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Citation de VincentGloeckler


Comment faire entendre son désir naturel et sain de transparence ? Il était forcément dangereux, celui qui s'essayait naïvement à passer la frontière, à déchirer le masque social. Une mise à nu est une mise à mort, traduisait-elle par instinct, de l'écho performant qui lui parvenait du dehors. mais il y avait autre chose encore : elle avait tôt fait de considérer que personne ne disant jamais vraiment la vérité, il valait mieux s'attacher aux réponses que les livres pouvaient donner, même s'ils ne cessaient cependant, lorsqu'on les lisait, de poser plus de questions encore qu'ils n'apportaient de réponses. Elle avait bien tenté d'en apporter à certaines d'entre elles, mais à mesure qu'elle grandissait, les questions se transformaient à leur tour de telle sorte qu'il ne pouvait jamais y en avoir de définie. Comment pouvait-il en être autrement ? Les oracles ne se départissent jamais de leur mystère. Tiraillée par cet écart permanent, elle avait fini par comprendre : on ne parlait pas ainsi, on ne parlait pas cette langue de l'inconnu ailleurs dans la vie. on ne parlait jamais avec personne peut-être... Comme si les mots devaient tout lisser, tout encoder, tels les produits étiquetés dans les centres commerciaux. certains étaient plus valorisés que d'autres, il y avait un marketing des mots pour le travail, pour la société, pour les convenances. Des marques de politesse et des étiquettes. Partout. Alors elle s'était réfugiée dans une autre langue pour échapper à ce qu'elle connaissait déjà. Elle comprenait désormais davantage la force du silence. Pas celui qui prend le caractère des non-dits. Celui qui déplie autre chose que le langage lui-même et qui va plus loin, si loin qu'elle aurait aimé avec Lucas n'avoir à parler aucune langue. Ni le français - qu'elle adorait pourtant - ni le japonais - qui était sa langue maternelle. Uniquement celle-ci, libérée du corset du quotidien. Mikki se rappela que la nuit précédente ils s'étaient l'un et l'autre exprimés - sans tabous ' dans leurs ébats amoureux. Inventer une langue! Voilà la raison pour laquelle Rimbaud l'avait autant éblouie... Mais quelle langue parlaient-ils, eux, avec Akito ? Quelle langue devaient inventer les parents pour comprendre le fruit de leur union ? Est-ce que le silence n'était pas justement le pire, dans ce cas précis ? Est-ce que leur fils serait de nouveau capable d'en parler une autre ?
(pp.82-83)
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