué : « La population civile on s'en fout ! » Mon père lui a également dit que parmi ses hommes plusieurs avaient fait du marché noir avec les Allemands. Mimile a répondu : « Je le sais bien, mais quand on a un coup dur, ce sont ceux-là qu'on envoie devant. »
Les personnes âgées sont porteuses de véritables richesses. Elles possèdent la mémoire d'une époque, d'une communauté villageoise ou de quartier, elles ont été témoins d'évolutions et de transformations. Enfin, les ainés détiennent des éléments du patrimoine culturel immatériel souvent menacé de disparaitre.
Un jour, j'étais chez MH, deux Allemands s'amènent. Ils voulaient acheter des œufs. Ils se sont attablés, ils ont sorti leurs photos de famille, celles de leurs enfants : « Nous familles comme vous, enfants là-bas, même âge... » L'un d'eux s'est mis à pleurer.
Il y avait des prisonniers pratiquement dans toutes les maisons, dans toutes les portes.
Enfin, ne sous-estimez pas l'intérêt de raconter les anecdotes, les situations cocasses ou invraisemblables que vous avez vécues. Elles apporteront du piment à votre récit.