Je l’ai retrouvée, elle m’a retrouvé. J’effleure sa joue du bout des doigts et c’est comme une putain de décharge électrique, c’est comme si mon cœur pouvait battre à nouveau, comme si l’air entrait enfin dans mes poumons après 732 jours d’asphyxie. Je fixe le visage de Sophie, ma Sophie, celle à qui j’ai donné mon cœur et je ne comprends pas. Je ne comprends pas pourquoi a-t-elle prétendu s’appeler Kate ? Pourquoi a-t-elle agi comme si elle ne m’avait pas reconnu ? A-t-elle cessé de m’aimer ? 732 jours c’est long, trop long, mais maintenant qu’elle est là mon corps vit de nouveau, le sang pulse dans mes veines, c’est une putain de vague d’adrénaline. Je souris tout seul, comme l’abruti que je suis, au beau milieu de la forêt, je souris parce que je revis. Sans elle je ne suis rien, sans elle j’étais mort.
Rien ne peut me détourner de mon objectif, ni la fatigue, ni la faim, ni la douleur, ni la peur. La lune bienveillante m’accompagne, me guide, comme si elle était mon amie, mais je n’ai pas d’ami. J’ai cru en avoir un pendant un temps, mais j’ai dû me résoudre à l’abandonner. Je n’ai pas le temps de m’inquiéter pour quelqu’un d’autre que pour elle, je n’ai pas le temps de protéger, ni même d’aider quelqu’un d’autre. Tout ce que je fais, je le fais pour elle. C’est pour ça que j’existe, c’est pour ça que Sophie a besoin de moi.
Ce n’est pas facile de garder un rythme régulier lorsque l’on ne voit plus la lumière du jour.
Je n’ai pas peur, je possède un couteau attaché à l’un de mes mollets et je sais m’en servir. On n’est jamais trop prudent. Mon cœur bat la chamade dans ma poitrine et résonne jusqu’à mes oreilles. Chaque nerf sous ma peau est tendu, je suis comme à vif.
Mon cerveau est un champ de bataille transpercé d’épées. Je ne sais pas quelle heure il est, j’ignore combien de temps j’ai dormi, mais j’entends des voix s’élever à proximité de moi.
« Tous les drames de la personnalité partent du refus de vivre avec soi… »
Malcolm De Chazal